Chapitre 66 : Maudits

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Décembre 1932

— Tonton, le Papa Noël... I'va... Euh... I'vient ce soir, pas v'ai ? s'enthousiasma Lucetta quand elle arriva dans la cuisine avec sa nourrice.

Luca échangea un regard hâtif avec Lucio et Lucia et quand l'expression des jumeaux pâlit, il prit conscience qu'ils avaient commis tous les trois la même erreur.

Ils avaient été si occupés avec les préparatifs du réveillon et de l'anniversaire de leur père, qu'ils avaient oublié l'élément le plus crucial de la soirée.

Le Père Noël.

Et les cadeaux pour la petite fille.

Avec un sourire presque crispé, Luca se pencha pour prendre sa nièce dans ses bras et il vit Lucio étouffer un rire dans son poing.

Le lâche, pensa Luca. Ça devait tomber sur moi.

— Ça dépend. Tu as été sage cette année ? demanda-t-il, doucement.

Lucetta fit un grand sourire d'ange et hocha vivement la tête.

Ses yeux clairs pétillèrent d'excitation.

— Moi, moi j'ai été... Beaucoup beaucoup sage ! Et même... Même papa... Papa i' a dit que moi bah... J'aurais p'eins de cadeaux, moi ! répondit-elle en se pointant du doigt, comme pour être sûre que son oncle ne se trompe pas de personne.

On est dans la merde.

— Eh bien tu peux demander à ton cher père d'aller vérifier si le Père Noël n'a rien oublié dans sa hotte.

— Nan mon vieux. Navré mais c'est sans moi. Je dois aller quelque part aujourd'hui.

Traduction : démerde-toi pour les cadeaux petit frère.

Et Lucio tourna les talons, laissant sa sœur et lui se débrouiller dans cette crise de dernière minute.

Lucio n'avait jamais eu la fibre paternelle. Il élèverait sa gamine – ou plutôt, il n'abandonnerait pas sa gamine, mais les anniversaires et les Noël ? Il ne fallait pas compter sur lui car il n'en voyait pas l'utilité.

Il ne fallait pas s'étonner.

Contrairement à lui qui avait été protégé et choyé par leur mère, Lucio avait grandi sous la tutelle du Parrain, à l'écart de tous.

Et les cadeaux sans retour d'investissement, c'était juste de la faiblesse.

*

Luca observa le paysage défiler à travers la vitre de la voiture.

Ils étaient dans un quartier résidentiel tranquille, sans histoire, contrairement à la Cité de Suie qui était une véritable jungle humaine. Ici, tout était calme, silencieux, il y avait peu de gens de sortie et il se demanda si sa grande sœur ne s'était pas trompée.

En voyant son air dubitatif, elle se moqua de lui.

— Allez, fais-moi confiance ! La petite bijouterie que j'ai découverte n'a rien à envier aux autres, ils ont des trouvailles si raffinées. Tu ne regretteras pas le détour.

— Et rappelle-moi qui va payer ? demanda-t-il en arquant un sourcil.

Lucia lui jeta immédiatement un regard noir.

— Ne sois pas comme ça ! C'est mon cadeau de Noël !

— Comme pour la robe émeraude ? Et les tasses en porcelaine ?

Elle ouvrit la bouche pour le contredire, mais la referma aussitôt et Luca eut un petit sourire victorieux. Qui fut très rapide. Car elle revint à la charge.

LA FLEUR DU MAL [MAFIA ROMANCE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant