Chapitre 48 : Paradis

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La journée s'était lentement achevée et j'avais passé ma soirée à faire ma valise.

Après le dîner, Ottavia nous avait convoquées, Ophelia et moi, dans son bureau. Elle nous avait annoncé que nous avions été choisies pour accompagner les Verratti en week-end à Trieste, dès demain. Elle n'avait pas eu besoin de préciser que notre mission était de veiller sur Lucetta.

Cela aurait pu me détendre. Se couper de l'organisation pour quelques jours aurait pu me soulager. Mais depuis que j'avais tué Enzo, la mort dormait dans mon lit. Je revoyais son visage, je revoyais sa gorge ouverte et je revoyais le sang qui dégoulinait.

Chaque soir.

Et à chaque fois que je me réveillais en sursaut, au milieu de la nuit, je me retrouvais en train de frissonner, en sueur, comme si je venais de revenir des enfers.

Il y avait des nuits où c'était supportable. Du moins, je m'habituais à cette sensation d'enfermement, comme si j'étais coincée dans un placard, impossible à ouvrir. Un coup d'eau au visage ou une douche, et mes palpitations se calmaient. Parfois, je m'installais à la fenêtre et respirais l'air frais.

D'autres fois, je devais l'avouer honteusement, je me rappelais de Luca. Luca et ses mains sur mes cheveux. Luca et ses bras qui m'entouraient, protecteur. Luca et son cœur qui battaient de manière puissante et régulière.

Et Enzo s'en allait.

Mais ce soir, quand j'étais allée au lit, ça avait été mille fois pire.

Je ne savais pas que les cris de Lucia m'avaient autant affecté, avant que mes cauchemars prennent une nouvelle tournure oppressante, où cette fois, c'était Enzo qui venait se venger.

Et c'était lui qui mettait ses mains autour de mon cou.

Je m'étais réveillée en sursaut.

Mais même éveillée, mon cœur n'avait pas voulu se calmer. J'avais eu des remontées, des haut-le-cœur et je m'étais réfugiée dans les toilettes, prête à vomir, tremblante de froid, transpirante, mais rien n'était sorti.

Et j'avais senti ma poitrine se contracter, me faire si mal, et mes battements s'accélérer à vive allure, boum-boum-boum-boum-boum ne voulant pas se calmer, ne voulant pas s'arrêter un instant, ne voulant pas me laisser en paix.

Comme si mon propre corps me rejetait.

Mon propre corps me niait.

Étrangère.

Criminelle.

Déshonorée.

Puis ma tête s'était mise à tourner.

Incapable de respirer, j'avais chancelé et mes jambes m'avaient lâchée. Je m'étais rattrapée in extremis au lavabo et... Contre toute attente, ce fut la sensation glacée du l'évier contre mes mains qui m'avaient permis de reprendre peu à peu mes esprits.

Ainsi que le visage de l'homme qui avait réussi à me faire sentir en vie depuis la mort de mon frère.

Celui qui ne m'avait jamais jugée, jamais critiquée, celui qui m'avait respectée et traitée dans la bienveillance la plus extrême malgré qui j'étais et ce que je ne pouvais pas lui dire.

Et une certitude égoïste m'avait traversé l'esprit.

Je voulais le voir.

Je devais le voir, parce que lui seul pourrait m'aider à me calmer, comme les autres fois.

Je ne savais pas quand mes jambes s'étaient redressées ni quand exactement j'avais quitté ma chambre. J'avais précipitamment traversé le couloir comme si on me pourchassait. J'avais ignoré Vania qui gardait la porte de Lucetta. J'avais même croisé des gardes du corps mais ils avaient été invisibles pour moi, sans importance.

LA FLEUR DU MAL [MAFIA ROMANCE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant