Chapitre 8 : L'entretien

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— C-comment ça ? balbutiai-je, en sentant mon cœur me lâcher. Qu'est-ce que... Qu'est-ce que j'ai fait...?

Elle me prit par les deux épaules et je me sentis frissonner de la tête aux pieds.

Ma couverture était déjà foutue ? C'était ça ? Parce que... Parce que je m'étais défendue d'un client ? Ça ne pouvait être ça, pas vrai... ?

Pas vrai ?!

— Écoute-moi bien, m'ordonna-t-elle à voix basse. Normalement, quand Ottavia vient, c'est moi qui lui recommande quelle fille choisir. Et ce soir, j'allais te recommander.

— Ottavia ? répétai-je. Elle est là ? Elle est arrivée ?

— Elle est là et je n'ai même pas eu le temps de lui parler qu'elle t'a recommandé. Elle m'a fait la description d'une fille et c'était toi. Alors dis-moi ce qu'il se passe Nera. Tu l'as déjà rencontrée ? Elle te connaît ? As-tu fait quelque chose qui a attiré son attention ?

Je secouai la tête à toutes ses questions, paniquée, comme une fillette qui tentait de clamer son innocence, mais qui n'avait plus de voix.

— Je ne sais même pas à quoi elle ressemble ! m'exclamai-je, la boule au ventre. Pearl, s'il-te-plaît ! S'il s'était passé quelque chose, je te l'aurais dit !

Elle m'observa pendant de longues secondes, les yeux plissés, troublée mais surtout inquiète, car je la voyais serrer ses lèvres et c'était un signe silencieux qu'elle se faisait du mouron.

Elle avait eu la même expression, la première fois qu'elle m'avait lavée quand j'étais malade.

Et après ma première fois.

Puis finalement, elle lâcha un soupir.

— C'est pas grave, finit-elle par dire, difficilement. Tu as été choisie par elle, c'est encore mieux. Elle va vous faire passer un entretien mais avant ça, il faut qu'on te refasse une beauté.

Elle m'emmena dans ses quartiers et elle prit une quinzaine de minutes pour me métamorphoser.

J'avais tronqué ma robe à corset pour un déshabillé en soie noire à fleurs rouges qu'elle avait piqué dans sa garde-robe et qui était légèrement transparente sur ma lingerie. J'avais fermement noué la ceinture à ma taille, par crainte qu'elle se défasse et que je me retrouve en petite tenue devant la dame.

Pearl avait mis un trait noir sur mes paupières pour faire ressortir mes yeux noisette, avant de finir par un rouge puissant sur les lèvres.

Vulnérable mais sensuelle.

Je n'avais pas eu le temps de penser à ce qui m'attendait qu'elle m'avait ensuite entraînée à l'étage. Et c'était une fois qu'elle me lâcha devant une porte, que je réalisai que j'étais en train de trembler.

Elle le remarqua et posa brièvement sa main chaude sur la mienne, sans rien dire.

Elle ouvrit ensuite la porte et on s'y engouffra à l'intérieur.

Nous étions dans un bureau d'administration du bordel où Pearl gérait les affaires.

Des piles de dossiers, des feuilles volantes, des factures, encombraient le bureau. Les bibliothèques étaient pleines à craquer de livres de compte, et l'aspect vieillot de la pièce la rendait lugubre. Le papier peint, beige pâle, commençait à prendre de l'humidité près de la fenêtre, et le bourdonnement de l'ampoule me rendit nerveuse.

On était loin des salles éclairées et des chambres aux couleurs vives. Loin des rires, des cris suaves, et des vapeurs de l'amour et de la sensualité.

LA FLEUR DU MAL [MAFIA ROMANCE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant