Chapitre 63 : Réalisation

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Cela faisait longtemps que je n'avais pas vu Pearl et comme à chaque fois qu'elle me revoyait, elle me regardait de la tête au pied et me palpait le corps.

Si elle trouvait que j'avais pris du poids et des seins, elle ferait appel à un médecin pour savoir si j'étais enceinte. Si j'avais maigri, il était urgent de savoir si je ne couvais pas une maladie infectieuse.

Cette fois, quand ses mains passèrent de mes épaules à mes bras, la surprise fit agrandir ses yeux.

— Qu'est-ce que ces mafieux te font faire ? Tu t'es affinée. Et... Tu as pris du muscle ?

Je fis une grimace de dégoût.

C'était à cause de Dante. Il ne me ménageait pas. Et il me répétait toujours que mon problème, c'était mon manque de force.

— Rien qui mérite d'être parlé, déclarai-je avec un geste de main ennuyé comme pour la dissuader d'aborder ce sujet.

Elle me jeta un long regard, mais n'insista pas.

— Et comment cela se passe ta mission ?

Cette fois, je fronçai des sourcils.

Pearl et moi avions une relation particulière.

Elle prendrait de mes nouvelles, ferait attention à ma santé et bien sûr, superviserait mes rapports avec les hommes pour savoir si j'étais bien protégée ou au contraire, ferait le nécessaire pour que je ne devienne pas mère.

En revanche, ce qu'on ne parlait pas, c'était des détails de mon infiltration.

Et elle avait l'air agité.

— Quelque chose ne va pas ? demandai-je à la place.

Elle mit une main sur mon dos pour m'emmener dans un coin du salon du bordel où on serait plus tranquille.

— Pearl... ?

La nuit, avec toutes les lumières chaudes, tamisées, superficielles, qui masquaient nos défauts dans une part d'obscurité, on ne verrait pas son visage tiré par l'inquiétude et les rides de l'âge autour de ses yeux qui commençaient à se former.

Pearl avait été la femme la plus belle que j'avais vue de toute ma vie – et c'était encore le cas - et une part de moi l'avait toujours mystifiée, avec son maquillage qui sublimait son visage, son châle léger sur ses épaules et sa taille de guêpe.

Mais le jour, sans artifice, avec la faible lumière froide de l'extérieur qui nous éclairait, Pearl me sembla tout à coup fragile.

Si on la touchait, elle se briserait.

Elle aussi avait perdu du poids.

Elle sortit une cigarette et m'en proposa une. Je refusai. Elle s'empara de son briquet, alluma la sienne et inspira une bouffée.

— Volpe veut te voir, annonça-t-elle en expirant sa fumée en même temps. C'est très urgent, il a dit... Et il était étrange au téléphone. Nera, poulette, je sais que tu as une raison de faire ce que tu fais... Mais écoute bien ce que j'ai à te dire.

Nouvelle bouffée de cigarette. Nouvelle expiration.

— Tu es jeune. Tu as toute ta vie devant toi. Une longue, précieuse et belle vie qui ne devrait pas être gâchée dans ce milieu. Suis ton instinct. Suis ton instinct de survie. On en a tous un. Si tu te sens coincée entre ces hommes, mafieux ou policiers, peu importe... Va-t'en. Si tu as de l'argent, pars. Si tu n'en as pas assez, utilise ton joli minois, prend le premier venu, marie-toi et pars. Contrairement à ce qu'on pense, tu pourras toujours le quitter. Mais ne laisse pas ces hommes te dire quoi faire. Ne les laisse pas avoir le droit de vie ou de mort sur ta vie. Jamais. Tu m'entends ?

LA FLEUR DU MAL [MAFIA ROMANCE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant