Chapitre 34 : Disparition

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— Ta maman t'a jamais envoyé à l'école pour t'apprendre à causer, le tocard ? brailla Enzo, dans la rue. C'est moi qui interroge le prochain.

Septembre était arrivé et on avait réquisitionné les équipes mixtes pour travailler sur des disparitions.

Nous étions en train de marcher dans le territoire et nous avions déjà interrogé les familles des victimes. On l'avait fait chacun notre tour et le tour de Clemente avait été plus laborieux que prévu.

Je jetai un regard à ce dernier qui avait rougi jusqu'aux oreilles.

— Fiche-lui la paix, maugréai-je alors en rangeant mon carnet dans la poche de ma jupe.

Enzo m'ignora, comme d'habitude.

Il continua de râler et je tapotai amicalement le bras du jeune garçon pour lui dire silencieusement de ne pas tenir compte de ses remarques intempestives. Toutefois, à ma grande surprise, je l'entendis murmurer :

— Au... Moins... J-je s-sais p-p-parler sans crier...

Mais ce qu'il s'affirme le petit !

— Hein ?! Il a dit quoi le plouc ?!

Je levai les yeux au ciel.

On arriva dans la rue marchande où des commerçants arrangeaient leurs comptoirs, appelaient les passants, scandaient les bons prix et leur article du jour. Du maraîcher au marchand de légumes, en passant par les boulangers ou l'apothicaire, on se fraya un chemin dans la petite masse d'habitants qui circulait entre les stands.

On s'arrêta devant un vieux marchand de journaux.

— Nous venons de la part des Verratti, s'introduit Enzo. Vous avez dit avoir vu une des victimes ?

Le marchand prit sa pipe de ses lèvres et plissa les yeux en nous regardant tour à tour.

— Vu ? J'ai à peine vu, mon p'tit. C'était pendant la nuit. L'homme était bourré, je l'ai juste vu emprunter une allée.

— Il était seul ? demandai-je. Personne ne l'a rejoint ?

Le marchand posa furtivement ses yeux sur moi et demeura silencieux un instant, comme s'il se demandait vraiment si je venais de l'interroger.

Enzo répéta mes questions.

Et il répondit.

— Il était seul, j'ai pas entendu de bruit de pas, mais avec mon âge avancé, mon oreille est un peu rouillée.

— Quelle rue il a empruntée ?

Il donna des indications et on reprit notre chemin. C'était ce qu'on avait fait toute la matinée : interroger les personnes, noter les indices importants, vérifier les informations. Chaque groupe avait été attribué une zone différente pour couvrir de manière large le territoire.

On quitta la rue marchande et on s'engouffra dans des quartiers plus éloignés, moins fréquentés, à l'extrémité du quartier Verratti.

On trouva la petite ruelle entre deux maisons. Le passage était assez étroit pour que deux personnes puissent marcher à côté, mais pas à trois. Clemente resta derrière nous.

On longea la ruelle et je m'accroupis à côté d'une benne à ordure.

— La victime a disparu hier soir, réfléchis-je à voix haute. Aucune trace de bagarre...

— Il n'y a que dalle ici ! Fais chier !

L'homme était entré dans cette rue et il avait disparu... Non, le marchand n'avait vu qu'une partie. L'homme empruntant ce chemin, c'était tout.

LA FLEUR DU MAL [MAFIA ROMANCE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant