L'arrivée à Séchane (3)

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Elle entendit l'homme se mettre à soupirer de déception, mais il ne fit pas le moindre geste et ne dit pas le moindre mot, au grand soulagement de la jeune femme. Il semblait avoir compris ce que la jeune femme voulait sans qu'elle ne dise le moindre mot. Elle ne voulait pas avoir à penser à ce genre de choses. Elle ne voulait pas être déconcentrée par quoi que ce soit. Elle n'avait qu'un seul objectif et elle ne voulait pas laisser quoi que ce soit la perturber dans le chemin qu'elle avait décidé de suivre. Et il semblait avoir compris ce qu'elle avait en tête et il l'acceptait, même si cela lui déplaisait.

Devant eux, ils pouvaient apercevoir les contours de la ville se détacher dans l'obscurité de la nuit. Malgré la pénombre qui régnait sur l'ensemble de la région, la faible lumière de la lune permettait de distinguer clairement les hautes murailles qui entouraient les habitations de la ville: c'était de hautes murailles en pierres épaisses qui devaient faire une dizaine de mètres de haut et formaient un rectangle quasi-parfait autour de la ville. Ces murailles étaient entourées elles-mêmes d'une espèce de grand fossé rempli d'eau qui empêchait à qui que ce soit d'atteindre les murailles. De ce qu'elle voyait, seul un endroit permettait de pouvoir entrer dans la ville: du côté sud de la muraille, une immense porte en bois se détachait des pierres et semblait assez grande pour pouvoir former un pont par-dessus le grand fossé. Cette ville semblait ainsi quasiment imprenable pour tous les ennemis qui se présentaient.

Derrière les murailles, on pouvait apercevoir des immeubles en bois hauts qui dépassaient des pierres, ainsi qu'une immense tour qui semblait faite pour surveiller tout ce qu'il se passait dans la région.

Cette ville donnait une mauvaise impression à la jeune femme: elle avait quelque chose de terriblement froid et quelque chose qui lui semblait crasseux. Elle ne pouvait pas apercevoir la moindre lumière de feu dans cet endroit alors que les villes étaient toutes connues pour avoir toujours des personnes éveillées à n'importe quel moment de la journée et de la nuit. Et là, ce n'était pas le cas. Ce n'était pas bon signe. Quelle était la politique des dirigeants de cette ville? Comment se comportaient-ils avec les étrangers? Étaient-ils, eux-aussi, dominés par les hommes en noir? En voyant les contours de cette ville, elle se mettait à craindre ce qu'elle pouvait trouver dans cet endroit.

Pour une fois, elle voulait passer une ville sans avoir à se battre.

_Alors, tu es réveillée, s'exclama la voix de Salvinah sur la gauche de la jeune femme? Contente de voir que tu as réussi à te remettre de ta maladie. Mais il fait dire que Rayak sait ce qu'il fait et que son aide a été précieuse.

_C'est bien la dernière fois que je fais une chose pour les autres, rétorqua alors l'homme avec amertume! Elle aurait du se douter de cette réaction de la part de l'homme: il était tellement déçu de la réaction de la jeune femme qu'il en était en colère, à présent. Peut-être même pensait-il qu'il avait été trahi par Levah? Peut-être pensait-il qu'il n'avait pas été récompensé comme il aurait voulu qu'il le soit? Et il commençait à développer une amertume et une haine qui ne devaient pas être siennes. Elle savait que rien ne pouvait faire disparaître ces sentiments qui commençaient à naître au fond de son cœur.

Elle ne comptait pas faire quoi que ce soit pour les calmer. Rayak devait comprendre qu'elle ne pouvait rien pour lui. Elle se fichait de ce genre de sentiment. Il n'y avait pas assez de place dans le cœur de la jeune femme pour cela: il n'y avait de la place que pour de la haine. Cela concernait tous les hommes. Elle ne voulait pas de ces choses mièvres. L'homme était obligé de l'admettre. Il n'avait pas le choix.

Levah tourna alors la tête en direction de Salvinah afin de soutenir son regard. Celle-ci regarda la jeune femme avec incompréhension et interrogation, semblant lui demander ce qu'il était en train de se passer. Celle-ci soupira et se contenta de hausser les épaules avec lourdeur, essayant de lui faire comprendre qu'il n'y avait pas grand chose à comprendre et qu'il ne valait pas la peine d'en parler. Elle voulait qu'elle comprenne de quoi il s'agissait sans qu'elle n'ait besoin de dire quoi que ce soit à haute voix.


Salvinah sembla le comprendre puisqu'elle lui sourit avec douceur et compassion avant de s'avancer vers l'avant de la caravane qui arrivait aux abords du grand fossé. Dans quelques instants, ils allaient arriver à la porte de la ville et ils en auraient bientôt fini avec ce maudit désert. Et elle en était très profondément soulagée. Le sable et la chaleur lui sortait par les yeux. Elle voulait oublier tout cela. Elle ne voulait plus penser à la fièvre des sables, ni aux gestes de Rayak. Elle voulait juste retrouver sa solitude tellement chérie, seulement accompagnée de Salvinah qui savait respecter ses silences.

Les Mondes Séparés: La ChasseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant