La sortie de Kortat (4)

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Levah regarda autour d'elle avec soulagement: elle était tellement contente d'avoir pu passer cette porte qui menait dans les marais, par-delà les falaises. Elle n'aurait jamais cru que de tels tunnels puissent exister sous de si grande falaises. Mais, ils existaient. Ils étaient immenses, hauts de plusieurs mètre et tout aussi larges, creusés à même la roche noire, sans que ce ne soit avec difficulté.

Ce n'était pas comme les tunnels souterrains de Pléna. Ces tunnels-là n'avait pas été construits par les précurseurs. Ils semblaient avoir été construits par les rôdeurs eux-mêmes. Les parois n'étaient pas nettes. Elles étaient mal construites. Et elles faisaient un peu froid dans le dos avec toute cette obscurité. Les rôdeurs avaient du construire ce genre de tunnels afin de pouvoir s'enfuir si jamais la forteresse était attaquée.

Mais elle était juste soulagée de voir quelles étaient enfin sorties de cet endroit et qu'elles pouvaient enfin respirer l'air libre et humide du brouillard des marais, ce qui étonnait la jeune femme avec force.

Et elle n'était pas les seules.

Tout autour d'elles, elles pouvaient voir des femmes de tout âge courir pour s'enfuir, tenant pour la plupart des enfants de tout âge dans leurs mains, les tirant pour les forcer à avancer ou les portant à bout de bras. Ces femmes ne pleuraient pas. Elles ne parlaient pas. Elles semblaient se contenter de marcher en direction de l'extérieur des marais avec une immense force. Ces femmes semblaient courageuses et solides, malgré les événements terribles qui se passaient durent cette nuit de bataille...

Au loin, Levah pouvait percevoir des bruits de combat: des hurlements étouffés par la distance et des bruits d'explosion qu'elle ne comprenait pas vraiment... Les combats semblaient âpres. Les combats semblaient particulièrement difficiles. Et elle n'était pas certaine que les soldats des rôdeurs puissent encore tenir longtemps face à leurs assaillants. Les hommes en noir semblaient beaucoup plus nombreux, beaucoup mieux équipés et beaucoup plus forts que tous les rôdeurs de la ville. Et en plus, ils avaient des loups des marais pour les aider à la prise d'assaut, au grand damne de la jeune femme.

Ces pauvres loups des marais pour lesquels elle ne pouvait rien faire. En tout cas, pas pour le moment.

Le soleil semblait montrer ses premiers rayons sur la région. Le brouillard semblait un peu plus clair. Et il semblait prêt à devenir encore plus clair. Elles avaient mis des heures avant de sortir des tunnels. Elles avaient déjà perdu assez de temps comme cela. Elles ne pouvaient pas se permettre de perdre encore la moindre seconde de plus à attendre que les choses ne se passent sous leurs yeux fatigués.

De toutes façons, elles ne pouvaient rien pour les rôdeurs.

_Levah, tu a réussi à t'enfuir, s'exclama une voix de jeune fille dans le dos de celle-ci? Je suis tellement soulagée!... Levah se retourna violemment, prête à se battre à la moindre occasion. Mais, elle se rendit vite compte qu'elle n'aurait pas besoin de faire cela: la jeune fille qui se trouvait devant elle était Lorya.

Comme toutes les femmes et tous les enfants de la forteresse, elle devait être dans cet endroit parce qu'elle essayait de fuir les hommes en noir autant qu'elle le pouvait. Mais, pourquoi s'arrêtait-elle soudainement de marcher pour parler à la jeune femme? Que cherchait-elle à faire? N'avait-elle pas plus important à penser? Après-tout, elle connaissait à peine Levah. Elle ne savait pas qui elle était et ce qu'elle faisait. Et elle semblait s'être trop rapidement attachée à Levah, ce qu'elle n'aimait pas du tout.

_Je ne savais pas qui vous étiez, ajouta alors rapidement Lorya. Je ne savais pas que Sedimah allait vous faire cela. Si j'avais su, je ne vous aurais pas dit d'aller à Kortat... Surtout après ce que vous avez fait pour moi!... Mais, je suis seule et je ne connais rien en dehors des marais. Je ne sais même pas comment on fait pour rejoindre le grand fleuve, sans l'aide de personne pour me guider sur le chemin.

_Tu n'as qu'à suivre les gens de ton peuple et tu finiras par retrouver la route, dit alors Levah en se mettant à marcher sur la route avec lassitude. Je suis sûre que tu vas parvenir à le faire, si tu fais des efforts.

_Levah! Attends,s'exclama Salvinah... Elle se sentit soupirer et se retourna rapidement. Elle vit Lorya la tête cachée entre les mains, semblant se mettre à pleurer à chaudes larmes. Comme cela, elle lui faisait penser à sa petite sœur Christie. C'était exactement le genre d'attitude que cette dernière pouvait prendre lorsqu'elle voulait absolument obtenir quelque chose de sa grande sœur et de ses parents.

Cette gamine lui faisait penser à sa sœur, quelque part. Elle ne pouvait pas le nier. Elle avait exactement les mêmes grands yeux pétillants et scintillants, exactement la même mine capable d'être boudeuse.

Cela rappelait à la jeune femme toutes les fois où Christie avait pu le faire avec elle pour obtenir quelque chose à manger, pour obtenir une faveur ou pour se faire pardonner lorsqu'elle énervait trop sa grande sœur. Et ça avait toujours énervé Levah. Ça l'avait tellement énervé à chaque fois qu'elle était obligée de faire face à ces regards tellement profonds et beaux, qui savaient si bien transmettre les émotions.

Et à chaque fois, elle avait été obligée de céder face à sa sœur. Elle finissait toujours par faire ce que cette dernière voulait. Elle n'avait pas trouvé le moyen de résister à cela, elle qui se targuait d'être si forte.

La jeune femme se retourna vers la route, se sentit soupirer avec une grande force et déclara froidement:


_C'est bon. Elle pouvait venir avec nous. Mais, je ne ralentis pas. Je ne m'occupe pas des autres. Et, je ne vous conduis pas plus loin que le fleuve... Je ne suis pas une mère. Si vous avez le moindre besoin, vous demandez à Salvinah... Je vous préviens: je n'accepte personne de plus. On est déjà trop nombreuses. J'aime pas ça.

Les Mondes Séparés: La ChasseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant