La fuite

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Salvinah attrapa la main de Lorya dans la sienne afin de l'aider à continuer d'avancer malgré la fatigue et se mit à courir encore plus rapidement sur les routes étroites des marais, passant les ponts de bois aussi vite qu'elles le pouvaient.

Levah les suivait à la même allure, se retournant à intervalle régulier pour s'assurer que rien ne les suivait.

Autour d'elles, le brouillard semblait de moins en moins épais et de plus en plus clair, leur permettant de voir un peu plus loin. Le jour semblait être en train de se lever lentement. Elles avaient couru toute la nuit comme cela: comme des proies prises en chasse par la mort elle-même. Et elles commençaient à être à bout de force, surtout pour Lorya dont les blessures étaient tellement importantes.

À ce rythme-là, elles n'allaient plus pouvoir tenir longtemps ce rythme de course. Elles allaient finir par s'effondrer et par être rattrapées par ces monstres, et par finir par être dévorées vives par des animaux.

Dans le meilleur des cas...

Il fallait que cette fameuse ville cachée soit près d'elles, à présent. Elles en avaient besoin. Elle détestait devoir reconnaître cela, mais les trois femmes avaient absolument besoin d'aide pour survivre.

Pourtant, elle avait beau plisser les yeux, elle ne voyait rien dans ce brouillard. Elle ne voyait pas de remparts, nul part. Elle ne voyait que le brouillard. Elle ne voyait que les arbres immenses. Elle ne voyait que les cours d'eau et les ponts qui passaient par-dessus. Mais il n'y avait aucune trace de vie humaine. Il n'y avait rien. Et elle devait avouer qu'elle commençait à en avoir assez de ces marais maudits.

Elle n'arrivait pas à croire que Rayak ait pu avoir raison en lui disant que les marais étaient dangereux et qu'elles ne pouvaient pas y aller juste à deux. Elle avait pensé qu'il avait dit cela pour retenir la jeune femme avec lui et pour essayer de la conquérir. Mais, il avait aussi dit cela parce que c'était ce qu'il pensait et parce que c'était ce qui était vrai, d'après ce que la jeune femme pouvait voir.

Et ça lui faisait mal de reconnaître cela.

Soudainement, elle eut l'impression d'apercevoir une ombre très lointaine devant elles, une immense ombre qui faisait plus d'une centaine de mètres de haut, comme une espèce de falaise. Elle ne le savait pas exactement. De là où elle était, à travers le brouillard, tout était flou. Elle n'avait que des impressions. Et elle espérait profondément qu'il s'agissait de la ville dont Salvinah lui avait parlé. Elle le voulait.

Elle vit Salvinah se retourner en arrière pour regarder derrière la jeune femme, écarter les yeux de terreur et se mettre à courir encore plus rapidement possible. Levah n'eut pas besoin de regarder en arrière pour savoir ce qu'il se passait: elle entendit un hurlement puissant déchirer le silence des marais. Un loup se trouvait juste derrière elles. Et, il semblait se rapprocher de plus en plus vite. Leur situation était désespérée.

Elle-aussi, se mit à courir plus rapidement, grimpant un pont de bois à grande vitesse sans s'arrêter, sentant les griffes de Zera accentuer leur prise sur la peau de son épaule, si bien qu'elle sentit une douleur l'envahir.

Ce fut alors qu'elle le vit: sortant des arbres, il vint se placer devant les trois femmes, à une vingtaine de mètres de là où elles étaient. Il était immense. Il était bien plus grand et bien plus large que lajeune femme. Il se tenait sur de longues pattes au pelage de couleur nuit, aux mille scintillements. Ses épaules étaient larges et musclées sous ses poils. Il avait une longue queue touffue qui devait faire plus de deux mètres de long, ce qui était important, même pour un animal de cette taille.

Mais le plus important était sa gueule! Il avait de grands yeux noirs et brillants qui suivaient furieusement chaque mouvement des trois personnes. Ses oreilles étaient dressées au-dessus de sa tête, longues et en parfaite forme de triangle. Son museau était très allongé. Sa gueule entrouverte laissait apparaître des dents tranchantes, notamment des canines acérées qui pouvait tout déchiqueter.

Les loups des marais n'étaient pas de simples loups, comme ceux des montagnes qui étaient complètement inoffensifs pour les hommes: il s'agissait de loups géants. Il s'agissait de loups assoiffés de sang qui pouvaient les tuer d'un seul coup de crocs. Évidemment qu'ils étaient dangereux!

Elles étaient bloquées. Un loup derrière elles et un loup devant elles. Les cours d'eau des marais de chaque côté. Elles devaient absolument avancer, mais elles ne le pouvaient pas tant que les loups seraient à leur poursuite. La jeune femme comprenait soudainement que fuir ces bêtes n'était pas suffisant. Elles étaient bien trop solides et bien trop rapides. Leur saut leur permettait de traverser les cours d'eau sans la moindre difficulté.


Il n'y avait qu'une solution pour la jeune femme: elle devait se battre contre les loups afin de permettre à Salvinah et à Lorya de pouvoir s'enfuir plus en avant et se mettre à l'abri de ces animaux.

Les Mondes Séparés: La ChasseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant