Les Mondes Séparés: La Chasse

La fuite (3)

Elle se mit alors à courir en face du second loup, allant dans sa direction avec de plus en plus de vélocité. Elle ne savait pas ce qu'elle allait faire face à ce second ennemi, comment elle allait réussir à l'éliminer. Elle ne savait qu'une seule chose: elle n'avait pas le choix. Elle ne pouvait pas faire autre chose que le vaincre.

Alors qu'elle arrivait à la hauteur de l'animal, la jeune femme se laissa glisser à terre d'un seul coup, se laissant chuter avec lourdeur. En quelques secondes, elle se retrouva sous le loup qui continuait de courir avec toujours la même rapidité, ne semblant pas comprendre ce qu'il se passait en dessous de lui.

Avant que l'animal ne puisse s'échapper, Levah enfonça ses deux couteaux dans le ventre de celui-ci en y mettant toutes les forces qu'elle avait dans les bras et faisant abstraction des gouttes de sang qui tombaient sans cesse sur son son visage avec de plus en plus de force, montrant qu'elle l'avait touché.

Elle retira les couteaux tandis que l'animal se mettait à s'effondrer sur le sol de cette minuscule route en hurlant de douleur. Elle le vit alors se prendre les pieds l'un dans l'autre, et rouler sur lui-même une fois avant de s'arrêter, se couchant sur le flanc et se mettant à haleter avec de plus en plus de force. Il était gravement blessé. Cela se voyait. Il avait peut-être même été mortellement blessé par les couteaux.

La jeune femme se redressa en un seul bond et se retourna vers le loup des marais, sentant ses mains serrer les couteaux avec de plus en plus de force. Mais, elle n'avait plus rien à craindre de cet animal. Il était bien trop blessé. Il ne pouvait plus rien faire de mal à la jeune femme, dans cet état de santé.

Cela se voyait à la lueur de ses yeux et à la manière dont il la fixait sans ciller. Ça lui faisait même mal au cœur. Elle ne supportait pas de voir des yeux avec une telle souffrance, semblant la supplier d'abréger ses malheurs le plus rapidement possible. Il avait compris qu'il allait mourir lentement, très lentement. Et il voulait qu'on lui permette d'éviter toutes ces choses en arrêtant son existence immédiatement.

Lentement, elle se rapprocha de l'animal, ne pouvant s'empêcher de toujours se méfier de lui. Mais, ce qu'elle découvrit lui déchira le cœur: sur le flanc arrière de l'animal, au niveau de sa cuisse, se trouvait une marque qu'elle reconnut tout de suite, les deux épées anciennes et les flèches à huit directions. La marque des hommes en noir. Que faisait cette marque sur cet animal? Que cela voulait-il dire? Quel était le rapport entre ces loups des marais et les hommes en noir? Que ces hommes avaient-ils fait?

Lorsqu'elle se retourna vers le reste de son corps pour l'observer, elle eut l'impression de commencer à avoir une réponse: l'ensemble de la peau de cette bête était recouvert de longues blessures qui parsemaient son pelage. Ces blessures étaient très profondes et parfaitement droites. Elles donnaient l'impression d'avoir été faites par des coups de fouet. Et, ces animaux étaient incroyablement maigres! Même sous leur pelage, on pouvait parfaitement voir leurs côtes ressortir et chacun de leurs os saillir sous leur peau. Ils donnaient l'impression d'avoir été affamés afin qu'ils en deviennent plus féroces et plus violents, une fois plongés dans les villages qui se trouvaient dans les marais.

Elle sentait que les hommes en noir avaient fait cela. Ils n'avaient pas hésité à affamer et à torturer ces pauvres animaux afin de les rendre plus violents et plus agressifs envers les habitants des marais. C'était absolument ignoble. C'était horrible. Comment pouvait-on décider de tourmenter de pauvres animaux innocents juste pour arriver à ses fins? N'avaient-ils aucun respect pour les êtres vivants? Que cherchaient-ils exactement à faire? Ce n'était pas ces loups qui étaient des monstres! C'était les hommes en noir qui les avaient créés et qui les avaient traités de cette manière qui étaient monstrueux.

Instinctivement, Levah se rapprocha du loup qui ne cessait de la regarder avec intensité tout en haletant avec de plus en plus de force. Elle passa délicatement sa main sur son crâne afin de le caresser avec douceur. Elle était tellement désolée de leur avoir fait du mal. Elle se sentait coupable. Et elle avait de la peine pour eux. Elle sentait une immense tristesse l'envahir. Elle avait de la compassion pour cette créature qui souffrait tellement, bien plus que pour la plupart des humains qu'elle croisait.

Et elle ressentait encore plus de haine envers les hommes en noir: ils étaient encore pires que tout ce qu'elle pouvait penser.

Maintenant, la seule chose qu'elle pouvait faire était de soulager les souffrances de cet animal. Il allait mourir. Ce n'était qu'une question de temps. Et il allait terriblement souffrir s'il restait comme cela. Mais, elle pouvait faire en sorte d'abréger son agonie et de le laisser partir en paix dans l'autre monde.

_Je suis désolée, dit alors la jeune femme d'une voix faible. Et elle frappa le crâne de l'animal à l'aide d'un de ses couteaux, enfonçant sa lame aussi profondément que possible jusqu'à ce que ses muscles ne se relâche...