Chapitre 32 (2)

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Daro'Shamada  était à deux doigts de faire une syncope : un Ange les avait prises  pour cible et elle n'avait qu'un simple couteau comme arme...

— Reste bien derrière moi, Mary !

L'infirmière  tremblait de tous ses membres. Daro'Shamada espérait que ce premier  combat ne l'empêcherait pas de retourner sur le champ de bataille par la  suite... Ils auraient besoin de son aide. Elle était la seule du corps  médical à connaître les techniques khajiitis.

L'impact  arriva et Daro'Shamada étouffa un grognement. Elle sentit la vitesse de  l'Ange se répercuter dans chacun de ses membres et elle ne put empêcher  ses pattes de s'enfoncer dans la terre. Elle dut faire un pas en  arrière et, au moment où elle allait répliquer, l'Ange prit de la  hauteur pour revenir rapidement vers elles.

— Sundii-hi !*

Daro'Shamada  ne réfléchit pas. Elle rangea son arme et se jeta sur Mary. Un grand  loup sauta au-dessus d'elles et un cri de guerre les obligea à poser  leurs mains sur leurs oreilles. Un hurlement plaintif les força à lever  la tête pour regarder ce qui se passait. Mercur venait de planter ses  crocs dans les ailes de l'Ange et secouait sa tête dans tous les sens.  Le guerrier ailé pleurait et tentait de le frapper pour le faire lâcher  prise, mais Geyra protégeait son compagnon à quatre pattes en parant  chacune des attaques. Après plusieurs minutes, leur ennemi cessa de se  débattre, épuisé, et supplia la Valkyrie de mettre fin à sa souffrance,  mais Geyra resta muette et Mercur s'en donna à cœur joie. Ses  grognements jouissifs prenaient de plus en plus d'ampleur alors qu'il  sentait les os de son ennemi se briser entre ses mâchoires, ses chairs  se déchiqueter et son sang dégouliner sur sa langue.

Après  ce qui sembla être une éternité à Daro'Shamada, Geyra donna un léger  coup de talon à Mercur. Il lâcha l'Ange qui soupira de soulagement et,  au moment où il s'apprêtait à ramper pour fuir, le loup lui bondit  dessus et l'éventra. Ses hurlements se transformèrent bientôt en cris,  puis en grognements. Ses yeux s'éteignirent alors qu'il se noyait dans  son propre sang.

Geyra  flatta l'encolure de Mercur qui haletait. Il hurla et d'autres loups  lui répondirent. La Valkyrie mit pied à terre et rejoignit Daro'Shamada  et Mary.

— Ça va ?

— Merci de nous être venu en aide !

Mary resta muette, encore trop secouée par la scène qui s'était déroulée sous ses yeux, et se contenta de lui sourire poliment.

— Bien, dit Geyra. J'y retourne. Soyez prudentes et appelez à l'aide si besoin. Je ne serai pas loin.

Elle  bondit sur le dos de Mercur. Il hurla une nouvelle fois et rejoignit  ses compères pour les aider à nettoyer le champ de bataille. En levant  les yeux pour observer les alentours, Daro'Shamada s'aperçut qu'il ne  restait presque aucun Ange. Les dragons dévoraient les derniers qui  restaient encore en l'air, les loups et leurs Valkyries achevaient ceux  qui tenaient encore debout et les Créatures de la nuit utilisaient pour  excuse les combats pour se nourrir sur les cadavres encore chauds. Quant  aux Pahmar-raht, ils faisaient un tour du camp pour être sûrs qu'il ne  restait aucun Anges.

— Vous  avez bien combattu, déclara Srenta quand tous leurs ennemis furent  morts, dévorés ou brûlés. Notre équipe médicale n'a subit aucune perte  et peu d'entre nous sont décédés. Nous ferons une veillée funéraire après  la réunion quotidienne avec les autres Sages. En attendant,  continua-t-il après avoir repris son souffle, je compte sur vous pour  déplacer le campement. Nous ne pouvons pas séjourner là où le sang de  nos adversaires a coulé.

Quand  il eut déplacé sa tente, Ordy invita Daïbel à y entrer. Il lui tint le  pan de tissu et elle s'engouffra dans l'espace couvert. Sans un mot, ils  s'installèrent à même le sol et fermèrent les paupières. Ils  inspirèrent à fond pour se détendre et oublier l'endroit où ils se  trouvaient, puis laissèrent leurs esprits rejoindre le socle imaginaire.  Ils étaient les premiers, mais sentaient que leurs compagnons ne  tarderaient pas à les rejoindre. Ils n'attendirent même pas cinq minutes  que Z'en et Arkaï se joignirent à eux, puis Kynel et Maya arrivèrent à  leur tour.

— Vous semblez épuisés, souffla cette dernière en avisant la tête des premiers arrivés.

— Oui, soupira Daïbel en repensant à ce qui venait de se passer. Un commando d'Anges nous a fait la surprise d'une attaque éclair.

Un silence pesant tomba sur le socle imaginaire.

— Comment ça s'est passé ? demanda Z'en.

— On  a eu de la chance : peu d'entre nous sont morts et le corps médical n'a  pas été touché, mais je pense que l'idée du blocus tombe à l'eau. Les  Anges sont au courant de notre petite sauterie...

— Que faisons-nous dans ce cas-là ?

— On  va encercler la ville, mais plus proche cette fois-ci. Comme ça, si  jamais un groupe a besoin d'aide, il aura des renforts dans l'heure.

— C'est vrai que nous sommes très éloignés les uns des autres, dit Arkaï. On se déploie tout autour de la ville du coup ?

Srenta acquiesça et reprit la parole :

— Oui. À une demi-journée de marche de Kaïthy, on se séparera et nos armées respectives suivront.

— D'ailleurs, petite question, Srenta : comment se porte ton informateur ?

— Je n'ai pas eu de ses nouvelles depuis quelque temps. J'espère qu'il ne lui est rien arrivé...

Le regard de Srenta se voilât et ses sourcils se froncèrent.

— Bon ! s'exclama Kynel, mal à l'aise dans cette ambiance presque mortuaire. Comment sait-on quand on attaquera ?

— Je  propose un message télépathique, murmura timidement Daïbel. C'est ce  qui nous a permis de nous réunir quand l'Académie est tombée et c'était  vraiment très, très rapide et efficace...

Srenta  sortit de ses pensées et acquiesça. Leurs compères firent de même et  décidèrent que la réunion du soir était terminée. Après s'être salué,  chacun se retira et, quand Ordy ouvrit les yeux, il était déjà l'heure  de la soirée mortuaire. Il soupira, se releva et proposa son aide à  Daïbel. Ils sortirent de la tente et rejoignirent leurs compagnons. Les  corps avaient déjà été allongés sur un bûcher. L'huile et les torches  étaient prêtes pour accompagner les morts dans leur dernière demeure.

— Mes  amis, retentit la voix d'Ordy. Merci beaucoup de vous être occupés des  préparatifs. Je sais à quel point c'est dur et triste, mais ils  n'auraient pas souhaité que le chagrin envahisse nos cœurs en cette  période de guerre. Rendons leur un dernier hommage !

Sur  ces mots, il attrapa l'une des torches et la jeta sur les corps. Les  flammes les engloutirent, produisant une épaisse fumée noire qui monta  haut dans le ciel, puis les réduisirent en cendres.

Ordy pouvait entendre les pleurs des proches des décédés et son cœur se serra dans sa poitrine.

Ils ont besoin de ce moment pour être plus efficaces sur le champ de bataille, lui souffla Kunsumid.

Quand  le feu s'éteignit, Ordy regroupa les généraux de son armée dans sa  tente et leur dévoila le plan que les Sages avaient mis au point lors de  leur dernière réunion. Après quelques ajustements, il fut décidé qu'ils partiraient à l'aube.


*Baissez-vous !

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