Chapitre 7 (2)

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La vieille femme s'assit sur le lit, à côté de la jambe de Margot, et fixa intensément le jeune homme aux cheveux auburn. Mal à l'aise, ce dernier déglutit. Il s'approcha de la chaise sur laquelle il était précédemment assis et s'y installa à nouveau. Il effaça de son esprit la présence de l'Ancêtre, totalement concentré sur les réactions de son amie.

- Tu te souviens que le Second Prince t'a demandé de parler en Draconique et que tu lui as coupé la parole ?

Elle se contenta de hocher la tête.

- Après ça, il a commencé à te rouer de coups et a menacé de te tuer en te demandant qui t'avait appris à parler aussi rapidement Draconique. Comme tu ne répondais pas, il voulait t'embrocher sur son épée. Pendant que tout ça se déroulait, j'étais en conversation télépathique avec l'Ancêtre. Si les choses tournaient mal, j'avais carte blanche pour nous sortir de ce pétrin.

Il tourna un instant le regard vers la doyenne qui hocha la tête pour confirmer ses dires.

- Quand je suis revenu à moi, j'ai vu ce qu'il se passait et j'ai arrêté de réfléchir. Je n'avais qu'une idée en tête : te sortir de Kaïthy et t'emmener dans un endroit où tu serais en sécurité. J'ai repris ma forme initiale, j'ai tué beaucoup de gardes angéliques, j'ai arraché les ailes du prince et je t'ai ramenée chez moi.

Le jeune homme ne put s'empêcher de fixer un point dans le lointain. Il n'avait pas honte de ce qu'il avait fait, mais il avait peur de la réaction de Margot.

Comme le silence se prolongeait, il reprit son récit.

- Nous sommes à Thymoïsow, l'île des Dragons. Quand Alduin est mort, les peuples libérés se sont alliés et ont mené une chasse aux Dragons. Ils nous considéraient comme des êtres puissants, trop puissants, et nous ont exterminé. Laatonikov a réussi à créer un refuge pour les derniers Dragons grâce à une barrière dissimulatrice autour de cette île. Quiconque ne fait pas parti de notre peuple et essaie de franchir cette barrière se retrouve propulsé à un autre endroit du globe. Laatonikov a fait en sorte que la traversée leur paraisse normale.

- Il n'y a eu aucun problème pour toi car tu es l'héritière spirituelle de Laatonikov et que Horte te ramenait, ajouta l'Ancêtre la regardant du coin de l'œil.

Les deux Dragons se turent et observèrent Margot, restée muette pendant leur récit. Horte se figea : une larme solitaire coulait le long de la joue de son amie.

- Hé ! s'écria-t-il en se penchant vers elle pour la lui essuyer. Tout va bien Margot, tu es en sécurité.

- Je comprends très bien pourquoi tu ne m'as pas dévoilé tes origines et ta véritable identité, mais j'avoue que ça fait quand même mal ici.

Ce disant, elle désigna son cœur et plongea son regard ambré dans le sien.

- Je sais bien que tu ne pouvais pas me le dire car c'était dangereux pour toi, mais j'ai tout de même l'impression d'avoir été trahie. Je suis désolée d'être si égoïste...

Horte eut un pincement au cœur. Il se leva et s'installa sur le lit aux côtés de Margot. Il la prit dans ses bras et l'étreignit comme s'il la voyait pour la dernière fois. Elle passa ses bras autour de ses épaules et le serra contre elle. Des larmes de peine coulèrent à flot sur ses joues.

- Je suis désolée, répéta-t-elle dans ses bras. Je suis désolée d'être si égoïste.

Horte ne savait pas quoi dire. Il se contenta de lui frotter le dos, son menton posé sur le sommet de son crâne et ses bras enroulés autour d'elle comme s'il voulait la protéger du monde extérieur.

Après de longues minutes, Margot se calma et renifla de manière peu élégante. Horte rit et lui tendit un mouchoir en tissu. Il se rassit sur la chaise, lui laissant de l'espace et croisa le regard de l'Ancêtre. Il était perçant, presque sévère.

- Tu risques d'y laisser des plumes, Horte.

- Des écailles plutôt...

- Arrête ! Tu sais parfaitement qu'elle sera à un moment ou un autre rappelée dans son monde. Et quand ça viendra, qu'est-ce que tu deviendras ?

Il se contenta de hausser les épaules et détourna les regard. Il n'avait jamais pensé à ce moment... et ne voulait pas y penser. Il vivait dans le présent, aux côtés de Margot. Ni plus, ni moins. Le futur, il s'en occuperait quand il y serait.

- Ça va mieux, Margot ?

Elle hocha la tête et lui sourit timidement.

- Merci pour tout, Horte.

Elle lui attrapa la main et la serra. Le jeune homme sentit son cœur accélérer et ses joues rougir alors que Margot le regardait avec beaucoup de tendresse.

C'est le regard qu'elle réserve à ses amis, lui chuchota une petite voix en son fort intérieur.

Après un énième sourire, elle se redressa et le lâcha. Un vide indescriptible lui enserra la poitrine. Il se sentait terriblement seul alors que la jeune femme reportait son attention sur l'Ancêtre, lui souriait et la remerciait chaleureusement pour son accueil. Une pointe de jalousie lui piqua le cœur et il se retint de justesse de dire une ânerie pour qu'elle se focalise sur lui.

Tu n'es rien de plus que son ami, mariole.

Horte déglutit. Oui, il n'était que son ami.

- Qu'en penses-tu, Horte ?

Le jeune homme revint sur terre et fixa la doyenne de son clan. Il cligna deux fois des paupières. Il n'avait rien écouté de leur conversation, trop occupé à se focaliser sur ses sentiments.

- Il faudrait entraîner Margot à invoquer Inlokved. Que penses-tu de Biilokah comme coach ?

- Fausse bonne idée ! s'écria-t-il, de la sueur à ses tempes en imaginant tous les mensonges qu'elle pourrait raconter à Margot pour l'éloigner de lui. Elle ne sait pas tenir sa langue et raconterait à tout le monde la situation de Margot... Puis je ne lui fais pas confiance.

- Je n'avais pas pensé à ce problème-là... Bon, tu t'en occuperas alors.

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