Chapitre 22 (1)

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La lune était déjà haute dans le ciel lorsque les Anges et les étudiants arrivèrent à Kaïty. Les gardes ailés, en surnombre, avaient portés les prisonniers durant tout le voyage. Certains en avait profité pour faire des acrobaties et lâcher les étudiants dans le vide pour les rattraper à quelques centimètres du sol. Leurs hurlements terrifiés faisaient rire aux éclats les Anges.

Heureusement pour elle, le garde qui portait Margot était beaucoup plus posé. Pas une fois il ne l'avait bousculée de la sorte. Bien qu'il n'ait pas décroché un mot de tout le trajet, elle avait eu l'impression qu'il faisait attention à son confort. Contrairement aux autres, il la portait comme une princesse. Elle était calée contre son torse protégé d'une armure en acier. Ses bras musclés la maintenaient fermement pour qu'elle ne tombe pas, tout en évitant de lui broyer les os. La brune l'avait dévisagé pendant le voyage et avait reconnu le garde qui avait joué la scène d'amour de A&L avec elle. Elle aurait voulu lui parler, l'interroger sur la suite des évènements, mais elle n'osa pas : elle avait bien trop peur des conséquences... Même s'il semblait plus fréquentable que ses semblables, il restait tout de même un Ange.

Quand la capitale de Kaïtharow fut en vue, les Anges ralentirent pour se poser dans la cour du palais impérial. Le garde en charge de Margot la déposa délicatement et attrapa les chaînes qui lui liaient les poings et les pieds. Une fois tout le monde à terre, un marteau frappa trois fois la peau d'un tambour. La jeune femme tourna la tête, curieuse de voir l'instrument de musique. Elle resta bouche bée quand elle l'aperçut. Il devait faire trois mètres de diamètre. Son cadre légèrement ovale était fait dans un bois gris et une peau y était tendue. En plissant les yeux, la brune réussit à voir qu'un losange était dessiné au centre. Quatre traits doubles s'étiraient vers les bords de l'instrument géant depuis les coins de la forme géométrique. Des formes abstraites se trouvaient au bout de chacun d'eux. Sur le périmètre, des silhouettes couraient, chassaient, cultivaient ou encore discutaient. Des maisons étaient représentées simplement. Par endroits, des marques d'usure étaient visibles : ce devait être à ces endroits que le marteau frappait pour retentir dans l'enceinte du palais impérial...

Les gardes s'écartèrent du groupe de rescapés, produisant un brouhaha métallique. Les chaînes s'écrasaient au sol et les parties de leurs armures s'entrechoquaient dans un tintamarre insupportable. Margot dut fermer les yeux pour mieux le supporter. Longtemps les échos se répercutèrent contre les murs de la demeure impériale, se mêlant aux basses encore présentes du tambour sami. Quand enfin le silence retomba sur eux, des acouphènes firent bailler la jeune femme. En rouvrant ses paupières, elle s'aperçut que les soldats angéliques s'étaient tous prosternés. Dubitative, elle haussa un sourcil et chercha du regard Horte. Quand ses yeux croisèrent les siens, un sourire crispé lui déforma les lèvres. Il semblait à bout de nerfs. Des cernes noircissaient sans pitié son visage. Ébouriffé à cause du vol, il paraissait ne pas s'être coiffé depuis plus d'un mois. Ses vêtements étaient en vrac, lui donnant l'air d'un fou. Malgré tout, son sourire s'adoucit au fur et à mesure que leur contact visuel durait.

Est-ce que Nikka est là lui aussi ?

Après un hochement de tête, elle tenta discrètement de le chercher en balayant du regard les personnes qui l'entouraient. En vain. Ils étaient triés par niveau et les premières années étaient en tête de file. Margot croisa les doigts pour qu'il ait réussi à s'échapper...

L'un des Anges frappa de nouveau le tambour sami et un déclic attira l'attention de tous les étudiants. La jeune femme reporta son attention face à elle. En haut de la longue volée de marches, deux lourdes portes en bois précieux s'ouvraient doucement dans un cri d'agonie. Margot déglutit. D'où provenait ce bruit ? Ce ne pouvait pas être la porte qui hurlait de la sorte...

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