Chapitre 16 (1)

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Il faisait noir. Encore...

Tellement noir... Où était-elle ?

Un sentiment de déjà-vu serra le cœur de Margot. Elle plissa les yeux dans l'espoir de savoir d'où venait cette sensation. En vain. Elle ne se souvenait de rien...

Quelque chose lui effleura l'épaule droite. À moins que ça ne soit l'épaule gauche?Elle n'arrivait plus à déterminer où était sa gauche, sa droite, le haut et le bas...

Comme pour l'autre rêve, lui chuchota une petite voix dans sa tête.

Elle fronça les sourcils, du moins elle essaya.

Quel rêve ?

Elle ne se souvenait pas d'avoir été dans un monde onirique qui ressemblait à l'endroit où elle se trouvait...

Malgré l'obscurité et sa perte de repère, Margot se sentait en sécurité. La chose, ou la personne, qui lui touchait l'épaule était apaisante, connue et rassurante. Elle était omniprésente. Qui était-ce ?

- Onik Vulom, déclara une voix féminine sortie d'outre-tombe, yah kotin hi vahzen rii.

Comme Margot restait de marbre - faute d'arriver à contrôler son corps -, la présence bougea, se faufila dans les ténèbres dans lesquelles elles se trouvaient. La jeune femme le ressentait. Elle eut l'impression que de l'eau les entourait et qu'elle transmettait chaque mouvement. Où était-elle ?

Deux améthystes apparurent devant elle. Elles étaient hautes, inaccessibles, mais elles brillaient tellement dans le noir que la jeune femme eut l'impression d'avoir face à elle deux soleils violets. Une haleine mentholée la frappa. La présence était proche. Qui était-ce ?

- Onik Vulom, yah kotin hi vahzen rii ! répéta la voix, plus insistante cette fois.

Le souffle sucré la parcourut des pieds à la tête, comme un fantôme qui cherchait désespérément quelque chose.

La présence disparut. Le souffle mentholé aussi. Qui était-ce ?

Elle se retrouva seule dans cet endroit plongé dans les ténèbres où l'espace-temps ne semblait pas avoir d'emprise. Où était-elle ?

Elle avait l'impression de tomber, tomber, tomber... encore et encore. L'atterrissage serait douloureux. Encore !

Un choc ramena Margot à la réalité. Une douleur lancinante parcourait son flanc gauche. Un grognement sourd s'échappa de sa gorge. En ouvrant les yeux, la jeune femme se rendit compte qu'elle se trouvait à même le sol. Sa couverture et ses draps étaient enroulés autour de sa jambe droite. L'autre était croisée par-dessus la première dans un angle étrange.

- En v'là des manières de s'réveiller !

Encore dans le coaltar, Margot tourna la tête et croisa le regard ambré d'une... femme-lynx ?

Non, d'une Khajiit.

C'était sa colocataire.

- Je crois que je suis coincée, murmura-t-elle d'une voix rauque.

Elle avait beau tirer sur ses couvertures, elle restait emmêlée...

- J'arrive...

Daro'Shamada repoussa ses draps, se redressa et se leva d'un bond souple. Sans bruit, elle vint à la rencontre de Margot et la libéra de sa prison de tissus.

- J'espère que tous tes réveils ne se passeront pas de cette manière...

- Hum...

Un ricanement échappa à la Khajiit alors qu'elle se relevait.

- J'voudrai pas être méchante, mais tu f'rais mieux d'aller te laver. Tu sens aussi bon qu'un porcelet recouvert de boue...

- Charmante comparaison.

- Va t'laver et j'te comparerai plus à un p'tit cochon tout sale.

Margot la fusilla du regard, ce qui eut pour effet de faire rire Daro'Shamada. La jeune femme se leva finalement, attrapa ses affaires dans son armoire et se dirigea vers la salle de bain qu'elle partageait avec sa colocataire.

Après un décrassage en bonne et due forme, les deux étudiantes sortirent de leur chambre pour prendre leur petit-déjeuner. Margot avait cherché Nikka du regard, espérant le trouver à la cantine, mais Maximilien, qu'elles avaient croisé dans la queue, leur avait dit que les huitième années avaient déjà mangé. Ils avaient beau être dans la même école, le croiser allait être plus compliqué que prévu s'ils n'avaient pas les mêmes horaires... Même si l'Elfe le lui avait déjà dit quand ils étaient arrivés, elle ne pensait pas que ça serait à ce point et cela la chagrinait beaucoup. Après tout, il était la première personne qu'elle avait rencontré à son réveil et il était rapidement devenu son pilier dans ce nouveau monde.

Une fois qu'elles eurent fini de manger, elles retournèrent dans leurs quartiers pour prendre les affaires dont elles avaient besoin pour la journée. De quoi écrire, des outils de mathématiques, des portées vierges et un script de théâtre offert par l'administration à tous les primo-entrants. Daro'Shamada avait conseillé à Margot d'emmener les tenues de combat et de danse, au cas où... Après tout, elles ne connaissaient pas encore leur emploi du temps et ne savaient pas quelles matières elles auraient le matin même. Lorsqu'elles furent prêtes, elles sortirent de leur chambre et la Khajiit verrouilla derrière elle. En se retournant, Margot sursauta en croisant le regard obsidienne d'Horte. Elle ne s'attendait pas à le trouver là. Elle avait totalement oublié qu'il lui avait proposé de se rendre ensemble à leurs premiers cours...

Honte à moi...

- Salut.

- Salut Horte. Tu as bien dormi ?

Il se contenta de hocher la tête, observant à la dérobée la femme-lynx qui se débattait avec la serrure de leur chambre.

- Tu as besoin d'aide Daro'Shamada ?

Elle se retourna, sourit piteusement à sa colocataire et s'écarta de la porte. Un sourire amusé étira les lèvres de Margot.

- T'es qui toi ?

- C'est un de mes amis, intervint la jeune femme alors qu'elle fermait la porte. Je l'ai rencontré hier et il m'a proposé qu'on aille ensemble aux cours.

- Je m'appelle Horte, se présenta le jeune homme en la dévisageant, un air indifférent placardé sur son visage.

- T'as que des amis chelous, toi.

- Pourquoi ? Il sent bizarre lui aussi ?

Un silence tomba dans le couloirs. La queue de la Khajiit battait l'air furieusement.

- Heu... non...

- Ne sois pas tout le temps sur tes gardes, lui sourit Margot en lui rendant sa clef, un sourire aux lèvres. Tu risques de passer à côté de belles choses si tu es tout le temps méfiante vis-à-vis de ceux qui t'entourent.

Elle posa sa main sur l'avant-bras de sa colocataire dans un geste bienveillant.

- On y va ? déclara-t-elle alors. Ça serait bête d'arriver en retard pour notre premier jour.

Horte et Daro'Shamada acquiescèrent de concert et tous trois partirent au petit trot, conscients d'avoir déjà trop traînés.

HorswentiaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant