Horswentia

Chapitre 18

Geyra serra les dents. Est-ce que les trois Senches qui manquaient à l'appel avaient été tués par ses sœurs tombées au combat ? Ou étaient-ils planqués en embuscade, prêts à intervenir dès que l'occasion se présenterait ? Mercur grogna et découvrit ses crocs. Ses pattes étaient légèrement repliées et ses muscles bandés, attendant l'effort à venir. Les Senches montés bondirent vers eux, griffes en avant et gueules grandes ouvertes. Les Baandaris crièrent et dégainèrent leurs sabres. Les loups évitèrent les Khajiits et une longue valse mortelle démarra.

Les canidés se battaient contre les félins montés.

Les guerrières affrontaient les mercenaires à la solde des Anges.

Geyra se sentait à sa place : sur le champ de bataille, aux côtés de Mercur et des siennes, à empaler ses ennemis et faire couler leur sang. Elle se sentait puissante. Elle avait l'impression qu'elle pourrait déplacer des montagnes et faire tomber une multitudes de Baandaris. Après ce qui lui sembla être juste une seconde, les Khajiits étaient sans vie, décapités et démembrés. Les Senches soufflaient, leur fourrure souillée par leur sang et celui de leurs défunts cavaliers. Allaient-ils fuir ou continuer de se battre ? Ils avaient l'air de peser le pour et le contre.

Celui qui semblait être le chef de la horde feula et bondit sur les loups. Eux aussi étaient épuisés. Peut-être qu'ils avaient une chance d'en tuer un ou deux avant de prendre leurs jambes à leur cou. Mais ils avaient beau se jeter encore et encore sur les canidés, rien n'y faisait : les Valkyries les repoussaient de leurs lances. Leurs cris de guerre les assourdissaient et les obligeaient parfois à fermer les yeux.

Erreur fatale.

Le premier à avoir fait ça s'était retrouvé égorgé par le loup le plus proche. Ses paupières ne se rouvriraient plus jamais sur ce monde. Désormais méfiants, les deux félins restants luttèrent autant qu'ils le purent pour garder à l'œil chacun de leur ennemi. Geyra profita cet instant pour faire diversion : elle se jeta sur le Senche le plus proche, sa lance prête à s'enfoncer dans les chairs du premier ennemi qui lui barrerait la route. Les deux félins se préparèrent à esquiver l'attaque. Une vive douleur les fit grogner de douleurs. Les autres Valkyries avaient profité que leur attention se soit tournée vers leur compagne d'arme pour les poignarder dans le dos. Les lames de leurs épées étaient enfoncées jusqu'à la garde entre leurs épaules et ressortaient au niveau de leurs larges poitrails. Dans un dernier effort, ils se jetèrent en avant avec l'espoir de tuer au moins l'une des guerrières, pour que leurs morts ne soient pas vaines. Mais ils poussèrent leurs derniers soupirs en l'air et leurs corps s'écrasèrent contre le sol pavé de Peïny.

Les Valkyries observèrent en silence leurs dépouilles. Elles psalmodièrent des paroles en Draconique pour apaiser et accompagner leurs esprits jusque dans l'au-delà. Même s'ils étaient ennemis, elles ne pouvaient s'empêcher de respecter la vie de tout être vivant. Geyra ferma les yeux un instant et se crispa. Des pas étouffés s'éloignaient dans la ruelle la plus proche. Elle talonna Mercur pour qu'il se lance à la poursuite du fuyard. D'une simple pensée, elle lui partageait tout ce qu'elle entendait, devinait. Le loup put ainsi coincer celui qu'ils poursuivaient. Quand la lune éclaira le cul-de-sac dans lequel ils l'avaient acculé, Geyra vit le corps menu et frêle d'un jeune Khajiit. Il leur faisait face, tremblant de peur, une épée démesurément grande par rapport à sa taille. Son pelage roux était hérissé pour paraître plus imposant, mais cela ne servit à rien. Il était chétif et petit.

- N'approchez pas ! feula-t-il des sanglots dans la voix. N'approchez pas ou je vous tue !

Geyra sentit son cœur se comprimer dans sa poitrine.

Ce n'est qu'un enfant...

Sans plus y réfléchir, elle mit pied à terre sous les couinements de Mercur.