1. CONTACT (Partie I)

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Je m'ennuie, dessinai-je, allongée par terre, dans un geste totalement dépourvu d'énergie. Déjà, les lettres disparaissaient sur le sol digital, comme si elles n'avaient jamais existé. Je soupirai longuement et suivis du bout des doigts les contours des octogones imbriqués, presque invisibles à l'œil nu, qui constituaient le « plancher » immaculé de cette pièce. Ce que le temps pouvait être long lorsque je n'avais rien à faire... C'était à mourir d'ennui. Une fois lassée de ce petit jeu qui ne m'amusait plus, je me relevai d'un bond.

- Professeur Kendra ! appelai-je tout-à-coup.

Le mur nord auquel je faisais face grésilla une seconde, avant que la silhouette de ma tutrice ne se détache de la surface blanche.

- Oui, Eireen ?

Le professeur Kendra était une femme d'une trentaine d'années environ, blonde comme les blés. Sa silhouette paraissait plutôt élancée – c'était une déduction peu difficile à émettre, bien que je n'étais en mesure de voir que la partie supérieure de son buste, à peu près au niveau des épaules. Son long visage intelligent était lisse, n'ayant jamais rien trahi d'autre en ma présence qu'une rigoureuse sévérité et une amabilité soigneusement étudiée – ce que je ne pouvais qualifier que de minimum syndical, à vrai dire.

- Qu'y a-t-il ? insista-t-elle devant mon absence de réponse.

- J'aimerais retourner à mon étude, s'il vous plaît, répondis-je avec une pointe d'hésitation dans la voix.

Je savais déjà qu'elle allait refuser. Je pouvais lire dans son regard le découragement lié à ma tendance à toujours m'entêter sans raison.

- Tu as terminé il y a tout juste une heure...

- Seulement ? m'exclamai-je sans écouter la fin de sa phrase.

- Ta séance d'éducation physique n'est programmée que dans une heure, poursuivit-elle sans se laisser déconcerter par mon interruption. Tu devras attendre jusque-là.

- Je ne tiendrai pas encore une heure comme ça ! protestai-je. Pas aujourd'hui.

- Tu n'as pas le choix, me fit-elle remarquer en pinçant les lèvres.

- Avancez-la d'une demi-heure, dans ce cas, la suppliai-je en joignant les mains. Je suis prête à en faire plus qu'il n'est nécessaire, quitte à finir à l'heure prévue.

Ma tutrice soupira en secouant négativement la tête.

- Je sais que tu as toujours été une enfant hyperactive, mais je dois dire que ce côté-là de ta personnalité empire avec les jours. Avec les années, même, devrais-je dire, se corrigea-t-elle. Cela a toujours été.

- Je dois bien compenser, bougonnai-je. Il n'y a rien à faire, ici.

- Je t'en prie, ne recommence pas avec ça, s'agaça-t-elle en se pinçant l'arête du nez. Tout a été dit à ce sujet.

J'en avais plus qu'assez de l'entendre me répéter ce boniment chaque fois que j'essayais de lui poser une question sur ma vie personnelle.

- Justement, non ! m'emportai-je.

- C'est pour ta sécurité que nous t'avons élevée ici, renchérit-elle en durcissant son regard. Tu le sais.

- Je ne sais rien ! aboyai-je.

- Bien, fit-elle en lissant inutilement ses cheveux, qu'elle avait relevés en un chignon impeccable et qui renforçait son air naturellement strict. Je crois qu'il va falloir remettre la séance de sport à demain. Il serait déraisonnable de stimuler ton énergie un peu trop débordante aujourd'hui. Tu seras d'accord avec moi sur ce point, n'est-ce pas ?

PHENOMENE - Parce que le combat ne sera jamais terminéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant