Chapitre VI : Se taire

94 15 33
                                    

Arlette fixait son regard dans le vague sur l'étendue de bitume en dessous d'elle, les mains croisées sur la rambarde. Du balcon où elle avait réalisé, quelques années plus tôt, qu'elle était tombée amoureuse, elle guettait la sortie des locaux, attendant de voir passer quelque chose       - ou plutôt, quelqu'un - .

La porte, en contrebas s'ouvrit, et elle vit enfin passer celui qu'elle attendait. 

Le violoncelliste, qui sortait de son pas souple. Il portait son instrument sur une épaule, et s'éloignait avec sur le visage son habituel air pensif.

- Arlette ? Qu'est-ce que tu fais ? 

La voix de son amie la fit sursauter, et elle se tourna brusquement face à Sabrya, les joues roses.

Son amie regarda par dessus son épaule, suspicieuse, mais au grand soulagement de la jeune fille, le violoncelliste s'était éloigné. 

- C'était rien, bégaya Arlette, gênée. J'avais besoin... d'un peu d'air. 

Sa mine un peu dépité ne convainquit pas Saby, qui plissa les yeux. 

- Tu m'en diras tant... murmura la jeune fille, avant de changer de sujet. Bon, ça n'a pas l'air d'aller fort, en ce moment... Viens, il fait froid, on rentre. 

Elles rentrèrent à l'intérieur pour récupérer leurs affaires, avant de s'engager dans le couloir et Sab' reprit la parole:

- Comme tu es toute triste, en ce moment, déclara-t-elle, il faut ABSOLUMENT que tu ne reste pas toute seule. Soirée pyjama chez moi ? 

Arlette fit une moue pensive, puis acquiesça, un léger sourire sur les lèvres. Elle pouvait toujours compter sur Sabrya. 

- Parfait ! s'exclama celle-ci. Il y aura aussi une copine de Tim, elle est en Terminale et elle joue du clavecin, mais autant te dire qu'avec son instrument, elle ne joue pas dans l'orchestre... Ah, la voilà, justement ! Cassandre ! 

Elle interpella dans le couloir une adolescente brune, aux cheveux bouclés coupés au carré et aux yeux verts, qui marcha vers elles, puis les salua avec un grand sourire.

- Salut, Sabrya ! 

- Je parlais justement de toi à Arlette... vous vous connaissez ? 

- Brièvement, répondit Arlette, adressa un salut discret à la jeune fille. Elle se souvenait l'avoir croisée une fois à une audition de clavier.

- Parfait ! Eh bien, Arlette vient aussi chez moi, vous allez pouvoir faire plus ample connaissance !

Cassandre aquiesça. Son regard avait quelque chose de magnétique, et elle parut sympathique à la jeune fille.

- Parfait, à ce soir alors ! lança Sab', poussant son amie devant elle pour échapper au flot de musiciens qui sortaient des salles.

- Salut ! 

                                                          °*°*°

- On passe chez tes parents récupérer tes affaires et on va direct' chez moi ? demanda Sabrya une fois qu'elles furent dans le métro, s'accrochant à une barre, avant de la retirer vivement, fixant ensuite sa main collante avec dégoût.

- Mhhmm mmh, aquiesça Arlette, perdue dans ses pensées. 

- Arlie, tu me parais bien distraite, en ce moment... Tu sais que tu peux tout me dire, non ?

 Arlette, aux mots de son amie, releva vivement la tête, les yeux ronds, réfléchissant à toute vitesse. 

Et si elle lui disait tout ? Si elle lui révélait toute la vérité, là, maintenant, dans le métro ?

- Dissimilarity -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant