Une semaine.
Cela faisait une semaine qu'Arlette retournait en boucle dans sa tête sa conversation avec Joseph von Silbervolgen. Elle avait seulement laisser échapper quelques mots, mais c'était déjà pour elle un miracle.
Elle savait que jamais, au grand jamais, elle n'aurait dû rentrer un contact avec lui. Son amour désespéré et contre-nature aurait dû s'arrêter à sa contemplation silencieuse et fascinée, à distance, de celui qu'elle aimait.
Elle savait que le voir tous les jours, ignorant tout d'elle, ne la considérant que comme une adolescente timide et mutique, n'allait rendre son amour non-réciproque que plus douloureux.
Maintenant, il savait qu'elle existait, mais était-ce une évolution positive ?
Elle ne pouvait s'empêcher de sentir son coeur s'accélérer à chaque fois qu'elle pensait que pendant presque une semaine et demie, elle allait passer ses journées avec lui.
L'appréhension lui tordait l'estomac. Elle devait déjà passer pour une sombre idiote, vu ses réactions ridicules.
Elle plaqua ses mains sur ses joues qui irradiaient littéralement à ce souvenir honteux.
Et à celui de ses sourires lumineux de charisme, et de ses yeux doux.
Et de la sonorité délicieuse que prenait son prénom dans sa bouche, remodelé par son accent Allemand.
- Arlette, maugréa-t-elle, s'attirant un regard interloqué de la part d'une vieille dame qui passait sur le trottoir, tu es une sombre abrutie.
Elle repensa au moment où il était entré dans la pièce. Tandis que, le dos tourné, il échangeait quelques mots avec son chef de choeur, elle se décomposait lentement. Puis il s'était tourné vers elle, et l'avait regardée pendant un long moment, où elle n'avait pu articuler que quelques bégaiements sans queue ni tête.
Comme il avait dû la trouver stupide !
Elle était morte de peur, tirant nerveusement sur les manches de son chemisier. Une bulle d'excitation entravait sa gorge.
Elle monta dans le bus, et trouva une place assise. Il y avait peu de monde dans les transports en commun à une heure si matinale, pendant les vacances.
L'adolescente serra sa besace en cuir contre elle, contenant ses précieuse partitions.
Elle regarda s'approcher son arrêt, et balaya nerveusement un mèche folle derrière son oreille. Elle se sentait encore plus maladroite que d'ordinaire, hélas.
Son pas était mal assuré, mais elle trouva la force de descendre du bus et marcher jusqu'au grand immeuble dix-neuvième, dont elle poussa la porte avec hésitation.
Les affiches du concert des trente ans de la fondation étaient partout, car oui, il ne fallait pas oublier que le concert était prévu pour bientôt.
Elle s'engagea dans un des couloirs de S.F, le coeur battant à tout rompre.
Studio 124, c'était là, en face d'elle. Sa main tremblait légèrement, mais elle enfonça fermement la poignée: pas question de reculer. Désormais, elle était obligée de faire face à ce qu'elle ressentait, et le combattre, aussi honteux que ce soit.
La jeune musicienne ouvrit lentement, et la porte bien huilée ne fit pas le moindre son. Elle se glissa par l'ouverture, faisant le moins de bruit possible.
Il était de dos, assis au clavecin, son bras droit soutenant sa tête, feuilletant une partition.
L'adolescente aperçut le titre, et ses mots s'échappèrent tout seuls de sa bouche:
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- Dissimilarity -
Romance{ HISTOIRE TERMINÉE } Arlette, jeune passionnée de musique d'à peine dix-sept ans, vit la tête pleine de rêves, et comme dans toutes les histoires d'adolescents, elle est amoureuse ; rien de très étonnant. Si l'on oublie le fait que cet amour soit d...