Le Garçon Perdu 4/5 ✔️

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— Voici pour toi, mon petit

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— Voici pour toi, mon petit. Régale-toi.

À la table d'une vénérable auberge en périphérie de la cité, une femme bien en chair déposa un plat copieux sous le regard affamé d'Amaros. Du ragoût de cerf lentement mijoté avec des herbes nivéales et une délicate sauce rehaussée à la sève de pin. Des tubercules colorés, bouillis, et du pain frais accompagnaient cette savoureuse assiette que l'adolescent s'empressa de dévorer avec appétit. Il s'en brûla la langue tant son empressement était grand. Quel réconfort de sentir son estomac hurlant se remplir et se réchauffer après des jours subsistant de simples graines et de viande froide séchée. Avec ce permafrost, la nature se trouvait dénuée de ses bienfaits nourriciers, et Amaros saisissait combien Alhora avait souffert de cette privation avant l'aide providentielle de Cassandore.

Installés face à lui, Jaya et Vadim l'observaient se restaurer sous l'éclat d'une bougie posée au centre de la table. Il mangeait avec une telle voracité et de si bon cœur que Vadim esquissa un sourire dans son col remonté, contrairement à Jaya qui, méfiante, scrutait les alentours en dissimulant habilement son visage. À cette heure tardive, seuls quelques ivrognes somnolaient sur le comptoir où la vieille tavernière astiquait encore ses chopines. L'ambiance tamisée et le crépitement chaleureux du feu de cheminée insufflaient une douceur réconfortante en ces lieux, refuge bien connu des âmes frigorifiées en provenance des terres gelées sous les pieds d'Alhora. Un gîte accueillant les voyageurs avec une liqueur revigorante et un succulent repas pour réchauffer les cœurs et les entrailles.

Souvent, Jaya était venue manger ici avec Tiordan et Symphorore, après une longue journée de chasse clandestine. Le ragoût de cerf était la spécialité de la maison ; cuits durant des heures, les morceaux de choix fondaient dans la bouche. La sauce au pin ajoutait une touche rafraîchissante et inimitable à ce plat typique qu'elle adorait partager avec ses amis, autrefois. Le souvenir de Symphorore piquant le dernier morceau de viande dans le plat de son frère avant de l'engloutir, attisant la fureur de celui-ci, la ramena un instant dans son adolescence.

Elle n'avait pas hésité à partager son repas avec lui pour qu'il ne manque de rien.

La gérante de l'auberge la connaissait bien à force de la voir sur les traces du frère et de la sœur ; une raison supplémentaire pour se faire d'une discrétion exemplaire. De plus, l'arrivée de Madame Naezia, la folle des jeunes hommes, ajouta un zeste de tension inattendu. Comment la louper avec cette robe rose poudrée et ces cuissardes à talons, en dépit du froid ? Toujours aussi extravagante...

Madame Naezia se dirigea vers le comptoir en glissant sa main dans le dos d'un gaillard à moitié endormi, lui dérobant dans un rire sonore son godet de liqueur sous le nez. Elle était une habituée des lieux, elle riait et parlait fort sans faire fi des qu'en-dira-t-on. Une veuve joyeuse, selon les ragots du village...

Ils n'étaient pas à l'abri de se faire surprendre par tous ces familiers, Jaya en était malheureusement consciente.

Léchant goulûment sa cuillère pour n'y laisser aucun morceau, Amaros enfonça son coude dans la table, de manière à prononcer sa présence.

𝐋𝐄 𝐂𝐑𝐈 𝐃𝐄 𝐋'𝐇𝐈𝐕𝐄𝐑Où les histoires vivent. Découvrez maintenant