CHAPITRE 24 (1)

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Au bout du compte, Warren Eastwood avait quand même réussi à tirer quelque chose de positif de cette mésaventure. Avec toute l'explosion médiatique qui s'était faite autour de l'affaire Allison Mortensen, Amity avait presque doublé son chiffre d'affaire.

Certes, il était devenu une bête de foire ; les gens faisaient mine de vouloir acheter des bouquets de fleurs et fréquentaient la pépinière, juste pour voir cet homme qui avait échappé à la chirurgienne meurtrière. Mais Warren aimait bien voir le bon côté dans chaque chose. Il était en vie, en santé, et il avait des dizaines de femmes à ses pieds désormais. Que pouvait-il espérer de mieux ?

Sans doute qu'elle soit encore là...

Non ! Pas question de penser à elle. Aujourd'hui, Allison faisait partie du passé. Ça faisait un mois qu'elle avait brûlé dans l'incendie de la cathédrale avec son complice. Au bout du compte, cette histoire avait secoué le monde pendant quelques instants, mais tout revenait à l'ordre.

— On est à l'antenne dans dix secondes !

Warren sursauta et revint à la réalité. L'espace d'un instant, il avait oublié cette émission. Aujourd'hui, Amity accueillait une chaîne télé qui souhaitait l'interviewer, précisément sur son métier de fleuriste. Enfin, ça c'est ce qu'on lui avait dit. Mais il n'était pas dupe ; une seule chose intéressait l'audience, c'était son histoire avec Allison. Il le savait, bien entendu.

Au départ, il avait voulu refuser. Toutefois, Kate (avec qui il s'était remis en couple soit dit en passant) avait insisté. Selon elle, ça ferait un beau coup de pub à la pépinière, et permettrait de relancer les ventes. Le sujet allait finir pas dévier sur Allison, certes. Mais la récompense serait largement à supérieure à ce maigre instant de désagrément.

— Alors, lui tonna le journaliste au bout d'une demi-heure de questions-réponses, vous semblez radieux, et vos fleurs se vendent par centaines chaque jour. Amity est devenue la pépinière par excellence de Londres. Difficile de croire que vous avez failli mourir il y a tout juste un mois, non pas à cause de votre insuffisance cardiaque, mais d'une main criminelle...

Warren soupira. Bah voilà, comme s'il ne s'y attendait pas. Le métis inspira profondément en braquant son regard clair sur la caméra. La brise froide ramena à ses narines l'odeur des daphnés parfumées de sa pépinière. Au-dessus de leurs têtes, le faible soleil de ce début d'automne traversait le dôme de verre, faisant rayonner les centaines de fleurs qui poussaient un peu partout.

— Oui, c'est exact, répliqua-t-il en un sourire forcé. J'ai fait l'objet d'une tentative de meurtre, mais j'ai tourné la page aujourd'hui...

— Pensez-vous que cet incident aurait pu être évité ?

— Bah, je pense que les choses arrivent parfois dans la vie sans raisons apparentes. On essaie de s'adapter, d'aller où le vent nous amène. Parfois, la destination n'est pas celle à laquelle on s'attendait. Mais c'est inutile de déblatérer sur le sujet pendant longtemps. Car ce sera toujours comme ça.

«Chacun doit vivre sa vie et accueillir toute surprise comme une aubaine. Chaque difficulté est une opportunité. Chaque jour est une occasion de gagner ou d'apprendre, ainsi va la vie.»

— Mais, monsieur Eastwood...il semblerait que vous connaissiez bien le docteur Mortensen. Vous aviez une relation fusionnelle, selon ce que nous avons entendu dire. Étiez-vous amoureux d'elle ?

***

Allison n'osa même pas cligner des yeux. Elle fixait l'écran sans même pouvoir respirer. De son regard transparaissait une intensité sans précédent. Ça faisait un long mois qu'elle n'avait plus revu Warren. Et...putain, il continuait de lui faire de l'effet.

Elle eut un choc de voir à quel point son patient s'était métamorphosé. Il avait un peu repris du poids et de la masse musculaire pendant sa convalescence. Sous son t-shirt blanc et son jean, il était taillé comme une sculpture grecque. Il était magnifique, aucun autre mot ne pouvait mieux le décrire.

Son sourire...et ce putain de regard qui avait le don de la plonger en apnée. Allison en était hypnotisée. Elle qui croyait avoir oublié Warren, la voilà au point de départ. Rien n'avait changé. Ses sentiments étaient les mêmes...

Mais...ceux du fleuriste, n'avaient-ils également point changé ? C'était la question qu'elle se posait en silence ; et il était sur le point de lever le voile sur ce mystère. Que se passait-il présentement dans son cœur guéri ? Le temps avait-il réussi à altérer ce lien intense qui naguère les unissait ? L'aimait-il toujours ?

LES CHIRURGIENS DE DIEU tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant