CHAPITRE 41 (1)

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— Putain, je n'en ai rien à foutre ! Est-ce que tu m'entends, Easton ?

— Est-ce que tu te rends compte de combien ton langage est vulgaire ?

Iris étouffa un soupir d'agacement en crispant ses doigts autour de son téléphone. Tout ce qu'il lui manquait de calme avant le début de cette conversation s'était au fur et à mesure envolé.

— Maintenant tu me traites de vulgaire ? fulmina-t-elle.

— Je n'ai jamais dit ça.

— Ne me traite plus jamais de salope !

Non, elle n'avait pas oublié. Il lui avait jeté à la figure qu'elle était une salope, juste parce qu'elle faisait le nécessaire pour accomplir son travail. Elle était une chirurgienne de Dieu. Déterminée, prête à tout pour arriver à ses fins. Elle l'assumait totalement, il n'y avait rien de mal à ça.

— Tu l'as embrassé, Iris...

— Et alors ? grogna-t-elle. J'ai bien le droit d'embrasser qui je veux, quand je veux et où je veux ! Ça ne te donne pas pour autant le droit de me traiter de pute. Trêve de discussion. Je suis bien contente que tu daignes enfin prendre mon appel. Mission accomplie.

— Mon frère est-il mort ?

— Presque, répliqua Iris en observant des chiffres binaires défiler sur l'écran.

Elle était dans la salle informatique, vaste et vide, assise devant l'une des machines au fond de la pièce. Elle avait profité du fait que Tim fasse un petit somme dans la chambre de garde, pour s'y introduire grâce à la carte magnétique qu'elle avait piquée au docteur Griffin.

— Alors t'as finalement pu pirater son pacemaker ?

— Est-ce de l'étonnement que je perçois dans ta voix ?

— J'ai toujours su que...tu étais douée...

— Envoie-moi le jet, que je puisse foutre le camp d'ici, dicta l'adolescente en éteignant la machine devant elle. Le pacemaker de ton frère ne fonctionne plus. D'un moment à l'autre, une arythmie arrêtera son cœur. Et moi, j'ai le temps de dégager d'ici avant qu'il ne meure. Comme ça quand ça arrivera, je serai loin de cet hôpital de merde.

— Je suis désolé de...tu n'es pas une salope.

— On en reparlera quand je reviendrai à l'Agence. Alors envoie-moi ce putain de jet. Tu voulais que je tue ton frère, j'ai tué ton frère...

***

— Vous voyez bien que je ne suis pas mort ! Enfin, pourquoi tenez-vous tant à punir Allison pour un crime que visiblement, elle n'a pas commis ? Pourquoi voulez-vous vous rendre coupable d'un meurtre ?

Geffrah ne répondit pas. Une sorte de sombre férocité déformait les traits de son visage. Le bras qui tenait l'arme n'avait pas bougé d'un centimètre. Warren non plus.

Il savait au fond de lui, que Geffrah finirait par tirer. Elle les tuerait, il en était certain. Il ne voulait pas mourir, c'était certain. Mais il n'avait pas peur. Il n'avait plus peur, tout du moins.

Il se souvenait de la première fois où il mettait les pieds au Widburton, le cœur lourd d'appréhension. La mort lui avait déjà pris sa mère et venait de lui arracher son père. Il était arrivé dans cet hôpital, sûr d'y ressortir les pieds devant. Tout ce qui l'intéressait c'était de draguer le plus de femmes possible, de trouver la fleur maitresse de sa serre.

Bien sûr, il ne savait pas qu'il serait la cible d'une tueuse à gages engagée par son propre frère. Risquer la mort par quatre fois lui avait appris à ne plus la craindre.

À un moment, la jeune chirurgienne se dégagea de sa protection et se plaça dans la ligne de mire de Geffrah. L'arme fut instantanément dirigée sur elle, et un sourire se dessina sur ses lèvres.

— Qu'est-ce que tu fais ? s'horrifia Warren.

— Je m'appelle Allison Mortensen, et je suis différente de vous autres chirurgiens. Car pendant toutes vos années de formation, on ne vous a appris qu'une seule chose, sauver des vies. Vous ne travaillez que pour ça, c'est votre raison de vivre. Moi, c'est tout l'inverse. Dès le départ, j'ai été programmée non pas pour sauver des vies, mais pour en ôter...moi, on m'a appris à tuer.

«Oui, vous avez totalement raison. Mais je ne suis pas la seule, vous savez ? Depuis sa création, l'Agence a formé près d'un demi-millier de chirurgiens à l'art du meurtre parfait ; certains, bien plus dangereux que moi. Et je peux vous rassurer, ils se sentent bien dans leurs bottes. Et contrairement à moi, ils ne changeraient de vie pour rien au monde...»

— Je peux le confirmer ! appuya une voix derrière Geffrah.

Elle se retourna et fit face à Margaux, dont la chevelure rousse brillait plus dans le soleil brûlant de l'après-midi.

— Docteur Chabbat ? s'étonna la cheffe.

— Oui, le docteur Chabbat a fait partie de l'Agence...

— ...et j'étais la meilleure ! La précision en vaut la peine.

— Oh mon Dieu...pas vous...

— Ne prenez pas cette tête navrée, voyons. Ma formation à l'Agence a été la meilleure expérience de ma vie. Là-bas, j'avais au moins l'impression de servir à quelque chose. Mon mari et moi, nous étions des véritables Dieu du bistouri, enfin jusqu'à ce qu'il me trahisse ; mais ça, c'est une autre histoire.

— Vous étiez aussi là pour...me tuer ? murmura Warren Eastwood, la voix emplie d'effroi.

— Bien sûr que non ! ricana Margaux. Ne vous donnez pas plus d'importance que vous n'en avez. Je ne suis ici que pour une seule personne...

— Moi, grogna Allison en signe de réponse.

Warren sembla comprendre le comportement qu'elle avait affiché face au docteur Chabbat durant son séjour à l'hôpital. Jamais il n'aurait pu se douter qu'à ce moment, il n'était entouré que de tueurs. En y repensant, cette situation était réellement effrayante.

— Assez parlé, coupa Margaux. Vous la tuez ou je le fais ?

LES CHIRURGIENS DE DIEU tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant