CHAPITRE 11 (2)

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Allison n'était pas comme les autres femmes. Ça, il l'avait senti au premier regard. Il l'avait deviné à sa posture, au son de sa voix, à son air assuré et inébranlable. Elle était comme une fleur rare qu'il voulait dans sa serre personnelle.

Une aconitum napellus. Fleur d'une toxicité fabuleuse, et plante médicinale aussi utilisée contre l'effroi et la peur de la mort. Cette fleur était la représentation parfaite de la chirurgienne, Warren en était persuadé. Et il se devait de le vérifier. Par souci d'avancées scientifiques.

Allison Mortensen.

La première chose qui l'avait attiré chez elle, c'était son regard émeraude. Elle avait des prunelles telles qu'il n'en avait encore jamais vu. Un regard qui savait le mettre sous hypnose, l'envoûter et le faire planer. Cette femme était une sorcière, il n'y avait aucune autre explication. C'était une sorcière avec des boules de cristal à la place des yeux.

Au bout d'un moment, la porte s'ouvrit à nouveau et Allison Mortensen apparut au bout de la pièce. Le vent qui s'engouffrait dans la chambre ébouriffa la chevelure bleu nuit du médecin. Elle rajusta sa frange, laissant entrevoir ses prunelles dilatées.

— Docteur Mortensen, souffla le patient en la regardant approcher de lui.

Elle s'arrêta devant son moniteur et examina ses constantes d'un air inquiet. Warren ne comprit pas directement ce qui se passait. Il prit lui aussi un visage anxieux.

— Il y a un problème ? s'inquiéta-t-il.

— Ta sat est bonne, tension à 11-7, fréquence cardiaque parfaite.

— Parfaite ? s'étonna le métis. Parfaite pourquoi ?

En guise de réponse, elle scella ses lèvres à celle de son patient. Comme si Warren n'attendait que ça, il agrippa la blouse du médecin et approfondit leur baiser. En cet instant, le monde autour d'eux n'existait plus, les douleurs post-op encore moins. Leur baiser semblait avoir catapulté l'univers tout entier.

Et pourtant, même ayant ses lèvres et son âme soudées à celle de Warren Eastwood, Allison ne pouvait s'empêcher de se demander quelle issu il y aurait pour elle, après ce qu'elle était en train de faire. Avait-elle toujours assez de force pour se débarrasser de la cible désignée ?

Car elle ne devait pas l'oublier, c'était la vie de Warren ou la sienne...

***

Dans la vaste salle informatique, seuls les bruits du tapage des touches d'un clavier troublaient le silence fantomatique. Ajouté à cela, le brouhaha à peine perceptible des immenses ventilateurs suspendus au plafond et qui permettaient d'évacuer une partie de la chaleur de cette fin d'été.

Iris aspira dans la paille de sa brique, avant de la reposer près d'elle, sans quitter des yeux l'immense écran de son ordinateur. Pendant un instant, elle joua avec le jus d'orange dans sa bouche, semblant réfléchir à quelque chose. Un projecteur près d'elle renvoyait en 3D l'image d'un cerveau en taille augmentée, qui semblait tournoyer sur lui-même.

— Pourquoi t'es toujours seule ?

Iris sursauta en entendant la voix d'Easton résonner dans la pièce.

— T'en as pas marre de surgir comme ça sans prévenir ?

— Au contraire, sourit-il en ajustant les plis de son gilet de cachemire blanc. Alors ?

— Mieux vaut être seule que mal accompagnée. Et ça vaut aussi pour toi.

Elle termina sa phrase en absorbant une autre gorgée de jus d'orange. La brise des ventilateurs au-dessus d'elle faisait de temps à autres voltiger ses longs cheveux bruns.

— Ce matin, j'ai croisé Nelson Bonaparte. Il revenait de son footing matinal, en pleine forme et ragaillardi comme jamais. Dois-je conclure que tu as échoué ?

Iris ne répondit pas. Elle continuait de tapoter sur son clavier, manipulant à sa guise l'image en 3D devant elle, alors que certains neurones s'illuminaient en rouge.

— Un conseil, sifflota-t-elle, n'utilise jamais le mot « échouer » quand tu t'adresses à moi. Ça peut très rapidement me faire dérailler.

— Tu avais une seule chose à faire...et je croyais pouvoir te faire confiance/

— C'est navrant de voir à quel point tu me sous-estimes. Les choses ne se sont pas vraiment passées comme prévu la nuit dernière, mais je rajuste mon angle d'atta...

Elle eut à peine terminé sa phrase, que déjà Easton s'était jeté sur elle. Il la saisit violemment par les cheveux, mais elle ne broncha pas.

— Écoute-moi, lui cracha-t-il dans l'oreille, j'en ai assez de ton insolence. On a conclu un marché ; et ne croit pas pouvoir t'en tirer en te désistant maintenant.

À son tour, Iris réagit. D'un coup de tête, elle écrasa le nez d'Easton. La douleur fut instantanée et fulgurante. Il lâcha la chevelure de l'adolescente, et elle en profita pour frapper un coup sec et bref dans son coude.

Easton grogna. Il cligna à peine des yeux, que la jeune fille l'avait saisi par-derrière. L'un de ses ongles tranchants et fraîchement limés était placé au niveau de la carotide du métis. Il n'osa plus bouger.

— Il suffit d'une coupure ici, et je te vide de ton sang.

Easton leva les bras en signe de résignation, ignorant la douleur de son coude. La brune soupira et reprit sa place devant son ordinateur en rajustant les mèches de sa chevelure.

— Je croyais que ces cours de krav maga étaient une perte de temps, soupira-t-elle. Au final, je pense que ça me serait bien utile.

— Tu m'as brisé le coude.

— Tu l'as bien cherché. Tu m'as donné une mission, et je l'accomplirai. Je tuerai Nelson, et plus tôt que tu ne le crois.

— Je veux une date.

— La date c'est aujourd'hui même, répliqua Iris Danvier. Nelson Bonaparte mourra aujourd'hui, ce soir. Alors arrête de paniquer, je sais ce que je fais...

LES CHIRURGIENS DE DIEU tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant