CHAPITRE 12 (2)

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— Terry ? s'étonna l'infirmière en se décollant du dos de son fiancé. Qu'est-ce qui se passe ?

— Est-ce que tu peux encaisser ?

— Dis-moi, s'effraya la jeune femme, alors que son fiancé se retournait vers elle. Il avait les yeux rougis et les traits déformés par la colère.

— Je croyais qu'on se disait tout. Je croyais qu'on se disait tout, mais force est de constater que ce n'est pas le cas.

— De quoi est-ce que tu parles ?

— Warren Eastwood. Ce nom te dit quelque chose ?

— Terry...

— Ça devrait pourtant. C'est ton patient, non ?

— Terry, je suis tenue par le secret médical. Je ne peux pas te parler de mes patients.

— Oh ! s'exclama-t-il sur un ton ironique. Et on en parle, de la menace de mort ? À moins que ce ne soit également de l'ordre du secret médical ! Je suis ton fiancé, Emma. Et je suis inspecteur de police, nom de Dieu ! J'aurais vraiment souhaité que tu m'en parles.

— Je suis désolée, miaula Emma, mais ce n'est rien de grave. Et je peux...

— Non, la coupa son fiancé. C'est mon rôle de te protéger ! Tu ne peux pas recevoir une menace, et faire comme si de rien n'était, qu'est-ce qui te prends, à la fin ? Là, je suis trop en colère. Et j'ai peur de dire des choses que je pourrais regretter plus tard. Alors c'est moi qui m'en vais.

Aussitôt dit, aussitôt fait. Il enfila un polo et disparut par la porte. Et là, toute la tristesse qu'Emma avait accumulée depuis la matinée explosa. Elle brisa un bibelot de porcelaine sur le sol avant de se mettre à pleurer...

***

Il était à peu près quatorze heures trente, lorsque Warren sortit de sa torpeur. Malgré la clim, il avait transpiré à cause de la drue chaleur estivale. Il ne se souvenait même pas de quand il s'était endormi. Ça devait être un effet secondaire aux médicaments post-op.

Le soleil dans les cieux avait déjà dépassé le zénith, et les arbres au loin rayonnaient d'une belle couleur émeraude presque surnaturelle. A moins que ce soit lui qui voit soudain tout avec de plus belles teintes.

Lorsque sa vision s'éclaircit, il reconnut son ex petite-amie assise près de lui, les jambes croisées et le nez plongé dans un bouquin. Kate était vêtue d'une courte robe d'été aux imprimés fleuris bleus, et une paire de sandales dorées à ses pieds.

D'habitude, ce genre de spectacle aurait ravi Warren. Même si Kate et lui n'étaient plus ensemble, il continuait de maintenir son emprise autour d'elle, la gardant assez proche de lui comme un satellite en orbite. Il ne fallait pas qu'elle s'éloigne, jamais.

— La belle au bois dormant s'est enfin réveillée, sourit la brune.

— Qu'est-ce que tu fais là ? lui demanda Warren. Tu es ici depuis quand ?

— Ce matin. Mon train est arrivé à sept heures. Manon me charge de te souhaiter un prompt rétablissement. Et maman t'a fait parvenir un panier de ses scones aux bleuets.

Warren émit un faux sourire en guise de remerciements. La famille de Kate l'adorait. Après tout, il s'était appliqué à leur montrer sa meilleure facette. S'attirer l'empathie des gens était son arme la plus efficace. Se montrer proche, complimenter, séduire, puis dominer. C'est comme ça que la vie fonctionnait. C'est comme ça qu'on s'attirait des paniers de scones et des baisers volés.

Il ne put s'empêcher de repenser à Allison. Bon sang, quand elle l'avait embrassé... le monde s'était dérobé sous ses pieds. Son cœur avait tressauté dans sa poitrine avec une violence telle que, sans pacemaker, il aurait assurément fait un arrêt cardiaque. Ce n'était pas la première fois qu'il embrassait une femme ; mais...il l'avait fait craquer ! Elle n'avait pas pu lui résister longtemps.

Quel plaisir fut-ce, de voir ses remparts céder, de voir le désir remplacer la raison, lentement, irrémédiablement. Le jeu de la séduction était si divertissant.

— Tu m'as l'air bien heureux, constata Kate.

— Tu te souviens de ma chirurgienne ? sourit Warren, dont la chambre avait été imprégnée de l'odeur sucrée des scones.

Il raconta en détail à la jeune femme son attirance pour Allison, le petit jeu de séduction entre eux, il lui parla même du baiser. Il ne lui épargna aucun détail. Kate l'écouta sans broncher, même si Warren savait que tout ceci lui faisait du mal. Mais en avait-il cure ? Blesser ses proies était le cadet de ses soucis, surtout Kate. Elle s'en remettrait. Il aimait tout simplement la voir perdre ses moyens devant lui. Elle l'aimait de lui faire autant souffrir.

— Tu n'es pas réellement attiré par elle, soupira la brune au bout d'un moment en fermant son livre. En réalité, elle t'a sauvé la vie alors tu crois juste l'aimer...j'ai déjà rencontré ce cas de figure chez certains de mes clients, et...

— Non, c'est plus que ça, appuya Warren. Quand on s'est embrassé, c'était comme si...c'était comme si je voyais pour la première fois de ma vie, Kate.

— Comme...comme si tu voyais pour la première fois de ta vie ? s'estomaqua la brune, les yeux en boule de loto. Et...et tu fais quoi de nous, de ce qu'on a vécu tous les deux ? Alors ça compte pour du beurre, maintenant ?

Elle soupira de déception et se précipita vers la sortie au pas de course. Warren l'interpella, mais n'obtint aucune réponse. Il sourit d'amusement en la voyant s'éloigner. À la porte, Kate se tamponna avec un docteur châtain mais ne s'arrêta pas pour autant.

Ledit docteur s'avança vers Warren. Ce dernier ne connaissait même pas le nouveau venu, mais ne s'en rendit pas compte. Le fait d'avoir pu à nouveau asseoir sa suprématie sur son ex petite-amie supplantait sur tout le reste. En plus, que dire de l'autre chirurgienne qui devenait raide dingue de lui ?

— Bonjour, tonna le médecin. Je viens juste voir si tout va bien. Ressentez-vous un quelconque malaise ? Une douleur, peut-être ?

— Non, répliqua l'alité, non. Tout va bien, le docteur Mortensen a déjà tout vérifié. Je suis capable de sortir, merci. Un scone ?

— Non, mais c'est gentil.

— Mais...qui êtes-vous ? Je ne me souviens pas de vous avoir déjà croisé...

— C'est vrai, approuva le chirurgien en réajustant les lunettes devant ses yeux. C'est moi qui m'occuperai de signer votre autorisation de sortie. Je me présente : docteur Gérôme Labrume...

LES CHIRURGIENS DE DIEU tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant