CHAPITRE 4 (1)

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Emma sentit un violent courant électrique l'ébranler. Elle se retourna et avança encore plus rapidement. Sa respiration se fit courte, sa foulée doubla. À chacun de ses pas, sa queue de cheval blonde fouettait l'air derrière elle. Elle hasarda un autre regard en arrière. La silhouette se rapprochait.

Le cœur de la jeune femme s'emballa dans sa poitrine. En gémissements se transforma son souffle, sa marche devint une course. Elle dût remarquer que l'inconnu s'était calé sur sa vitesse. Avec effroi, elle réalisa qu'il en avait après elle.

Car au départ, Emma Jones avait voulu supposer qu'il s'agissait uniquement de psychose, de paranoïa. Elle voulut tant croire que c'était son imagination qui lui jouait des tours ; que personne ne lui courrait après ; qu'elle n'était pas en danger. Elle voulut espérer que le présumé assassin de son patient ne s'était pas retourné contre elle.

Mais la vérité, c'était que tout ceci était en train d'arriver pour de vrai.

Alors Emma piqua un sprint. Des cris étouffés s'échappaient de sa gorge au rythme de sa foulée. Elle ne se rendit compte qu'elle était en train de courir à travers la forêt, que lorsque ses poumons commencèrent à se rebeller au même titre que son cœur.

Elle haletait, suffoquait, gémissait de terreur. Son appartement lui semblait désormais à des années-lumière de là. Bientôt, l'homme derrière elle la rattrapa, et Emma réalisa qu'elle allait sûrement mourir là, dans cette allée, à quelques mètres de chez elle.

Elle se sentit plaquée contre un arbre. Son assaillant s'appuya contre elle et pressa la main sur sa bouche. Pendant un instant, elle ne put plus respirer. Elle sentit les mains violentes de l'étranger lui fouiller les poches de son manteau. Il la chapardait ! C'était un vulgaire voleur... quelque part, Emma se sentit soulagée que ce ne soit rien de plus que ça.

Après qu'il se fut emparé de ce qu'il y avait dans le portefeuille de l'infirmière, il fila aussi vite qu'il était arrivé.

Emma continua son chemin, le cœur en vrac, la bourse sûrement vide, mais rassurée d'être encore en vie. Lorsqu'elle arriva chez elle et ferma la porte à double tour, Terrence comprit qu'il était arrivé quelque chose à sa fiancée. C'était un homme de grande taille, aux cheveux noisette attachés en un petit chignon négligé.

Il se précipita vers elle. Emma lui expliqua alors sa mésaventure, sans toutefois mentionner qu'elle s'était attendue à bien pire. Terrence insista pour qu'ils aillent au poste de police ; après tout, il y travaillait en tant qu'inspecteur. Néanmoins, Emma ne se sentait plus la force de sortir. Ce n'était rien de grave, songea-t-elle.

Elle déchanta pourtant très vite, lorsque plus tard dans la soirée, elle aperçut un morceau de papier dépasser de son portefeuille. Dessus, il y était griffonné le message suivant :

Eloignez-vous du patient Warren Eastwood. Vous n'aimeriez pas être la prochaine sur la liste...

***

Allison rentra dans son nouvel appartement toute exténuée. Elle se débarrassa de ses baskets et balança son sac sur le vaste canapé d'angle gris pastel. Lorsque son regard s'attarda à nouveau sur les peintures de femmes en noir qui semblaient plus lugubres dans l'unique lueur des abat-jours, elle réalisa à quel point Yan avait exagéré ; cet appart était beaucoup trop grand et luxueux pour une mission de trois jours !

Elle observa les têtes d'animaux plantées au-dessus de la cheminée marbrée du salon, un cerf, un ours et un loup. Dehors, les derniers corbeaux continuaient de grailler avec violence.

La jeune femme s'approcha de l'immense baie vitrée du salon. Elle se débarrassa de ses vêtements et se retrouva bientôt en petite tenue. Sa peau d'albâtre semblait plus pâle dans la morte lumière vespérale. La nuit était déjà bien tombée sur Londres.

De petits pointillés orangés et blancs illuminaient la plupart des bâtisses et immeubles, comme des lucioles qui brillaient dans le noir. Les cieux étaient sombres. Allison fit coulisser la baie vitrée et déboucha sur l'immense balcon paré d'un parasol et de deux mini sofas azurés, autour d'une table basse en marbre noir.

La demoiselle s'accrocha à la rambarde bronzée et rejeta la tête en arrière, profitant du doux vent crépusculaire qui caressait sa peau ivoire et sa chevelure bleu foncé. Les corbeaux s'envolèrent un instant autour d'elle, avant de se résigner à partir. Allison inspira l'odeur nauséabonde des fientes sèches tout autour d'elle, mêlées aux plumes noires que certains oiseaux avaient perdu.

C'est alors qu'elle entendit quelqu'un s'éclaircir la gorge derrière elle. Ses cheveux se dressèrent sur sa tête en même temps qu'elle se retournait en rugissant de frayeur.

LES CHIRURGIENS DE DIEU tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant