Chp 11 - Rika : retour à la Cour de Nuit (4)

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Rizhen, le beau blond aux pectoraux parfaits, vint se planter devant nous.

— Il est temps de retourner au palais, gentes dames, dit-il en tendant sa longue main aux griffes bien limées.

Visiblement, Tamyan Niśven trouvait que nous avions suffisamment trainé sans surveillance.

Faith la prit avec un naturel qui m'étonna. Selon toute vraisemblance, elle était habituée à être escortée par ce mâle étonnamment prévenant envers des esclaves. Je les suivis un peu retrait, prenant le temps d'observer le fessier musclé et parfaitement moulé de ce Rizhen. D'après la relation qu'il avait avec Tamyan, et surtout, la marque discrète qu'il arborait dans le cou, à moitié cachée par ses boucles blondes, Rizhen lui appartenait. C'était sans doute son « frère de sang »... comme me l'avait expliqué Lathelennil, les mâles liaient parfois des relations exclusives avec d'autres mâles. Ils se soutenaient mutuellement pendant les fièvres – couchaient ensemble, pour faire court – et se partageaient les femelles qu'ils obtenaient par la suite. L'un devait protéger l'autre au prix de sa vie, et vice-versa. Bien entendu, en tant que prince, Tamyan devait avoir l'ascendant sur Rizhen : on ne badine pas avec la hiérarchie chez les ældiens. Mais est-ce que le ténébreux Niśven invitait parfois le beau blond musclé à la bouche pulpeuse les rejoindre dans son lit... ? Encore un mystère que j'aurais aimé résoudre, mais ce serait pour plus tard. Nous étions déjà de retour dans le grand hall.

Tamyan et Lathelennil nous attendaient, bras croisés et air sombre pour le premier, poing sur les hanches et petit sourire satisfait pour le second. Deux personnalités différentes, spectres d'un même faisceau de noirceur... Lathé glissa sa main sur ma taille à peine fus-je arrivée, mais Tamyan, plus réservé se contenta d'attendre que Faith vienne se positionner à côté de lui, où il la couva d'un regard à la fois froid et jaloux. Un mélange contradictoire de glace et de feu, celui-là... je me demandais ce que ça donnait au lit. Avec ce Rizhen, notamment.

Je coulai un petit regard au blond, tout ça pour m'apercevoir qu'il me regardait.

Merde. Je suis grillée.

— Prince Tamyan, demandai-je alors, avez-vous vu un cair ældien lors de votre assaut contre les Astra Leo qui encerclaient notre vaisseau de croisière ?

— Non, répondit Tamyan de sa voix caverneuse. L'Elbereth n'avait pas été vue une seule fois sur le champ de bataille : Silivren devait se trouver ailleurs avant l'attaque.

Ailleurs. Oui, mais où ?

Je passai le reste de la soirée à gamberger là-dessus, indifférente au banquet luxueux – les esclaves favorites avaient été autorisées à dîner à table sur les genoux de leur maître, ce dont Lathé profita allégrément - , aux danses raffinées et autres arts délicats dont on nous régala, y compris la présentation des trophées, des têtes coupées de généraux ennemis et du défilé de prises de guerre, ce qui me fit lâchement détourner le regard. Ces hommes paniqués qu'on présentait à des créatures anthropophages et éminement cruelles qui les regardaient avec des yeux luisant de convoitise avaient tenté de me tuer, moi et mes enfants, et leur comparses avaient très vraisemblablement arrêté mon mari et son beau-père. Je n'avais aucune pitié pour eux... mais je pouvais jouer là-dessus.

Suivant l'étiquette, on pouvait s'adresser au roi, à condition de lui offrir un cadeau. Je saisis donc un cœur cru qu'un sluagh venait de poser devant Lathelennil, tirant l'assiette dorée devant moi. Lathé me jeta un regard contrarié, qui se transforma en sourire de contentement lorsqu'il me vit tirer la dague coincée dans mon chignon pour m'entailler le poignet. Une dizaines d'yeux luisant se tournèrent immédiatement vers moi, mais je laissai mon sang couler, imperturbable, sur le cœur frais.

LA CHAIR ET LE METAL T2 (Ne m'oublie pas)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant