Un jeu dangereux

La vie continue

Le rendez-vous chez le notaire s'était clôturé par la signature de tous les papiers faisant de Marquand le propriétaire de la villa nommée Tino. Les membres de la famille s'étaient maintenant séparés, chacun retrouvant son chez soi.

La tristesse et la morosité planaient au dessus des têtes, en particulier de celle de Marquand. Le commandant avait appelé son médecin traitant, dès le lendemain de son retour de Lyon, et lui avait expliqué la situation. Celui-ci lui avait fourni un arrêt maladie, valable pour deux semaines, et renouvelable autant de temps qu'il le faudrait.

Il avait passé les premiers jours affalé dans le canapé à pleurer sa mère et à manger tout ce qui lui tombait sous la main. Il semblait replié sur lui même, ne s'occupant même pas des enfants, qui essayaient d'attirer son attention et de le faire rire par tous les moyens. Cette situation avait étonné tout le monde et personne ne trouvait de solution pour la débloquer.

Nous étions maintenant vendredi et cela faisait une semaine que Joséphine les avait quittée. Alice était avec Ada, devant l'école primaire. Elles attendaient toutes les deux Paul. Lorsque celui-ci arriva, ils passèrent à la boulangerie pour prendre quelques gourmandises pour le repas du soir.

- J'espère que papa va être content qu'on lui ai pris un tiramisu, dit Ada, qui, comme tout le monde, avait du mal à accepter le comportement de son père et à ne pas en souffrir.

- Même s'il est triste, c'est sûr qu'il sera content. C'est son dessert préféré, expliqua Paul.

Alice les écoutait parler et l'idée qui lui trottait dans la tête ne lui plaisait pas vraiment. Pourtant, sans même qu'elle ne s'en rende compte, elle commença à leur exposer son plan.

- J'ai peut être une idée pour secouer votre père. Je ne suis pas sûre que ce soit très intelligent de lui faire ça, mais il nous pardonnera.

Les deux enfants écoutait maintenant attentivement leur mère, une pointe d'appréhension flottant dans leurs regards.

- On pourrait faire croire à votre père que j'ai des contractions...

- C'est quoi des contractions ? demanda Paul.

- Ce sont des douleurs dans le ventre qui veulent dire que le bébé arrive... expliqua le plus simplement possible Alice.

- Mais on peut pas faire ça, papa il nous croira jamais, le bébé il doit arriver que pendant les vacances d'été et c'est loin. Et puis pourquoi on ferait ça ? demanda Paul, qui était définitivement trop petit pour comprendre la situation.

Ada prit le relai, tentant d'expliquer avec ses mots à elle, la situation à son petit frère.

- Si on fait croire à papa que le bébé arrive, il va s'inquiéter pour maman et pour le bébé. Du coup, il va arrêter de penser que mamie est morte et il va s'occuper de nouveau de nous ! C'est une bonne idée, je suis sûre que ça va marcher ! s'exclama la jeune fille.

- Bon alors est-ce qu'on fait ça ? demanda Alice.

- Moi je sais pas, je comprends rien ! répondit Paul.

- Je crois qu'il faut essayer même si je suis presque sûre que papa va se fâcher, annonça Ada.

- Bien, alors on le fait, dit Alice, déterminée. Paul, tout ce que l'on vient de dire est notre petit secret. On va rentrer à la maison et tu vas faire comme si tu avais peur parce que j'ai mal au ventre, d'accord ? Et toi Ada, tu peux en rajouter une couche et demander si je ne veux pas appeler le docteur, ok ?

- Ok, on fait comme ça.

Les trois menteurs se tapèrent dans la main avant de monter à l'appartement. À peine la porte franchie, Paul commença à pleurer. Quel comédien !! pensa Alice, amusée.