Chapitre 4 - 3

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« Et Alvaro construira le siège régional ! » s'emporte Flore.

En face, absence de réponse. Mon mari reste silencieux pour dissimuler sa gêne. Il sourit poliment et bois un quart de sa bière. Le sujet est délicat puisqu'il vient de signer avec la plus grande institution financière italienne pour un projet équivalent. Sa renommée internationale l'a évidemment suivi ici. On sait qu'Alvaro Preston – puisqu'il a tenu à prendre mon nom : un seul nom sur la plaque d'architecte coûte moins cher, face aux longues listes espagnoles – est l'expert hors catégorie des constructions parfaitement intégrées dans les environnements historiques.

Une belle opportunité se présente cependant, puisqu'Hugo ne rebondit pas sur l'humour de Flore. Non, le banquier (même s'il ne l'est pas vraiment) laisse traîner son regard au loin. En prenant le soin de regarder de plus près l'horizon fixé, je découvre un groupe de romains, quatre femmes et deux hommes, de notre âge environ. Le premier est en couple avec une des femmes. Le second semble plus détaché. C'est lui qui intéresse Hugo.

Je m'approche d'Alvaro et lui chuchote à l'oreille ma découverte. Je préfère confirmer avec lui mes impressions avant de mettre Hugo devant le fait accompli. Il acquiesce.

« Qu'attends-tu pour aller lui parler ? Je t'ai connu plus téméraire ! »

Ma phrase, un peu sèche, un peu coupante, fait sursauter Hugo qui manque de renverser sur lui quelques millilitres de bière blanche. Il me regarde, renvoie son regard vers le bel italien, se met à sourire bêtement. J'avais raison.

« Rien ne me dit qu'il est gay.

— Rien ne t'assure qu'il est hétéro ».

Alvaro ne lui a pas laissé le temps de finir. J'exulte.

« Tu as bon goût, tu ne devrais pas laisser filer l'opportunité » renchéris-je.

Hugo hausse les épaules et reprend son burger en mains. Bien décidé à ne pas laisser pourrir la situation ainsi, j'attrape une serviette, écris son numéro dessus et me lève. La table est à une dizaine de mètres. Si jamais Hugo refusait catégoriquement que je m'investisse autant, il pourra m'arrêter. Il n'en est rien.

J'approche du groupe, m'arrête près du concerné et salue la tablée. Je tente une première phrase en anglais et constate qu'un seul comprend mes propos. Parfait, je peux donc continuer. Je m'accroupis à côté de lui et avant de lui remettre la serviette, lui explique :

« Parfois, certains peuvent paraître assurés. Pourtant, quand il s'agit d'aller saluer un inconnu qui leur plaît, impossible. Quand je partirai à ma table, tu jetteras un œil, discret ou non, au jeune homme en face de moi. Pas à côté, lui c'est mon mari. En face. C'est lui qui t'a repéré. Si tu as envie d'échanger avec lui, voici son numéro. Et en-dessous tu as son Instagram, si tu préfères éviter d'échanger trop rapidement des informations personnelles. Tu en sauras plus sur lui ainsi ».

Je suis revenu avec une seconde serviette.

Pour Les Medicis (B&B)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant