Chapitre 7 - 2

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Une fois mon homme rassasié de sa dose d''ocytocine après nos étreintes, je peux m'installer et décrocher mon téléphone. Le cabinet du ministère attendait mon feu vert pour enclencher la conversation avec Hélène. Nous nous saluons rapidement, je sais son temps compté, et abordons les sujets prévus.

Tandis que nous passons en revue les financements potentiels et que je ressens l'enthousiasme de ses conseillers à l'idée de voir augmenter la part du mécénat privé dans le financement de la Villa, Hélène se fait de plus en plus discrète. Jusqu'au moment fatidique auquel elle demande à ses conseillers de raccrocher.

« Eliot, de vous à moi, que pensez-vous de Rome ?

— Une ville charmante, bien qu'un peu surprenante parfois.

— Tout se passe bien avec votre époux ?

— Pourquoi cette question ?

— Nous nous connaissons bien tous les deux, Eliot. Je ne suis pas sans ignorer les sacrifices qu'il a pu faire.

— Vous avez raison, je les ai suffisamment soulignés par ailleurs. Je pense qu'il a trouvé ici une nouvelle source d'inspiration. Même si les rencontres avec de jeunes artistes incapables de créer autrement que sous l'emprise de drogues dures l'a assurément perturbé.

— Rassurez-moi, ce ne sont pas des pensionnaires ?

— Bien sûr que non. Nous étions à un gala hier soir, rassemblant d'éminentes personnalités locales, dont la directrice de l'Opéra dont je vous parlais tout à l'heure, mais aussi des artistes plus marginaux, sans que je ne cherche à être péjoratif bien sûr. Certains d'entre eux se sont montrés quelque peu indiscrets et avenants. Ce qui ne manque pas de déplaire à Alvaro qui, sur certains sujets, se fait délicat et inhibé.

— Et bien n'y allez plus !

— Pardon ?

— Ces événements sont des nids à vipères, croyez-moi.

— Venant d'une ministre, je ne peux que vous croire.

— Vous savez, Eliot. Vous venez d'un univers raffiné, d'une institution honorable qui, malgré les désaccords qu'elle pouvait exprimer à votre égard, ne vous abandonnera jamais. J'ai déjà été contactée pour savoir si, à la fin de votre direction, vous comptiez revenir à la Cour. C'est un univers feutré, protégé, bienveillant.

— Alors que l'Art et la Culture seraient ...

— Des abysses. Dans lesquels règnent les plus terribles animaux. Sauvages, non civilisés. Convaincus que, parce qu'ils créent, parce qu'ils ont une lucidité, parce qu'ils parviennent à voir mieux que les autres le monde, de leur propre avis, ils peuvent tout se permettre.

— Je crains ne pas comprendre votre message.

— Protégez-vous. Protégez Alvaro.

— Sauf mon respect, Hélène, je n'ai pas candidaté à la direction de la Villa Medicis pour rester enfermé dans mon joyau sur les hauteurs de Rome ».

Nous nous sommes quittés ainsi. En bons termes, bien sûr. Mais avec une certitude désormais : je me dois d'endosser avec davantage de fermeté les responsabilités qui me sont confiées ici.

Pour Les Medicis (B&B)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant