« Avant que tu ne te décides à renverser tout ce qui se trouve sur cette table pour m'y faire l'amour, j'aimerais que tu me racontes ton rendez-vous ».
Je jette un œil à mon reflet dans la fenêtre et constate en effet que je suis particulièrement rouge, non pas à cause du soleil qui commence à réchauffer l'air mais bien en raison de la boule libidineuse qui se forme dans mon esprit.
« D'un ennui... Tu n'as pas idée !
— Vraiment ?
— Il m'a déçu.
— Laisse-moi deviner. Nous n'avons pas d'argent mais nous serions comblés de travailler avec vous.
— Je sais que tu ne manques pas d'expérience de ce côté-là.
— Être un jeune architecte laisse toujours penser à certains que je suis en mal de reconnaissance et qu'un projet gratuit pourrait me faire de la publicité ».
Ce serait mal connaître Alvaro qui n'a besoin de personne pour être reconnu, tout d'abord, et qui ne supporte pas que son travail ne soit pas reconnu à sa juste valeur. De ce point de vue, la France me semble mieux lotie que d'autres pays. Du moins en théorie, je le reconnais...
« Donc ? Quel résultat ?
— Rien. Nous nous sommes quittés en bons termes, j'imagine que nous serons invités régulièrement à des événements.
— Nous ?
— Tu as évidemment été au cœur des discussions.
— Avec un Italien ?
— Et alors ?
— Tu n'as pas peur que cela te porte préjudice ?
— Nous sommes dans le milieu culturel. S'ils ont un problème avec l'homosexualité, qu'ils aillent le régler.
— Tu n'as pas remarqué de changement de ton avant et après avoir abordé le sujet ?
— Même si c'était le cas, ce serait le cadet de mes soucis, compris ?
— Je sais, je connais ton discours. Ce n'est pas mon sujet. Mais...
— Il n'y a pas de mais, Alvaro. Je suis marié avec toi, et tout cela relève de ma vie privée. Certes, du fait de ta profession et de mes fonctions ici, nous sommes amenés à en montrer plus que nous ne le voudrions. Mais quelles que soient les conséquences sur des partenariats ou des financements, je refuserai toujours de nier ou de dissimuler que je suis avec toi ».
Je te vois ne pas parvenir à réprimer un sourire gêné. Je prends donc ta main, sur la table. Oui, je ne les oublie pas, tous les regards surpris, y compris ceux du serveur. Mon regard glacial et vif à son encontre a vite dissipé toute potentielle remarque. Il n'aura pas de pourboire. Même s'il n'a rien dit.
Avec poigne, ai-je dit récemment. Hors de question que je laisse qui que ce soit gâcher mon arrivée à Rome avec toi.
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Pour Les Medicis (B&B)
Ficção GeralEliot Preston vient d'être nommé directeur de la prestigieuse Villa Medicis. Son compagnon, Alvaro, plus discret, moins explicite que lui, n'en reste pas moins son plus fidèle allié et soutien. Ensemble, ils débutent une nouvelle vie romaine, après...