Toujours est-il que nos retrouvailles d'hier soir nous ont fait du bien. J'ai retrouvé l'ambiance romaine, quand Hugo n'a pas osé parler au jeune homme situé quelques tablées non loin de nous, ou encore les discutions à la fois délirantes et rigoureuses de Flore au sujet de l'avenir financier de leurs emplois.
Il faut dire que les nouvelles ne sont pas des plus réjouissantes pour nos amis, même si j'espère sincèrement que tout se résoudra au plus tôt. Le dîner a d'ailleurs été, parfois, l'occasion pour nous de leur prodiguer quelques petits conseils que nous jugions importants. Bien sûr, ni Alvaro ni moi ne sommes des spécialistes de la finance, mais quand il s'agit de comprendre la situation des autres, nous avons certaines facilités.
« Le plus difficile reste notre séparation, souligne Flore.
— Je n'osais guère l'aborder, je te l'avoue, précisai-je, parfaitement informé de la rupture plutôt violente qu'elle doit actuellement digérer tant bien que mal.
— Je pense qu'il a été merveilleux jusqu'au bout, mais...
— C'est difficile de découvrir que les sentiments ont disparu sans qu'il n'ait rencontré quelqu'un d'autre, ajoute Hugo qui soutient sa plus proche amie comme si sa vie en dépendait.
— Il a eu le courage de me le dire en face au lieu de tenter de devenir exécrable ou bien tout simplement de me tromper. Il aurait pu le faire, et la facilité l'aurait emporté.
— Mais ce n'est pas un salaud » expire Alvaro.
Les sentiments se sont petit à petit éteints, tout doucement. Une petite flamme que personne n'a soufflé, mais qui a perdu en intensité. Elle n'a pas été malmenée. Elle n'a pas vacillé. Peut-être était-elle simplement en manque d'oxygène. Elle s'est étouffée toute seule, sans douleur ni coup de tonnerre.
Personne ne peut s'en vouloir et son compagnon a fait preuve d'une grande intelligence. Inutile de (se) mentir. Il connait Flore mieux que personne, il savait qu'elle pourrait se relever après une telle nouvelle. Reste à savoir comment être présent le temps que le premier genou ne parvienne à se redresser.
Nous avons rapidement changé de sujet pour ne pas apitoyer celle qui faisait tout pour faire bonne figure depuis que nous sommes là. Je ne pense pas qu'elle se lancera à corps perdu dans une nouvelle conquête ou dans une relation. Je lui souhaite simplement que ce temps sera porteur pour elle.
Bisexuelle, on pourrait penser qu'elle aurait alors deux fois plus de chances de faire des rencontres. Hélas, la réalité est bien plus sombre, ne serait-ce que parce qu'elle assume pleinement qui elle est et que les membres de la société, intéressés ou non par elle, ne manquent pas de le souligner.
Je compte l'inviter bientôt à la Villa, le jour où son entreprise voudra bien la laisser respirer. Peut-être sans Hugo, pour qu'elle puisse livrer tout ce qu'elle a en elle sans que son collègue et néanmoins meilleur ami n'ait à entendre. Souvent, bien des choses sont cachées aux plus proches de nos relations.
VOUS LISEZ
Pour Les Medicis (B&B)
General FictionEliot Preston vient d'être nommé directeur de la prestigieuse Villa Medicis. Son compagnon, Alvaro, plus discret, moins explicite que lui, n'en reste pas moins son plus fidèle allié et soutien. Ensemble, ils débutent une nouvelle vie romaine, après...