Pour Les Medicis (B&B)

Chapitre 12 - 3

La chaleur commence à disparaître pour laisser place à la nuit. Le long du Tibre, Alvaro m'amène sur les quais. Durant l'été, ils sont investis par des restaurants et des bars. Une scène ouverte est installée dans l'un d'entre eux. La voix d'une chanteuse nous attire, alors que le magnifique pont en pierre lui sert d'arrière-plan.

Life is a mystery

Everyone must stand alone

I hear you call my name

And it feels like home

Je jette un oeil à Alvaro qui ne quitte pas des yeux la chanteuse à la voix cassée, au grain presque abîmé.

When you call my name it's like a little prayer

I'm down on my knees, I wanna take you there

In the midnight hour I can feel your power

Just like a prayer, you know I'll take you there

Je souris, évidemment, en écoutant les paroles qui sont bien plus douces et compréhensibles ainsi chantées, en acoustique.

I hear your voice

It's like an angel sighing

I have no choice, I hear your voice

Feels like flying

I close my eyes

Oh God, I think I'm falling

Out of the sky, I close my eyes

Heaven help me

Bien sûr, je connais la signification de cette chanson. Je sais combien elle a été décriée, ici-même, au Vatican. Pour moi, elle prend une dimension spéciale. Comme si l'ange était soudainement espagnol. Comme si la critique religieuse de ce que nous sommes n'avait plus aucune valeur.

Comme s'il entendait tout ce que je pense. Ses yeux bleus ont quitté l'artiste pour se perdre vers moi. Ils cherchent à déceler le moindre signe qui lui permettrait de vérifier que j'apprécie le moment. Telle est son obsession, mon plaisir, ma sérénité. Nul besoin de s'en assurer. Quand il est là, c'est un état de fait.

Malheureusement, la créatrice de rêves nous abandonne pour se rafraîchir. Nous quittons donc les quais après avoir profité de ses talents, d'un repas, de quelques verres. Le retour à la Villa n'en est que plus doux. Pour un temps, enfin, j'ai négligé ce qui pouvait m'inquiéter.