Chapitre 15 - 3

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Nous raccrochons et je lance le premier virement. Je suis juste. Tout travail mérite salaire. Pendant notre appel, j'ai reçu quelques messages d'Hugo qui s'inquiète visiblement pour moi. Je réponds en lui demandant des nouvelles du jeune homme dont j'avais récupéré le numéro.

Évidemment, je suis renvoyé sur les roses par mon ami qui s'interroge plutôt sur mon état. Sûrement alerté par Alvaro qui a compris que je ne laisserai rien tomber. Oh non, je ne laisserai rien tomber. Le temps où j'étais indifférent à tout cela m'a bien trop coûté. Et aurait pu me coûter encore davantage. C'est terminé.

J'ai de bonnes raisons de croire que rien n'est dû au hasard. Que ce n'est pas simplement un journaliste de passage qui, photographiant la soirée, s'est réjouit de nous capturer ainsi. Sinon pourquoi choisir des clichés aussi biaisés. Non pas du point de vue de l'angle qui nous incrimine, mais plutôt de la difficulté à nous reconnaître au premier abord.

C'est un des pensionnaires qui me sort de mes pensées :

« Vous savez, on s'en fout nous. Même si c'était vrai, au moins... Vous ne seriez pas si éloignés de nos pratiques ».

Je souris face à la spontanéité de cette confession. Si je désapprouve l'usage de la drogue, je n'ai rien à dire sur des sujets plus intimes. Mais je ne peux m'empêcher d'honorer la promesse que je m'étais faite :

« Dans ces moments-là, vous évitez les drogues et vous protégez, rassurez-moi.

— L'immense majorité d'entre nous, oui.

— Et tout cela n'a jamais lieu dans nos locaux.

— Jamais.

— Alors je n'ai rien à dire. Si ce n'est à veiller que vous alliez tous bien.

— Pour l'instant, c'est sur vous qu'il faut veiller, j'ai l'impression ».

Je lui serre la main avec insistance pour éviter de répondre. Je sais qu'il comprend que, derrière ce silence, se cache un remerciement sincère. Il s'assoit sur un des bancs tandis que je continue à cheminer dans les jardins. J'arrive donc assez naturellement au plus proche de la terrasse.

La vue n'est plus la même avec les lunettes que je porte. Celles mentales, complètement obscurcies par le coup bas que cette ville vient de me faire. Même si j'ai tendance à croire que la cité romaine n'y est pour rien. Elle n'est qu'un instrument au service d'autres viles intentions. Bien françaises.

Dans ma tête ne résonnent plus que quelques mots. Malgré la présence que je ressens derrière moi. Les mains posées sur la rambarde. L'horizon et moi nous défions. Le soleil me brûle. Mais rien n'y fait. Rien ne fait évoluer mon état d'esprit. Rien n'y parviendra. Les quatre mots sont là, ancrés.

How to spell revenge.

Pour Les Medicis (B&B)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant