Chapitre 5 - 2

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Paré de mes chevalières – j'ai opté pour un couple égyptien, mêlant la félinité du tigre à la solennité du scarabée –, je chausse mes derbies bleues et quitte l'hôtel. Je n'y reviendrai désormais plus et, ce soir, nous dormirons dans la Villa. Je grimpe les marches bien moins désagréables que vendredi, puisque la chaleur n'a pas encore gagné la capitale romaine.

De nouveau, je retrouve les mêmes militaires que la semaine dernière. Je les salue mais la discussion s'engage :

« On a appris que vous vous installiez ce soir, c'est bien ça ?

— Tout à fait, vous êtes bien renseignés. Nos affaires sont en cours de transfert et vous croiserez mon mari rapidement.

— Est-il possible de voir une photo ? Nous n'avons pas reçu la version mise à jour des autorisations d'entrée et de sortie. Vous n'aurez vos badges que dans quelques jours ».

Je cherche dans mon portefeuille une photo de lui qui soit présentable. La première qui sort le dévoile torse nu. Ses airs de mafieux ne me semblent pas appropriés. Je choisis donc la deuxième, celle qui le montre, à mes yeux, sous son meilleur jour. Je suis tombé amoureux une seconde fois à ce moment-là. Le profil et le reflet. La chevalière qu'il porte également. Tout suscite un crépitant désir en lui.

Et il ose s'inquiéter que je sois observé ou envié. C'est plutôt moi qui devrai surveiller les potentielles prétendantes. Je sais d'expérience qu'Alvaro attire davantage les femmes que les hommes, sans doute parce qu'il est difficile de déceler en lui sa nature. Il ne regarde jamais personne dans la rue, il n'est pas affectueux, tactile ou expressif avec quiconque. Comment savoir s'il préfère les femmes ou les hommes, voire les deux, dans ces conditions.

Je tends la photo au militaire qui me demande la permission d'à son tour la photographier sur son téléphone. Elle apparaît en suivant sur l'écran d'ordinateur situé dans leur véhicule, associé aussitôt au nom d'Alvaro Preston. Le commentaire à côté attire mon attention : « époux du Directeur ». Je n'utilise jamais ce mot.

« Parfait ! Merci beaucoup. Je m'en serais voulu si nous avions dû vous déranger pour vérifier son identité.

— Sa carte d'identité aurait été un bon indicateur, je pense. Mais vous avez raison.

— Désormais, puisque vous résiderez ici, quelques hommes seront toujours déployés. La collaboration entre les forces de l'ordre françaises et italiennes est excellente et nous assurons donc un roulement permanent.

— C'est parfait, je vous remercie.

— Aussi, à terme, vous n'entrerez et sortirez plus par cette porte, nous vous indiquerons les passages plus appropriés.

— Je le note. Vous me tiendrez informé.

— Tout à fait Monsieur le Directeur.

— Eliot suffira, vraiment. Ou Monsieur Preston si vous êtes mal à l'aise.

— Je vais m'en tenir à Monsieur Preston alors ».

Je comprends le malaise que cela peut susciter, mais point de révérence inutile.

Pour Les Medicis (B&B)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant