Nous nous installons au deuxième étage du restaurant, sur une terrasse où plus un seul client n'ose désormais s'aventurer. Le vent tourbillonne sur la place et vient enfin apporter un léger filet de fraîcheur à nos visages. En quelques secondes, deux verres de vin blanc se retrouvent sur la table, comme si Alvaro avait commandé en avance. Ce qu'il avait fait.
« Tu me disais donc que tu avais renouvelé tes vœux.
— Non, toi.
— Je t'écoute, demande-t-il curieux tout en sachant parfaitement quelles allusions je compte mener.
— Tu as quitté la vie plus paisible à laquelle tu aspirais pour me rejoindre.
— Pour te suivre, Eliot. Je ne t'aurais jamais laissé partir. Ce n'est pas possible.
— Pour me suivre, en effet. Alors que je connais tes inspirations. J'ai conscience que ta capacité à imaginer est stimulée au loin des grandes villes.
— Je te le répète encore une fois, comment ne pas être inspiré par Rome ? Ne te souviens-tu donc pas de nos dernières vacances ?
— Surtout des nuits ».
Avalant plusieurs gorgées du vin, il tente tant bien que mal de ne pas éclater de rire, tant notre état, alternativement, n'était en rien un exemple à suivre.
« Toujours est-il que tu as vendu ton cabinet d'architecture. Je croyais que tu vivrais entre Rome et Paris par exemple.
— Pour diviser par deux le temps passé avec toi ? Hors de question.
— Pourtant, nous vivons de manière assez indépendante toi et moi.
— Oui, mais je sais que tu seras potentiellement de l'autre côté de chaque porte. Que si tu n'es pas présent la journée, tu le seras le soir. Que si tu es occupé la nuit, tu seras là la suivante.
— Je ne quitterai pas notre logement la nuit. Ou bien ce sera avec toi.
— Tu ne pourras décemment pas m'inviter à toutes les festivités ou réunions que tu devras assurer.
— Je t'épargnerai les réunions, en effet. En revanche, impossible de sortir sans toi, pour des raisons professionnelles ou non.
— Nous verrons ! me dit-il avec un clin d'œil.
— Je t'en fais la promesse ».
Et je manque de briser nos deux verres tant la violence avec laquelle je les ai rapprochés me surprend. Il se moque de moi, comme souvent. Mais avec une moquerie enfantine, une évidente affection, une réelle empathie.
« De toutes manières, tu ne peux pas te passer de moi. Même la ministre l'a rappelé tout à l'heure.
— Permets-moi de souligner que tu pensais qu'elle parlait de moi.
— C'était plus logique. Mais bon, que veux-tu, la vérité finit toujours par éclater ».
Alors que ses doigts entourent son verre, ma main vient les recouvrir. Il aime tant ça. Sa tête s'alourdit pour finir logée contre la mienne. D'habitude, je préfère être appuyé sur lui. Mais il a bien le droit d'en profiter, lui aussi.
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Pour Les Medicis (B&B)
Ficción GeneralEliot Preston vient d'être nommé directeur de la prestigieuse Villa Medicis. Son compagnon, Alvaro, plus discret, moins explicite que lui, n'en reste pas moins son plus fidèle allié et soutien. Ensemble, ils débutent une nouvelle vie romaine, après...