105. Le coût d'une omniprésence

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Hélène se pencha vers l'amiral.

« Où est parti Dimitri ? demanda-t-elle à voix basse.

— Il va revenir, il... il doit juste réfléchir, je pense. » fit Rodrigue avec une grimace ennuyée, mais elle vit qu'il était inquiet et un peu agacé.

Le général en profita pour ressurgir, le visage encore plus fermé qu'à l'accoutumée et il se rassit sans un mot.

« Bien, osa Jack.

— Nous ne pouvons pas compter avec elle, annonça Dimitri, froidement.

— Pourquoi pas ? demanda le rouquin.

— Elle travaille pour Sandar, tu l'as entendue.

— Et alors ? C'est une aubaine, et une preuve d'ingéniosité de la part du maître des ombres.

— Sandar est du côté des Bénétnashiens, Jack.

— Qu'en sais-tu ?

— Je l'ai vu. Et je l'ai senti, aussi. » grommela le général.

Le bandit haussa les sourcils.

« De plus, il savait certainement ce que les Bénétnashiens tramaient, et il ne nous en a pas informés, intervint Rodrigue.

— Vu que vous n'accordez par principe aucun crédit à ses dires, ça n'a rien de stupéfiant, railla Jack, en croisant les bras, buté.

— Rowena a dit ne plus avoir le moindre contact avec lui, fit Iphigénie en s'éclaircissant la voix.

— Même si c'est vrai, lui sait que nous sommes en contact avec elle et il peut donc anticiper nos intentions, dit Dimitri.

— Non. Il sait juste que nous disposons d'informations, nous aussi. Quelque part, cela rétablit l'équilibre, murmura Rodrigue, qui semblait ne pas savoir quel parti prendre. De plus, s'il voulait vraiment nous priver de ces informations, il aurait fait tuer la vieille.

— Peut-être ignore-t-il où elle se trouve, lâcha Dimitri, mais son intervention suintait la mauvaise foi.

— Allons. Mikah peut frapper où il veut, fit Iphigénie. A Kursha Tren comme ailleurs. Nous le savons très bien, tous.

— Alors c'est que cette vieille femme est encore en contact avec lui et qu'il s'en sert pour suivre nos déplacements, conclut le général. Et qu'il a des intérêts à nous garder encore vivants.

— De qui parle-t-on ? intervint alors Hélène, désireuse de reprendre pied dans une conversation qui lui échappait complètement.

— De Mikah Sandar, le chef des services secrets gérébrans, dit Rodrigue.

— Un assassin. » lâcha Dimitri, et elle s'étonna de le voir aussi proche de la colère.

Elle eut un frisson.

« Oh. » fit-elle, simplement.

La fureur qui rayonnait du général était inédite et l'affectait curieusement. C'était une facette de sa personnalité qu'elle ne connaissait pas, qu'elle sentait dangereuse, incontrôlable.

« Si Mikah avait vraiment voulu ta tête, il ne t'aurait jamais laissé prendre la poudre d'escampette, Dimitri, intervint Jack.

— Sauf s'il veut être certain de m'avoir, et Rodrigue, et toi, et tout ce qui nous reste de troupes, répondit le général.

— Il ne t'a pas suivi, fit l'amiral.

— Mais il sait que je reviendrai. »

Le silence suivit cette déclaration. L'idée n'était apparemment pas complètement stupide. Hélène avait l'impression que quelque chose d'important lui échappait. Elle revit soudain la silhouette ensanglantée de l'homme en blanc dans la cour, lavant ses mains dans la neige immaculée.

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