23. S'cuse moi Shakira..

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ELLA LOMBARD

Janvier 2011

La tête de Zam' posée sur mon ventre, j'étais allongée en étoile de mer sur mon lit. Les yeux rivés sur le plafond blanc, je caressais frénétiquement la tête de mon chien. Mon autre main de disponible était posée sur ma bouche, essayant de couvrir mes sanglots qui se faisaient de plus en plus nombreux. Il y a plusieurs mois, j'étais dans la même position sur le même lit, mais pour une toute autre raison. Idriss m'avait pourtant dit qu'il aurait besoin de temps, mais c'était plus fort que moi, derrière son air froid et sombre, Hakim était une personne vraiment gentille quant il le souhaitait. Et même si je ne connaissais pas plus que ça Saïd, ce qu'il lui est arrivé il ne le méritait pas, personne ne mérite de partir si précipitamment. Il est vrai que je ne connaissais pas bien Saïd, pas plus que ce que mon grand-père m'avait dit de lui, et pas plus que ce que j'avais pu voir de moi-même quand je travaillais sur le chantier. Je n'avais jamais perdue de membre de ma famille, mais je savais ce que ça faisait de se sentir abandonné par une personne que l'on aime. Je me sentais coupable, pas du fait qu'il soit décédé, mais du fait que j'ignore tout le monde depuis ce malheureux soir. Du moins, j'ignore mes grands-parents, je ne les vois que pour manger, et encore j'ai réduis mes repas à un par jours. Si les gars voyaient ça, ils m'auraient certainement passés un savon eux aussi, comme le fait ma grand-mère depuis quelques jours. Mais je n'ai pas la foi, je suis démoralisée et même Zam' n'arrive pas à me redonner le sourire, chose qui est rare.

Depuis ce sinistre soir, je n'avais pas revue les garçons et aucuns de leurs amis non plus. Je me contentais de faire des allers-retours entre ma chambre et la cuisine, je passais également par la salle de bain évidemment. A part ça mes journées n'étaient pas rythmées, j'avais travaillé seule avec Yllias la dernière semaine même si ça n'avait été simple pour aucuns de nous deux, mais surtout lui. Saïd était un de ses amis, et même s'il ne faisait pas parti de ma famille son départ m'avait touchée, certainement pas de la même façon que les garçons, mais ça ne me faisait pas rien. Et si j'étais touchée pour un départ qui n'était pas de ma famille, je ne voulais même pas imaginer ce que les garçons pouvaient vivre et ressentir à l'instant présent. Le pire c'était Sofia, rien que l'image de son visage tout triste me faisait énormément de peine, je ne la connaissais pas des masses non plus, mais c'était une femme que j'appréciais. Je savais de source sûre qu'elle ne méritait pas ça, et ça me faisait de la peine de savoir qu'elle devait vivre ça. Je quittais finalement le plafond des yeux pour poser mon regard sur Zam', lui aussi avait l'air mal, et je pense secrètement que c'était le fait de me voir de la sorte. Je retirais ma main de sa tête avant de me mettre en position assise sur mon lit. Le jack relève la tête vers moi certainement intrigué, même s'il doit être indifférent je lui fais un faible sourire en tapotant légèrement sur sa tête.

-J'vais bouger Zam', j'ai besoin de prendre l'air. Tu veux bien rester avec Papy et Mamie ? Ils sont tristes en ce moment..

Il sautait simplement du lit en remuant la queue, je souriais malgré moi avant de me changer rapidement. Je troquais mes grosses chaussettes contre des soquettes qui passeraient largement mieux dans mes baskets. Je retirais mon gilet pour enfiler un sweat, je vêts ma doudoune noire avant de chausser mes Nike à mes pieds. Je saisis mon bonnet qui se trouve sur mon lit avant d'ouvrir la porte de ma chambre, je m'avance dans le couloir avant de prendre une grande inspiration en relevant la tête une fois dans le salon. Le regard de mes grands-parents se tournent vers moi et je tente un faible sourire.

-Tu sors ma chérie ? Me demande ma grand-mère.

Je hoche légèrement la tête avant de détourner mon regard vers mon grand-père. Son regard est comme à son habitude, dur, et comme celui d'Hakim il ne laisse rien paraître. Mais je sais que même s'il est mal, il ne dira rien.

FAUT PAS QUE T'OUBLIES | MEKRAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant