New-York. Mai. Elizabeth.
Non content de ne pas tenir compte de l'affection que son meilleur ami développait pour Jane Bennet, Fitzwilliam Darcy avait élaboré une stratégie miteuse pour tenter d'extorquer de l'argent et l'appart à la jeune femme ! C'était insupportable ! Elizabeth n'était pas loin de penser que ce Darcy était un salopard et que Phil avait bien choisi son avocat !
Après avoir envoyé une proposition totalement honteuse – proposition où, non seulement, il estimait mériter de garder l'appartement, mais en plus exigeait une somme d'argent pour compenser l'annulation du mariage - Philip Newell avait proposé une entrevue à Jane. Une entrevue, seuls. Tous les deux. Sans homme de loi, ni témoin d'aucune sorte.
Contrairement à sa sœur, Jane pensait que c'était une bonne chose. Il fallait qu'elle affronte son ex. Elle se sentait prête. Elizabeth n'était pas étonnée autre mesure. L'affection que semblait porter Charles à sa sœur, avait donné à cette dernière une bonne raison d'en finir définitivement avec Phil Newell. Il était nécessaire de clôturer le chapitre de ces cinq dernières années pour en ouvrir un autre plus prometteur. Pourtant, Elizabeth redoutait cette entrevue. Jane n'était pas encore solide comme un roc et elle se demandait bien pourquoi Newell souhaitait rencontrer son ex toute seule. Quelle stratégie allait-il adopter ? Elizabeth craignait qu'il ne tente de l'apitoyer pour que sa sœur le reprenne. Ce serait le pire des scenari. Elle se devait de veiller au grain.
***
— Je ne sais pas. C'est inhabituel comme procédé. Je suis étonné que son avocat ait accepté cette initiative. C'est risqué. Tu crois que Jane sera capable de gérer seule ?
— Elle ne sera pas totalement seule. Je serai dans les environs. Au cas où...
— Ne va pas me le frapper, hein ?! Ça serait la pire des options.
— Je ne compte rien faire devant témoin, si c'est ça qui t'inquiète...
— Elizabeth !
Un verre à la main, accoudé à la rambarde du balcon sur lequel ils s'étaient réfugiés pour échapper autant au brouhaha de la soirée qu'aux oreilles indiscrètes, Geoffrey ouvrait de grands yeux, outré, et c'était assez comique.
— Je plaisante, Geoffrey. Je veux juste m'assurer qu'il ne lui fera rien.
— Ok. Alors c'est ok pour moi. Tu me tiendras au courant dès que ce sera fait.
— Pas de problème...
Une silhouette émergea avec élégance de l'une des portes-fenêtres.
— Ah ! Vous êtes là tous les deux ! Si je ne vous connaissais pas si bien, je m'inquiéterais de vous trouver tous les deux seuls sur ce balcon ! s'exclama Amalia avec un charmant sourire qui disait « avises-toi d'envisager de me piquer mon homme et tu es morte, Lizzie ».
À la suite de la marieuse, Elizabeth trouva une Lydia radieuse et ravie. Ce qui ne voulait dire qu'une chose, la lycéenne avait dû réussir à faire un truc que lui avait interdit sa sœur. Elle soupira.
Comme prévu dans le planning de la famille Bennet, la petite dernière profitait d'un voyage de deux jours à New-York avec sa classe. Pour éviter de payer un hébergement dispendieux, il avait été convenu qu'Elizabeth accueillerait Lydia le temps d'une nuit. Or, comme attendu de la part de cette adolescente délurée, elle avait voulu sortir.
Elizabeth s'était souvenue qu'Amalia organisait une réception. Elle ne s'était rappelée du motif de l'évènement – le départ en retraite d'un juge particulièrement apprécié par ses pairs - qu'en arrivant, en constatant la présence en surnombre d'hommes et de femmes de loi. Il y avait même quelques flics...
Ça n'aurait posé aucun problème si Elizabeth n'avait pas été accompagnée de sa jeune sœur, mineure qui plus est. Car en effet, même si l'adolescente, vêtue d'une petite robe noire appartenant à son aînée, était ravissante et paraissait sûre d'elle et de son pouvoir de séduction, elle n'avait que 16 ans.
Si jamais leur mère apprenait qu'Elizabeth l'avait amenée à une réception, même très conventionnelle – on était en bonne compagnie, que diable -, elle la clouerait au pilori sans attente.
Elizabeth s'était donc mise en tête de surveiller sa sœur comme le lait sur le feu. Elle la présentait dans les formes en précisant son âge, ce qui contrariait beaucoup Lydia, qui aurait aimé naviguer seule parmi tous ces potentiels mâles appréciateurs de sa juvénile beauté.
Lydia allumait des feux. Elizabeth les éteignait aussitôt. Mais à voir ce sourire radieux sur le visage gracile de sa sœur, elle devinait qu'elle avait profité de peu de temps en compagnie d'Amalia pour faire un truc strictement interdit à son âge, et dans cette réception plus précisément, genre : boire de l'alcool ou échanger son numéro avec un adulte non informé de son âge réel.
— J'en ai fini avec lui, Amalia ! s'exclama Elizabeth avant de prendre le bras de sa sœur, prête à l'entraîner à l'écart pour avoir une « petite » discussion.
— Pas de problème, Lizzie... Geoffrey, il y a un homme du cabinet Harper qui te cherchait tout à l'heure.
— Harper ?
— Tu vas te dévergonder chez la concurrence, Geof ?! lança Elizabeth en faisant un clin d'œil.
— Non. Harper collabore avec nous sur un gros dossier.
— La seule à se dévergonder avec un avocat de chez Harper, c'est toi Lizzie ! Je t'ai vue discuter avec Harry Chapman tout à l'heure.
— Le grand black aux yeux vert ?
— Humhum.
— Il est pas mal, il faut le reconnaître, mais nous n'avons échangé que des banalités, dit Elizabeth en regardant sa sœur.
Comment aurait-il pu en être autrement. Elle n'allait quand même pas draguer avec sa sœur à côté, quand même. Quel exemple elle aurait été ?!
— Il est très disponible, ce Harry Chapman, dit Amalia ingénument, parfaitement consciente de mettre Elizabeth dans une situation tendue.
— Tu m'étonnes, sa femme vient de mettre les voiles, ajouta Geoffrey sans réaliser qu'il entrait dans le jeu de son épouse.
— Un cœur brisé. Rien de plus déprimant, lâcha Elizabeth prête à déguerpir cette fois.
— Pas vraiment. C'est un coureur invétéré, lâcha Amalia avec un sourire en prenant l'autre bras de Lydia. Un peu comme ta sœur, chérie, finit-elle en souriant à l'adolescente qui n'en perdait pas une miette.
— Je récupère ma sœur, Amalia, si tu permets, trancha Elizabeth en disparaissant avec Lydia.
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Les sœurs Bennet
ChickLitCette histoire s'inspire très librement des personnages d'"Orgueil et préjugés" de la grande Jane Austen. Pas de comparaison possible, mais un roman autour des sœurs Bennet de nos jours. Cinq sœurs, cinq cœurs en quête d'amour, cinq destins romanti...