Chapitre 41 L'intrépidité de l'adolescence et la passion de la maturité

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Los Angeles. Mai. Jane.

— Tu ne veux pas autre chose ? Tu es sûre ?

Charles était au petit soin depuis qu'il était allé la chercher à l'aéroport. Maintenant, au volant de sa voiture, il s'inquiétait de son confort, de ses besoins. Si Jane n'avait pas été si nerveuse elle-même, elle en aurait ri. Elle avait vraiment l'impression d'être une ado à son premier rendez-vous. Sauf qu'ils allaient sauter la case cinéma ou promenade pour aller directement au moment où ils seraient seuls tous les deux dans un espace clos et intime.

Elle avait peur. Ce qui était parfaitement stupide. Que pourrait-il bien arriver de mal entre eux ? Ils s'entendaient bien, riaient des mêmes choses et se plaisaient indubitablement. Qu'avait-elle à perdre ? À part un peu de crédibilité personnelle, et du temps... Oui, mais voilà, la raison n'était pas toujours disponible lorsqu'il s'agissait d'affaire de cœur. Alors Jane avait peur. Et compte-tenu de l'attitude de Charles, elle était prête à parier que lui aussi.

Ce qui, en soit, était plutôt rassurant. Elle aurait détesté être la seule à appréhender la soirée. Mais, non... Charles aussi se demandait sans doute si tout allait bien se passer. Lui, si sûr de lui d'ordinaire... à moins que ?!

— Tu regrettes de m'avoir dit de venir ! s'exclama-t-elle brusquement. C'est ça ! Tu regrettes !

— Mais... Jane ! Pas du tout ! répliqua Charles en lui lançant un regard d'incompréhension avant de refixer la route. Pourquoi dis-tu ça ? Tu regrettes d'être venue ?

— Non !

— Alors, nous ne regrettons rien, ni l'un, ni l'autre.

— Mais ?

— Il n'y a pas de « mais ».

— Il y en a toujours un.

Charles sourit soudain.

— Je suis un peu nerveux parce que c'est la première fois que nous sommes seuls.

— Nous avons fait des promenades à cheval ensemble, je te signale.

— Il y avait des chevaux entre nous. Et de la neige ou mes sœurs... Et même dans ces circonstances, j'ai eu du mal à ne pas t'embrasser pendant des heures. Voire à faire beaucoup plus... alors...

— Alors, dans ton appartement...

— J'ai peur de te brusquer, Jane. J'ai tellement...

Cette fois, le sourire fleurit sur le visage de la jeune femme. Elle se pencha vers Charles et commença à l'embrasser dans le cou en murmurant : « parce que tu crois être le seul à avoir envie... d'un chocolat chaud avec des marshmallow ! » finit-elle en se rétablissant sur son siège, alors que le pauvre Charles avait bien du mal à se remettre de ses émotions.

— Tu es diabolique. Mes sœurs ont raison. Je dois me méfier de toi. Ce soir, nous mangeons dehors, et je fermerai ta porte de chambre à double tour.

Jane éclata de rire.

— C'est ça oui... dit-elle en lui tapotant la cuisse.

Son regard allait de son entrejambe gonflé au visage de Charles qui rougit brusquement avant de se garer sur le bas-côté de la route, heureusement libre.

— Jane Bennet, je vais te faire l'amour dans cette voiture. Ici et maintenant ! dit-il à la jeune femme en l'embrassant fougueusement.

— Certainement pas, Charles Bingley ! cria-t-elle en le repoussant avec un grand rire. Je ne suis pas une fille facile ! Qu'est-ce que tu crois ? Ce soir, c'est moi qui ferme la porte à clé !

— M'en fous ! Je défoncerai la porte. L'appart m'appartient... finit-il en faisant semblant de bougonner, mais en continuant de l'embrasser.

Jane sentait qu'elle s'enflammait à chaque nouvelle caresse de Charles. L'habitacle et leurs positions respectives ne leur permettaient pourtant pas grand-chose sans sentir une poignée ou un levier leur rappeler que ce genre d'activité ne se pratiquait pas dans une voiture sans en retirer quelques désagréments. Et puis, tous ces vêtements...

Échevelée, mais toujours vêtue – enfin plus ou moins-, Jane finit par repousser Charles.

— Il est encore loin ton appart ?

Pour toute réponse, la voiture démarra sur les chapeaux de roue en s'insérant avec une certaine virtuosité dans le flux de circulation.

***

Jane émergea des draps avec l'esprit alerte. Elle n'avait pourtant pas beaucoup dormi. La veille, Charles et elle avaient sauté la case repas, discussion, film, dernier verre, etc., pour aller à l'essentiel. Ils avaient une telle envie l'un de l'autre que faire l'amour une fois n'avait pas suffi. La nuit avait été torride et voluptueuse. Jane pensait avoir eu pour la première fois de sa vie de véritables orgasmes ! Ce qui lui faisait penser que Philip lui avait rendu un énorme service en la trompant. Vraiment énorme ! Il allait falloir qu'elle le remercie. Parce que son avenir s'annonçait vraiment plus radieux ! Au moins, sexuellement...

À moins que Charles, après avoir obtenu ce qu'il souhaitait, l'abandonne à sa rupture. Les pensées de Jane s'assombrirent aussitôt. Et ce, d'autant plus que son amant n'était plus au lit avec elle, alors que l'aube pointait à peine. Était-ce le signe qu'il avait été déçu ? Qu'elle pouvait reprendre son sac – qu'elle n'avait même pas ouvert encore – et repartir ?

La jeune femme était dans cet état de confusion quand Charles, un plateau garni entre les mains, entra dans la chambre. Au regard de sa belle, il comprit immédiatement qu'il y avait un problème.

— Jane ? Qu'est-ce qui se passe ? Tu ne vas pas bien ? Tu as... mal quelque part ? demanda-t-il en posant le plateau près du lit, en songeant à tout ce qu'il avait fait avec la jeune femme cette nuit.

Il avait eu pas mal de femme dans sa vie, mais Jane les surpassait toutes. Elle était en parfait accord avec lui, répondait à ses caresses et en prodiguait de sublimes. Il n'aurait su dire si cela avait autant d'importance dans le couple qu'il voulait former avec elle. Toutefois, il était indéniable qu'une telle entente sexuelle ne pouvait être qu'un atout pour l'avenir. Alors, il s'inquiétait de ce que la jeune femme n'ait pas eu autant de plaisir que lui.

— Non. Ça n'est pas ça, Charles. Mais... je ne savais pas où tu étais. Je croyais que...

— Tu croyais que j'étais parti sans te dire au revoir ? s'exclama-t-il en réalisant qu'elle avait le même genre de doute que lui. Bon sang, Jane ! J'ai passé la plus belle et la plus exaltante nuit de toute ma vie ! Crois-moi ! Je ne suis pas près de te quitter sans même te dire au revoir ! finit-il en l'enlaçant avec force.

Jane se laissa emporter par sa joie toute neuve et l'embrassa avec fougue. Ce qui entraîna un élan passionné de la part de Charles qui entreprit de prouver à sa douce et belle Jane qu'il avait envie d'elle plus que de raison. En tout cas, plus qu'il ne le devrait alors qu'il était prêt à partir pour une réunion.

***

Jane regardait le plateau posé sur le lit devant elle. Charles avait fait des pancakes ! Il avait ajouté un verre de jus d'orange pressé, une pomme découpée en quartiers, ainsi qu'un laitage parsemé d'éclat de quelque chose qu'elle n'arrivait pas à identifier à l'œil. Un doigt curieux vint perturber le parfait agencement de la surface crémeuse pour déterminer l'inconnu. De la noisette !

La jeune femme sourit. Charles avait dû se renseigner auprès d'Elizabeth, parce qu'elle ne voyait pas comment il aurait pu deviner tout ce qu'elle aimait. Quoi qu'il en soit, elle s'en fichait ! Elle avait passé une nuit incroyable, et la matinée s'annonçait tout aussi radieuse.

***

Lorsqu'il entra dans l'ascenseur, Charles réajusta sa cravate, recoiffa quelques mèches rebelles, sourit à son reflet. Il était physiquement épuisé, mais son esprit n'avait jamais été aussi clair. À cet instant précis, il était sûr d'une chose : Jane Bennet était la femme de sa vie.


Les sœurs BennetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant