Chapitre 46 Service rendu à l'ennemi

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New-York. Mai. Elizabeth.

— Cette entrevue sans l'avocat de votre sœur n'a aucune valeur juridique, vous en êtes consciente, Mlle Bennet ?

— Alors oui, j'en suis consciente, mais j'ai de bonnes raisons d'agir ainsi. Et contrairement à ce que vous pensez, « maître » Darcy, c'est pour vous rendre service que je suis là.

— Me rendre service ?

— Vous êtes malheureusement le meilleur ami d'un homme qui aime éperdument ma sœur. Je ferais n'importe quoi pour que Jane soit heureuse, y compris tenter d'aplanir les choses avec un foutu d'avocat têtu et psychorigide comme vous.

— Oookkk. Bien. Allez-y, rendez-moi service, qu'on en finisse au plus vite.

Elizabeth plongea la main dans son sac et en ressortit une pochette de photos qu'elle commença à sortir pour les poser une à une sur le bureau devant l'avocat. Il y avait les deux boites ouvertes et leur contenu : la drogue, l'argent et tous les polaroids que la jeune femme avait saisi de manière à ce que tous les visages soient bien visibles.

— Nom de ... Qu'est-ce que c'est que ça ?!

— Ça, c'est ce que Philip Newell, votre client, tentait de récupérer par tous les moyens possibles depuis que Jane a rompu et lui a interdit l'accès à l'appartement.

Fitzwilliam se mit à observer les photos avec plus de méticulosité. Il réfléchissait. Il savait depuis le début que Newell était une ordure, même s'il avait tenté de passer pour une victime de sa fiancée. Mais lui, était un pro, il défendait les dossiers qu'on lui attribuait au cabinet comme si sa vie en dépendait. Il n'y avait pas de gentil ou de méchant, il y avait des clients. C'est tout.

Toutefois, il devait reconnaître que cette affaire était inhabituelle pour lui, car elle revêtait un caractère personnel qu'il avait du mal à mettre de côté. Dès qu'il avait su pour la relation entre Jane et Charles, il aurait dû transmettre le dossier à un collègue. Mais il ne l'avait pas fait, et maintenant, il était trop tard. Ensuite, il avait tenté d'arranger les choses à sa manière. Il s'était appliqué à trouver une issue qui soit favorable à son client et à Charles.

Il fixa Elizabeth, regard froid, visage fermé.

Sa propre animosité envers les sœurs Bennet n'avait pas grand-chose à voir avec la sympathie ou la pitié qu'il éprouvait pour son client, car il n'en avait aucune. C'était plutôt un ensemble de détails qui le rendait fou : cette famille risible, à des années-lumière du monde dans lequel il avait l'habitude d'évoluer, l'imbrication inattendue avec les sentiments de son meilleur ami, et ce qu'il ne pouvait s'empêcher de ressentir lorsqu'il était dans l'orbite de la seconde sœur, dont l'énergie dévastatrice ne laissait de place à rien d'autre qu'à un désir violent de la dompter.

— Bien. Avez-vous la preuve que ces objets sont bien la propriété de mon client ?

— Étant donné que Jane lui a rendu l'une des deux boites, on peut aisément songer qu'effectivement, il s'agit de sa propriété.

— Elle lui a rendu quoi ? s'exclama-t-il incapable de garder son sang-froid devant l'incongruité de ce qui venait être dit.

— Elle lui a rendu la boite avec la drogue et les photos.

— Et il s'est sans doute empressé de les faire disparaître ! Vous en êtes consciente ! Vos photos ne suffiront pas à prouver que... Elle n'aurait pas dû lui rendre sans témoin...

— Et vous vous êtes conscient que c'est toujours votre client ? répliqua Elizabeth tout sourire en posant son joli menton dans sa main en s'accoudant au bureau.

Les sœurs BennetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant