Chapitre 40 Des facéties du hasard et de la séduction en terrain conquis

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New-York. Mai. Jane & Elizabeth.

Le premier rendez-vous s'était mal passé. L'entreprise était cliente de ses anciens employeurs. Jane la connaissait. Elle connaissait les investissements faits par les patrons et voyait bien qu'aucun bénéfice ne ruisselait vers les employés. En gros, ils s'en mettaient plein les poches, mais pas ceux qui travaillaient pour eux. Elle le savait. Ils savaient qu'elle le savait. Ça ne pouvait pas fonctionner.

Le second rendez-vous fut plus positif, mais vu le nombre de candidats qui patientaient pour passer un entretien, il était peu probable qu'elle soit sélectionnée. Une jeune femme de 25 ans, c'était de potentielles grossesses et des arrêts maladies afférents. Beaucoup d'entreprise y regardait à deux fois avant d'embaucher quelqu'un comme elle, même avec les meilleures références du monde. Elle n'était donc pas très optimiste.

— Ne t'en fais pas Jane ! Tu vas trouver un truc. Tu devrais taper dans des plus petites entreprises.

— Ça ne va pas tarder... et je pense élargir aussi la zone géographique.

— Est-ce que ça aurait un lien avec un certain Charles, par hasard.

— Mais pas du tout !

— C'est pour cette raison que tu ne cibles aussi la côte ouest... ajouta Elizabeth en se penchant sur les épaules de sa sœur assise devant son PC portable posé sur la table de la cuisine.

— Arrête de m'espionner ! cria Jane en riant.

Puis, elle s'arrêta brusquement, son regard scannant la tenue d'Elizabeth avec stupéfaction.

— Tu comptes sortir comme ça ?

— En body dentelle et bas ? Ça serait sans doute l'occasion de se débarrasser de mon concierge qui ferait une crise cardiaque, mais non, ma chère Jane. Je ne compte pas sortir en sous-vêtements. Je vais passer cette robe.

— Cette robe ? déglutie Jane en observant avec attention le vêtement en question dont la superficie totale ne devait pas dépasser celle du foulard que la jeune femme portait autour du cou.

Elizabeth éclata de rire devant le visage déconfit de sa sœur.

— Je vais voir Harry ce soir. Inutile de mettre trop de couches de vêtements. Et puis, il adore cette robe... rapport au décolleté, je crois, finit-elle en enfilant la-dite robe et en l'ajustant sur son corps plutôt athlétique. Jane devait reconnaître qu'elle lui allait à la perfection et qu'elle mettait en valeur sa poitrine.

— Tu y vas comment ?

— En tax'. Pas moyen de prendre la moto avec ce truc. En plus, mes chaussures ne s'en remettraient pas.

— Tu veux que je te dise. Il n'y a pas que tes chaussures qui ne s'en remettraient pas. Tout être vivant qui croiserait ta route tomberait en syncope ! Chiens, chats et pigeons, compris !

Elizabeth se mit à rire en se regardant dans le miroir de l'entrée.

— C'est vrai que j'en jette dans cette robe...

— Ça à l'air de bien fonctionner avec Chapman...

— Tu ne l'aimes pas beaucoup, hein ? Je me trompe ?

— Tu veux vraiment mon avis en dépit de notre pacte ?

— Humum, grogna Elizabeth en s'attachant les cheveux en chignon vague.

— Je trouve qu'il y a un truc qui cloche.

— Quoi ?

— Impossible de mettre le doigt dessus. Intuition. Tu ne ressens rien toi ?

— Mouais. Non. Il est comme la plupart des types de son genre, je suppose. Un rien trop sûr de lui et de son charisme. Et puis, c'est un avocat...

— Un coureur et menteur patenté, donc.

— C'est ça. Mais bon. Je le savais avant de coucher avec lui. Et puis, on ne passe pas de tant de temps ensemble, finalement.

— Ça fait quand même plusieurs rendez-vous sans l'ombre de la lassitude. Je n'ai pas l'habitude avec toi.

— Trois semaines. C'est vrai que ça fait longtemps que je n'avais pas eu d'aventure aussi longue, dit Elizabeth, fin prête en se tournant vers le miroir. Mais bon, ça n'est pas comme si j'avais décidé de me marier avec. Pour le moment, c'est un amant plutôt doué et un partenaire de soirée convenable.

— Méfie-toi quand même.

— Jane ?! Qui êtes-vous, madame ? Rendez-moi immédiatement ma sœur !

Pour toute réponse, Jane lança un coussin sur Elizabeth en tirant la langue.

— Je te dis qu'il y a un truc qui cloche.

— Tu crois que c'est un psychopathe ?

— Arrête ! C'est juste que je ne lui fais pas confiance.

— Mais moi non plus, bichette ! Moi non plus ! Je ne suis pas dupe et je me protège. Ne t'inquiète pas pour moi... d'autant que tu as toi-même quelques chats à fouetter de ton côté, non ? Comment va Charly ?

— Ah ! Parce que c'est Charly, maintenant ?

— Il est presque de la famille pour moi.

— Tu ne vas pas un peu vite en besogne. Tu oublies ses sœurs et notre meilleur ennemi : « Maître » Fitzwilliam Darcy !

— Ils ne comptent pas, Jane. Charles t'aime et il ne se laissera pas pourrir par les parasites qui gravitent autour de lui.

— Je l'espère, soupira Jane. Il m'a invité à L.A. pour...

— Oh ! Oh ! Oh ! L'affaire se précise ! Et tu remarqueras qu'à L.A., il n'y aura ni sœurs snobs, ni avocat contrariant ! En parlant de cet idiot, imagine un peu la tête qu'il ferait en me voyant dans cette robe ?!!!

Jane pouffa, tout en songeant qu'il y avait bien quelque chose entre Elizabeth et Fitz, même si aucun des deux ne l'aurait reconnu. Elle l'avait bien senti quand sa sœur avait proposé d'enfermer Darcy dans son appartement en rigolant l'autre jour. Cette attirance se teintait d'une répulsion, dont l'origine ne venait pas seulement de l'opposition juridique entre Jane et Phil.

Quoi qu'il en soit, la jeune femme décida de ne plus s'inquiéter concernant la relation qu'avait Elizabeth et Chapman. Manifestement, dans un coin de la tête de la seconde sœur Bennet, il y avait un trublion bien accroché. Restait à savoir ce qu'elle allait en faire.


Les sœurs BennetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant