Chapitre 26 La kermesse

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Wilmington. Mai. Elizabeth.

Une kermesse et un bal ! Voilà quel était le traquenard que Mme Bennet avait omis de préciser à ses filles avant qu'elles ne débarquent le samedi en fin de matinée.

La paroisse organisait l'évènement deux fois par an. Une fois avant Noël, pour récolter des dons pour que les plus démunis puissent passer des fêtes agréables, ou au moins convenables. Et une fois au printemps pour récolter de quoi envoyer les plus jeunes enfants en visite dans un endroit festif différent chaque année.

C'était pour la bonne cause. On ne pouvait se décharger de la bonne cause sans conséquence pour le salut de son âme. C'était une évidence à laquelle aucune des sœurs Bennet ne pouvait échapper. Il fallait donc se résoudre à y aller. Et ce, malgré les gros nuages gris qui semblaient vouloir donner au ciel des airs d'apocalypse imminent.

Mme Bennet avait enrôlé de force Lydia pour tenir un stand alimenté par les tartes, gâteaux et biscuits confectionnés par Catherine. La quatrième sœur possédait un véritable don pour la cuisine en général, et la pâtisserie en particulier. Et tout Wilmington le savait et en profitait en des occasions pareilles.

Mary, pour sa part, très impliquée dans la vie de la paroisse, passait son temps avec les enfants de la chorale. À leur grand désespoir, cependant, puisque la jeune femme ne cessait de leur faire chanter des cantiques sinistres, annonciateurs de la fin des temps. Il n'y avait pas à dire, Mary avait tout d'une rabat-joie. Heureusement, une bonne âme vint au secours des gamins au troisième chant sur le risque de succomber à la gourmandise.

La jeune femme avait donc rejoint Finn Collins, qui était responsable du barbecue et alimentait en délicieuse viande grillée le stand des sandwichs. On ne pouvait pas lui enlever cette qualité. Il était, sans aucun doute, un excellent cuisinier et appréciait partager. Ça n'était pas rien.

Mais est-ce que cela pouvait compenser son obsession pour Jane ? Là était la question que se posait Elizabeth en croquant dans son deuxième hot-dog dégoulinant de sauce et d'oignons frits. Quant à sa relation avec Mary, elle n'imaginait pas une seconde que Finn puisse avoir des sentiments pour sa jeune sœur. Cette dernière possédait un caractère renfrogné associé à une beauté ordinaire. Rien à voir avec la vitalité entraînante ou la beauté solaire des aînées de la famille Bennet. Sans parler de la propension à l'isolement que Mary tenait indéniablement de son père.

Elizabeth ne pouvait croire Finn choisissant de partager l'intimité de Mary, ou alors, par dépit. Elle redoutait le moment où il ferait du mal à sa jeune sœur, car qui savait ce qu'un homme éconduit pourrait faire pour se venger ? Elizabeth se promit de surveiller les arrières de Mary, car malgré tout ce qui se disait, elle l'aimait sincèrement. Elle avait du mal à la comprendre, c'est tout.

La belle brunette engouffra la dernière bouchée de son hot-dog en s'approchant d'un stand de tir à la carabine tenu par un vieil ami de son père.

— Votre meilleure arme, M. Sneck ! s'écria-t-elle en posant un billet tiré de sa poche comme si elle pariait gros à une course de chevaux.

— Alors, Mlle Eliza ? On veut tenter sa chance comme au bon vieux temps ? lança le vieil homme en lui donnant une arme factice.

— Je vais gagner la plus grosse peluche ! Ce panda sauvage va bientôt rejoindre ma collection personnelle de trophée de chasse ! sourit Elizabeth.

— Que vous dites ! Je suis sûr que vous ne vous êtes pas entraînée depuis très longtemps ! Votre œil de sniper a dû s'émousser !

— La carabine, c'est comme le vélo, ça ne s'oublie pas !

Les sœurs BennetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant