New-York. Mai. Jane.
« Je vais lui démonter la tête. »
« Bien sûr que non. »
« Et pourquoi ? »
« Parce qu'il n'a plus la moindre importance. Il n'existe plus. Tu comprends ? »
Jane attendait la réponse de Charles en fixant l'écran de son portable. Elle s'était assise sur l'un des nombreux bancs qui jalonnait la rue. Elle ne l'avait pas vraiment choisi. Elle avait pris la place libre qu'il restait, car à cette heure de la journée, il y avait beaucoup de monde, surtout à cet endroit, en plein cœur du quartier d'affaire.
Elle appréciait être environnée d'inconnus. Elle connaissait la peur de certains vis à vis des attroupements, mais elle, ça la rassurait de sentir toute cette vie autour d'elle. Elle ne croyait pas en l'indifférence des foules. Envahissant la verticalité vertigineuse et l'horizontalité symétrique de New-York, ici, la vie était trépidante et avait tout de la démesure à l'américaine, et elle aimait ça.
« Je comprends. Que vas-tu faire de l'argent ? Parce que j'ai plein d'idées... »
« Du genre ? »
« Des vacances dans un endroit exotique et cher. Un premier versement pour un appart. Une bagnole hors de prix... »
« Elizabeth ! Sors de ce corps ! »
« Me serais-je trompé de sœur ? 😅 Elizabeth serait-elle la conquête la plus appropriée pour moi ? »
« Tu ne tiendrais pas deux minutes »
« Probable...😉. Alors, tu comptes faire quoi avec l'argent ? »
« J'ai une petite idée, mais je ne sais pas si c'est très approprié. »
« ????? »
« J'ai pensé tout donner à une asso qui s'occupe de femmes abusée et battue... des femmes seules, parfois avec des enfants... »
« Bon dieu ! Jane ! Ce que je t'aime ! Tu n'imagines même pas ! Je suis prêt à partir immédiatement pour le seul plaisir de te serrer dans mes bras ! Je t'aime ! Cette idée te ressemble tellement ! »
Jane se leva en souriant. Son cœur gonflé à bloc, prêt à exploser pour l'homme qu'elle savait aimer. Elle avait fait le bon choix. Et pas seulement pour l'utilisation de cet argent qui lui brûlait les doigts. Elle savait un peu plus à chaque instant qui passait que Charles Bingley était celui qu'il lui fallait. Un homme sûr avec qui construire un monde à eux. Un monde remplit de rires d'enfants et de caresse tendres. Un monde remplit d'amour et de plaisir. Un monde où elle serait à sa place.
Jane continua à répondre à Charles en marchant. Elle avançait vers le siège de l'entreprise d'Elizabeth. Elles avaient rendez-vous pour déjeuner. Le bonheur qu'elle ressentait était si intense qu'elle ne prit pas la peine de regarder avant de traverser la rue. Une foule compacte l'entourait. Le soleil jouait avec les nuages découpant d'ombre les rues et les immeubles alentours. L'air doux était envahi de cette cacophonie propre aux grandes villes. Rien ne pouvait arriver. Elle suivit juste le mouvement.
Le choc fut inattendu.
Complet.
Plusieurs corps furent projetés dans diverses directions en même temps que le sien.
Étrangement, malgré la douleur, elle suivit des yeux le téléphone qui lui échappa des mains, avec l'unique pensée qu'elle allait perdre le fil de sa conversation avec Charly.
Absurdité de l'esprit qui fuit la réalité trop dure.
Ensuite, il y eut la sensation de chute. La douleur de l'impact, intense, bref.
La voiture qui avait foncé dans la foule qui traversait la rue à ce moment-là, ne s'arrêta pas, malgré toute l'horreur de ce qu'elle venait de provoquer, malgré les hurlements, le crépitement des flashs, et les appels au secours.
Jane ne prit conscience de rien. En tombant, sa tête avait brutalement heurté l'asphalte, la plongeant dans une inconscience indolore.
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Les sœurs Bennet
Chick-LitCette histoire s'inspire très librement des personnages d'"Orgueil et préjugés" de la grande Jane Austen. Pas de comparaison possible, mais un roman autour des sœurs Bennet de nos jours. Cinq sœurs, cinq cœurs en quête d'amour, cinq destins romanti...