Chapitre 89 Le choix d'Elizabeth

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New-York. Printemps. Elizabeth.

Lorsqu'elle rentra de son escapade, la fureur était tombée, mais la colère subsistait. Elle ralluma son téléphone au pied de son immeuble, après avoir garé sa moto. Elle ne vit Jane assise sur les marches menant à la porte d'entrée de son immeuble, qu'une fois devant elle. Cette dernière bondit alors sur ses pieds et enlaça sa sœur en lui trouvant toutes sortes de noms fleuris.

— Heu, Jane ! Ne me dis pas que tu t'es inquiétée pour moi...

— Bien sûr que si ! Mais pas tout de suite après ton départ. J'ai pensé que tu reviendrais peut-être. Et puis les invités m'ont accaparée. Enfin, je me suis rendue compte de l'heure et là...

— Et là, tu t'es inquiétée.

— Oui...Pourquoi coupes-tu ton téléphone ?! Bon sang, ça me rend dingue quand tu fais ça !

— Où est Charles ?

— Il est parti chercher des cafés.

— Allez, rentres. Il fait froid dehors, soupira Elizabeth dont la colère venait de laisser place à la culpabilité.

— Mais, Charles...

— Il sonnera. Ça lui fera les pieds de ne rien me dire des plans de son abruti de meilleur ami.

— C'est que je n'étais au courant de rien. Je pense qu'il savait que je n'arriverais pas à le cacher à Jane... et Jane te l'aurait révélé... dit Charles une tasse de café dans chaque mains et l'air penaud.

— Tu m'étonnes ! Allez, montez... on se les gèle.

Une fois dans l'appartement, Elizabeth se débarrassa de ses affaires un peu humides – elle s'était essuyée à la va-vie avant de repartir - pour enfiler un ensemble de jogging molletonné et de grosses chaussettes. Elle avait eu froid tout au long du trajet retour. Maintenant, il lui fallait du chaud, y compris à la tête. Elle enturbanna ses cheveux avant de rejoindre sa sœur et son fiancé dans son salon.

Assis sur le canapé, ils buvaient leur café blottis sous un plaid. Ils se chuchotaient des choses qui les faisaient sourire. Elizabeth les envia un bref instant. Leur amour semblait couler de source. C'était doux et agréable à regarder.

L'apercevant, Jane lui sourit en tapotant la place près d'elle. Mais Elizabeth préféra bifurquer vers l'espace cuisine.

— Tu vas faire quoi, maintenant ? demanda Jane.

— Rien, répondit Elizabeth en se préparant un thé brûlant.

— Comment ça, rien ?

— Rien. Je vais le laisser mijoter dans son jus d'abruti. S'il ne l'est pas tant que ça, il reviendra en oubliant de me reparler de ce foutu mariage. Sinon, qu'il aille se faire cuire un œuf !

— Elizabeth !

— Quoi, Elizabeth ! Tu ne peux pas comprendre, Jane ! Tout est si simple avec Charles ! Mais avec lui ! Avec lui, c'est impossible de faire simple !

— Parce qu'avec toi, par contre, dit alors Jane sur un ton de remontrance.

— Quoi, moi ? Je ne suis pas facile ! OK ! Je l'admets ! Mais moi je ne demande personne en mariage devant tout New-York à la fête de fiançailles de mon meilleur ami !

— C'est vrai qu'il a été maladroit, dit doucement Charles sans trop s'avancer.

— Maladroit ? Il a été... stupide ! Stupide et déraisonnable ! Comme s'il n'avait pas pu m'en parler avant ?

— Il aurait pu ? demanda Jane ingénument.

— Non ! Bordel de merde ! Non ! Il sait parfaitement que je ne veux pas me marier !

— Et pourquoi ?

— Jane ?

— Ben oui. Pourquoi ne veux-tu pas te marier ?

— Parce que.

— Tu as peur de me blesser en me répondant, c'est ça ?

Elizabeth coula un regard en biais à sa sœur. Oui. Elle avait peur de la blesser en lui disant qu'elle trouvait ça con de se marier aujourd'hui, qu'elle ne voyait pas l'intérêt et qu'elle s'en passerait. Tout comme de faire des gosses.

— Je sais parfaitement pourquoi tu ne veux pas, Elizabeth, et je te trouve un peu lâche sur ce coup-là.

— Lâche ? répéta la jeune femme abasourdie, alors que Charles coulait un regard plein d'appréhension vers Jane. Il n'avait pas envie de se retrouver au milieu d'une dispute entre sœurs.

— Oui. Lâche. Tu ne veux pas te marier parce que tu trouves ça idiot de nos jours. Ça, c'est ce que tu dis, mais le mariage n'a plus la valeur qu'il avait autrefois. Il est si facile de divorcer. Et nous ne sommes pas vraiment croyantes. Non, le mariage ne te pose pas le moindre problème. En réalité, c'est parce que tu as peur de t'attacher à quelqu'un sur du long terme. Tu as peur que ça ne fonctionne pas. Tu as peur de souffrir de cette séparation. Tu ne cesses de frôler les limites. Tu gesticules dans tous les sens, parce que tu crois que tu es empêtrée dans des filets. Alors qu'il n'en est rien. Selon moi, c'est plutôt Fitz qui est pris dans tes filets. Tu as la main sur les ciseaux. Est-ce que tu t'es demandé pourquoi il avait fait ça ! Et non, ça n'est pas pour te faire tourner en bourrique ! Il t'aime, et il est important pour lui que ta vie soit liée à la sienne. Il t'aime, et il voudrait concrétiser cet amour en même temps que celui de son meilleur ami, parce qu'ils sont comme des frères, parce que nous sommes sœurs.

Elizabeth ne répondit rien. Tournée vers les fenêtres, le regard dans le vague, elle était perdue dans ses pensées. Jane se leva, entraînant Charles à sa suite, elle soupira, et sortit finalement. Il fallait laisser sa sœur réfléchir.


Les sœurs BennetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant