Les Olympiens se dématérialisèrent en divers endroits. Zeus décida de se réfugier au seul lieu du monde des mortels qui tendait à le calmer quelque peu. Héra, son épouse légitime, le talonnait.
Édifié sur une petite île en plein cœur de la mer Égée, l'immense pied-à-terre du roi des divinités était invisible de tous. Nul mortel ne pouvait apercevoir l'îlot, tout au plus celui-ci apparaissait tel un mirage en plein cœur du désert à une certaine heure de la journée, lorsqu'Hélios désescaladait lentement les Cieux sur son char.
La mer Égée, qui séparait l'Europe et l'Asie, restait l'étendue aqueuse favorite de Zeus, berceau et symbole de la thalassocratie économique et militaire qu'avait été la Grèce continentale de l'Antiquité. Elle avait favorisé le développement de la navigation marine des Grecs, offrait une géographie propice aux longs voyages. Les côtes montagneuses et irrégulières créaient des abris naturels, tandis que le nombre exceptionnel d'archipels en tout genre permettaient aux marins de naviguer à vue, et sans jamais perdre la côte des yeux. Elle avait, à de nombreuses reprises, été disputée dans l'Histoire, aussi bien par les différentes puissances maritimes de l'Antiquité, qu'à l'émergence de l'Empire romain ou l'Empire ottoman ayant succédé à l'hégémonie hellène.
Elle tenait son nom de la légende du roi Égée. Le héros Thésée, son fils, lui avait promis de tendre les voiles blanches de son navire s'il revenait en vie de son combat contre le Minotaure. Mais de par l'ivresse de la victoire, Thésée oublia sa promesse. Égée crut alors que son fils était mort et, envahi et submergé par la douleur, sauta du cap Sounion où il finit par se noyer dans les bras mortels de la mer en contre-bas de la falaise.
Il y avait bien longtemps maintenant que les Grecs de l'Antiquité, tout comme leur surpuissance, avaient disparu. L'Empire romain lui-même n'était plus. En cette époque, il n'existait plus d'empires aussi vastes et omnipotents qu'avaient été ces deux entités continentales et politiques, gouvernées par les dieux olympiens. Les terres s'étaient peu à peu scindées en de multiples territoires, tandis que la religion et la culture des mortels avaient évolué. Peu d'entre eux croyaient encore en l'existence des dieux anciens – pour ainsi dire personne ! Mais l'héritage des Bienheureux était éternel, tout comme leur histoire que jamais l'on n'oublierait. Leurs pouvoirs avaient certes grandement diminué, tout comme leur présence, néanmoins perpétuaient-ils la tradition de protéger et de régir le monde né des entrailles du Créateur. Tant de divinités de diverses régions qui s'étaient regroupées peu à peu pour former un panthéon plus ou moins élaboré et adopté par tous... Une grande famille, dotée d'une généalogie complexe, que les mortels de cette époque ne parvenaient à comprendre.
Zeus regardait l'eau d'une clarté pure, où se reflétait l'astre pâle de la nuit. Il y voyait également les constellations infinies qui décoraient ce ciel majestueux – qu'il avait pour la plupart placées lui-même avec l'assistance de ce vieil Ouranos, dieu primordial des Cieux devenu partie intégrante de son royaume céleste.
Le roi des dieux était assailli d'interrogations qui ne le laissaient en paix. Avant que sa fille Athéna ne s'obstinât à rechercher cette progéniture de Chaos, Zeus entreprenait de ressusciter l'Âge d'Or des anciens dieux. Son unique but était que les mortels croient de nouveau en leur existence, ou du moins en leur présence, leur présidence, pour qu'enfin ils aient, Zeus souverain de tous, pleine omnipotence sur les hommes, et que les vicissitudes de ce maudit Âge de Fer soient enfin éradiquées.
Puis était arrivé ce Disparu, l'Oublié...
Zeus était ainsi contraint de repousser ses plans afin de s'occuper personnellement du cas de jeune avorton qui, devant tous les Olympiens – oh, la honte était si amère ! –, avait osé faire couler son ichor sacré. Zeus se souvenait précisément de l'énergie calorifique de la pièce qui s'était concentrée autour du Primordial pour finalement se décharger – à l'instar des propres éclairs du foudre. Le roi des Cieux avait dénoté le pouvoir de la Flamme Originelle, celle-là même que Prométhée l'Adroit avait offerte aux mortels, bien des millénaires naguère. Ç'aurait dû être impossible...
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Kháos, tome I : Le Parjure de l'Olympe [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]
Fantasy« La vie d'un mortel est difficile ? Celle d'un dieu l'est infiniment plus ! » Lorsque les Bienheureux emportent la jeune sœur de Daímôn, son existence s'en retrouve chamboulée à jamais. Mais telle est la voie que le destin a choisie afin de l...