Δ - Μάκες (partie 2)

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À cet instant précis, Daímôn crut que le spectre allait le terrasser... si Phúlax ne l'avait aplati brusquement avec sa queue. Il roula sur le côté et décapita un énième fantôme qui explosa en une gerbe d'étincelles vertes et ténébreuses. Hécate n'y allait décidément plus de main morte. Où qu'il portât son regard, de nouveaux spectres apparaissaient. Pis, chaque fois qu'un ectoplasme était vaincu, deux nouveaux prenaient sa place, plus gros, plus armés, plus dangereux et mortels !

Le fils de Kháos porta sa main à la longue estafilade qui courait sur sa jambe, tâta le sang qui coulait à grosses gouttes et finissait de chuter sur le sol émeraude. Les spectres de la déesse – diaphanes pour certains, visqueux pour d'autres – avaient tous cette fâcheuse capacité à le blesser.

— Crois-tu franchement que risquer de mourir face à tes créatures soit le meilleur moyen pour nous de nous endurcir ? avait éructé Daímôn après qu'un spectre eut déchiré son chiton au torse.

— C'est pour votre plus grand bien ! avait répliqué Hécate.

— Je ne...

La Magicienne avait dès lors invoqué plus d'ennemis pour l'empêcher d'arguer davantage.

Phúlax, lui, s'amusait comme un fou. Les spectres craquaient sous ses crocs et brûlaient aussi bien que des fétus de paille dans des grands cris de douleur. Son souffle s'était largement accru en ces quelques jours ; Daímôn sentait de même sa pyrokinésie évoluer. Très vite, il était parvenu à enflammer sa lame avec facilité sans ressentir immédiatement une profonde fatigue.

Les résultats de ces trois jours d'exercices en tous genres étaient déjà fort concluants !

Ce quatrième jour, Hécate et Héphaïstos avaient décidé de voir de quoi était réellement capable Daímôn. Ils avaient donc passé toute la nuit à mettre au point un dernier entraînement pour le mener aux limites de ses pouvoirs. La première tâche fut la horde de spectres difformes d'Hécate.

Ils n'étaient pas tout à fait humanoïdes. La majorité était même foncièrement bestiale, des formes plus ou moins cauchemardesques à terroriser le plus brave héros. Daímôn avait même dû affronter une immense araignée appuyée d'un gigantesque scorpion. Les huit pattes de l'araignée avaient été sectionnées par ses bons soins, tandis que Phúlax s'était assuré d'arracher de sa gueule la queue et le dard du scorpion. Ridicules dans leur immobilité, les deux spectres s'étaient alors rassemblés pour former un étrange arachnide pourvu de mandibules et de pinces, capable de tisser une toile que seul le Feu Originel était parvenu à dissoudre. Les autres, plus semblables à des humains, présentaient des visages difformes et abîmés, tantôt affublés de carapace dorsale comme celle d'un scarabée ou privés de maxillaire, laissant ainsi leur étrange mâchoire pendouiller de dépit.

Mais c'était surtout cette sorte de félin aux canines longues comme des sabres qui l'avaient impressionné. L'un d'entre eux l'avait d'ailleurs blessé face à la surprise en le griffant avec ses singulières dents. En guise de représailles, le Primordial les lui avait arrachées avant de les enfoncer dans son cœur.

Dès lors, Hécate avait pu pleinement se rendre compte de la cruauté que pût manifester Daímôn. Nombre de spectres avaient été tués d'une manière plus ou moins brutale. Énucléations non chirurgicales, décapitations, sectionnements, incinérations : autant de façon de procéder que pouvait l'imaginer le Primordial pour parvenir à ses fins. Mais elle avait surtout remarqué ô combien Daímôn était un fin bretteur face à ses spectres munis d'épées ou de lances. Depuis son duel catastrophique contre Arès, Daímôn s'était profusément amélioré. Hécate en venait même à penser qu'il était désormais capable de vaincre le seigneur de la Guerre, à l'instar d'Athéna.

Tout cela ne valait pourtant rien face à la complicité qui régnait entre les deux jumeaux nés de Kháos. Daímôn et Phúlax étaient en parfaite symbiose, liés par leurs pensées. Nul ennemi ne pouvait leur échapper : tandis que le Dragon balançait les spectres en l'air, Daímôn les recevait d'un revers d'épée finement placé. Les créatures ne survivaient pas et disparaissaient.

Daímôn trancha alors en deux le dernier spectre et fit volte-face vers ses deux instructeurs, satisfait. Athéna s'approcha à son tour pour faire part de ses observations.

Babai ! l'alloua-t-elle tout sourire. J'ose croire que tu seras prêt ce soir.

— Tu en est sûre ? s'enquit un Daímôn impatient.

— La véritable légion de spectres d'Hécate n'a pas su te battre, fit Héphaïstos. Tu es paré à botter les fesses glacées de Borée et de Chioné.

— De plus, continua Hécate, ta pyrokinésie s'est grandement accrue. Ton dragon contrôle parfaitement l'Élément ignescent, tout comme toi. Tu réussis maintenant à insuffler le Premier Feu dans ta lame sans ressentir le moindre malaise. Il y a deux jours à peine, cet exercice te terrassait en quelques secondes. Tes progrès sont fulgurants ! Mais je n'en attendais pas moins, bien sûr.

— Est-ce nécessaire de continuer, alors ? dit Daímôn. Ne peut-on pas partir tout de suite pour les terres astrales ?

Héphaïstos hocha la tête de dénégation. Daímôn n'aurait certainement guère de répit avant l'Hélios vespéral.

— Ne te repose pas sur tes lauriers ! s'exclama-t-il. Hécate et moi avons tout planifié. C'est désormais mon tour ! Je vais ici tester tes capacités de réflexion face au danger. Ainsi, nous saurons si tu es véritablement prêt à affronter un dieu mineur comme Borée, qui profitera certainement de toutes les occasions pour t'éliminer.

— Comment ? rit Daímôn intrigué.

Héphaïstos fit apparaître une boule cuivrée dans sa main, aussi grosse que sa tête, et la lança plus loin. Daímôn fut plus encore intéressé par l'épreuve d'Héphaïstos : il avait toujours mille idées saugrenues à l'esprit. Il coula un rapide regard vers Pandore, assise sur l'herbe non loin d'Athéna. L'éternelle kórê était très jolie aujourd'hui dans sa robe au ton pastel, ses cheveux châtains attachés en un chignon couronné de corolles blanches. Elle le gratifia d'un sourire et leva un pouce en signe d'encouragement, avant de se replonger dans son roman reposant sur ses genoux nus.

— Alors cette boule sera mon épreuve ? railla Daímôn.

— Méfie-toi toujours de mes inventions ! répondit caustiquement Héphaïstos.

Ce ton n'augurait rien de bon !


(suite du chapitre 10 en suivant...)


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Petite aparté pour vous présenter mes excuses. Il s'est en effet passé un bon bout de temps depuis la dernière publication, mais le rendu du mémoire qui a eu lieu le 20 juin, en plus de la soutenance le 27 m'ont pris tout mon temps. Mais désormais, c'est chose faite, j'ai validé mon master avec la mention Bien, donc je peux reprendre tranquillement les publications, me concentrer sur mes bouquins et profiter un tant soit peu des vacances ;)

Kháos, tome I : Le Parjure de l'Olympe [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant