ΔΙΙ - Ἀνάστασις (partie 4)

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Elle hurla de douleur lorsque la foudre mordit son corps blessé. Elle saignait abondamment. Aucune des parcelles de son anatomie n'avait été épargnée par cette torture incessante.

— Comment puis-je éliminer cette menace ? répéta la voix.

Cela faisait maintenant plusieurs heures qu'elle s'enquerrait la même chose sans relâche, mais la captive ne pouvait se résoudre à répondre.

— Je ne désire te tuer, mais tu dois me divulguer la vérité. Je sais que tu connais le moyen. Tu es la seule à avoir décelé ceci. Dis-le-moi.

Elle ne pipa mot, comme toujours.

— Très bien, continua la grave voix. Tu ne me laisses guère le choix. Ne hurle pas trop fort, je te prie.

La foudre la frappa de toute force. Elle cria terriblement, sa souffrance se fit l'écho de la montagne.

— Hécate..., soupira Zeus.

La déesse le fusilla du regard. Ses yeux verts étaient brillants comme des émeraudes, mais noyés de larmes. Elle n'avait jamais ressenti pareille douleur qu'en cet instant.

Elle avait bien cru mourir lorsque Zeus avait lancé son éclair sur elle, mais la foudre ne l'avait jamais touchée. Lorsqu'elle avait ouvert les yeux, la reine des dieux, Héra, se tenait face à elle et regardait Zeus avec une virulence plus terrible encore que celle de Cronos. La déesse avait sermonné son mari comme jamais. Tuer un dieu était interdit, et le roi ne pouvait changer cette loi comme bon lui semblait. Zeus avait alors décidé d'enfermer Hécate loin de l'Olympe afin de procéder à des interrogatoires, loin de son épouse et de ses horripilantes réprimandes, loin de tous les dieux, ses aînés comme ses enfants, qui n'étaient bien que des traîtres !

Mais c'était surtout la certitude que jamais personne ne pourrait la trouver ici qui l'avait mené à cet « exil ».

Plusieurs heures s'étaient maintenant écoulées depuis que Zeus avait commencé à la torturer.

Elle repensa aux deux pauvres empuses détruites sauvagement par le Roi du Ciel. Ses filles... Elle les avait aimées plus que n'importe quelle autre de ses créatures, sans nul doute à cause des siècles qu'elles avaient toutes trois vécues côte à côte. Elle leur avait offert des ailes en signe d'amour. Même Émpousa, la toute première de son espèce, ne lui avait jamais été aussi chère.

— Héra ne sera pas là pour te sauver cette fois, ma chère Hécate, dit Zeus fermement. Je pourrais te torturer longuement, si ardemment que même le supplice infligé à Prométhée paraîtrait doux en comparaison. Veux-tu ressentir éternellement les tourments du mal ? Je pensais que tu avais plus d'estime pour toi que cela.

— Et moi, je pensais que tu n'étais pas aussi corrompu par les ténèbres ! Alors que tu prétendais ramener la paix dans le cosmos, en supplantant le pouvoir de Cronos, voilà que tu deviens comme lui, le Retors ! Ton accession au pouvoir est entachée par l'acte abominable du parricide ! Tu n'es qu'un usurpateur, à l'instar de ton père ! Il serait temps pour toi de passer le flambeau à un être plus puissant et plus juste, dont la souveraineté est pleinement justifiée !

Zeus la toisa avec une férocité incommensurable qui fit pression dans l'air, avant de lâcher la foudre sur le corps saignant de sa prisonnière. Elle hurla, encore et encore, jusqu'au bout.

— Torture-moi tant que tu le désires ! (Un filet de sang s'échappa de sa bouche et coula le long de son menton.) Jamais je ne te dévoilerai le moyen de l'éliminer ! s'exclama-t-elle en crachant.

— Alors soit !

La foudre lécha à nouveau le corps de la déesse agonisante. Lors de ces séances de torture, elle pensait à Éros, qu'elle affectionnait tant depuis des années ; à Daímôn, avec qui elle avait noué un lien très fort ; et même à Athéna, laquelle n'avait pourtant été qu'une déesse parmi tant d'autres et était aujourd'hui devenue l'un de ses meilleurs alliés. Hécate n'avait jamais eu d'amis parmi les dieux, mais elle pouvait désormais se targuer d'en posséder au moins trois.

La douleur était harassante ; elle vit rouge. Elle ne percevait plus aucun son hormis ses râles d'agonie, ne sentait plus rien d'autre que les brûlures sur tout son corps. La souffrance devint vite insupportable, ses prières pour que sa damnation cessât se consumèrent, et elle se perdit dans le noir, laissant Zeus souffler de désespoir.

Quand va-t-elle enfin abandonner ? s'interrogea-t-il.

Le sang titanique qui coulait dans ses veines la rendait tenace comme ses aïeuls, à n'en pas douter !


(suite du chapitre 12 en suivant...)

Kháos, tome I : Le Parjure de l'Olympe [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant