ΓΙΙΙ - Δίκη (partie 3)

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Pandore les suivit du regard jusqu'à ce qu'ils disparussent derrière une paroi rocheuse au fond de la pièce semblant mener vers un autre atelier. Sur la voûte était gravé à même le roc « RÉSERVE » en français. Elle se retourna alors vers Daímôn, le visage soudain alourdi par la tristesse.

— Je suis navrée pour Cupidon, dit-elle en touchant son épaule. Je l'aimais beaucoup.

— « Aimais » ?

— Ne t'en souviens-tu pas ? Il est... Il n'est plus.

Subitement, les images de la soudaine désintégration explosive de Cupidon défilèrent devant les yeux de Daímôn. Se dégageant du contact de Pandore, il recula, assailli par une douleur aiguë. Daímôn hurla et tomba à genoux. Il eut l'impression que l'on venait de transpercer sa tête d'une lance.

— Oh non ! pardonne-moi..., fit Pandore affolée. J'aurais dû me douter qu'Hécate eût utilisé sa magie pour bloquer ce souvenir. Ça va aller...

Elle s'agenouilla et posa une main bienfaitrice sur son dos. Elle constata que Daímôn transpirait à grosses gouttes. Émanait de son corps une chaleur qui ne manqua guère de brûler légèrement sa paume.

— Ton corps est en train de rejeter la magie d'Hécate, expliqua Pandore. Ça va vite passer.

Mais il fallut bien trop de secondes supplémentaires au goût de Daímôn pour que la douleur s'estompât enfin et que la magie disparût. Le fils de Kháos inspira un grand coup et essuya les perles salées sur son visage avant de se relever en tremblant, rubicond d'épuisement.

— Comment... ai-je pu... oublier... ? haleta-t-il.

— Ce n'est pas tout à fait cela. L'effet est pour ainsi dire le même, mais Hécate a simplement utilisé sa magie pour entraver le souvenir et calmer ton esprit. Ne lui en veux pas. Elle ne pensait pas à mal, ne l'a fait que pour t'aider.

— Je ne lui en veux pas. C'est juste cette douleur aiguë que j'ai ressentie, comme si l'on m'arrachait lentement l'âme. Éros était bien le seul à me rasséréner sans utiliser quelque pouvoir...

Pandore eut les larmes aux yeux.

— Je suis tellement désolée...

— Merci... (Un lourd silence s'interposa, que Daímôn brisa finalement après quelques secondes.) Tu semblais très attachée à lui.

— Cupidon et moi étions des amis proches. Papa le déteste, car c'est le fruit de sa honte, la tromperie d'Aphrodite avec Arès – ou d'Hermès, nul ne le sait. C'est tout Aphrodite, ça ! Bref, il ne désirait surtout pas que je le côtoie, mais sans que nous le voulions, du fait de mes habituelles rencontres avec Psyché, nous avons rapidement sympathisé. Qu'importent les relations familiales et ce qu'elles impliquent, nous avons décidé de faire ce que nous voulions. D'ailleurs, je conseillerais toujours de ne jamais prendre cas des nombreuses animosités tacites que se partagent les dieux. Il est certain que personne ne se parlerait alors.

Daímôn sembla amusé par ce blâme envers les immortels et leur fâcheuse habitude à se disputer pour la moindre parole volée.

— Je pense qu'Héphaïstos avait simplement peur que l'amour que porte Éros à Aphrodite te détourne de lui, fit Daímôn. Héphaïstos et Aphrodite se détestent viscéralement, et ton père t'aime plus que tout. Cela se voit au premier coup d'œil.

— Oh, c'est le meilleur père que l'on puisse rêver, je n'en doute pas un instant. Aimant, protecteur, attachant. Il me couve beaucoup. Ça remonte à l'époque où il a découvert son cocufiage par Aphrodite avec Arès – qui n'est sûrement pas le premier. Toujours est-il que je lui ai remonté le moral du mieux possible. Il savait bien qu'Aphrodite ne l'aimait pas et qu'elle était loin d'être fidèle, mais il est devenu la risée du mont Olympe, déjà alourdi par sa laideur et le dédain des dieux à son égard. Et puis est advenue cette histoire de jarre. Des millénaires se sont certes écoulés, mais l'on ne peut changer un dieu.

Kháos, tome I : Le Parjure de l'Olympe [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant