ΙΙΙΙ - ἜΡΩΣ (partie 5)

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Environ vingt minutes plus tard, Daímôn émergea du vestibule, sentant bon le savon, les cheveux encore mouillés, vêtu du chiton qui lui seyait parfaitement. Sur la table, des victuailles de toutes les couleurs l'attendaient déjà. Psyché et Cupidon s'étaient assis et sirotaient une liqueur d'une belle robe rouge dans des calices en argent. Daímôn s'installa en face de Cupidon, à droite de Psyché, et hésita à piocher dans les victuailles. Psyché lui tendit alors une coupe pleine de la même substance pourpre.

— Du vin, dit-elle.

— Je croyais que les dieux ne mangeaient que de l'ambroisie, et ne buvaient que du nectar ?

— C'est vrai, hormis pour le vin. La meilleure des boissons. Tout ce que tu as devant tes yeux est du nectar pour les autres liquides, et de l'ambroisie pour la viande, les fruits, les céréales et les légumes. Comme les mortels, nous avons différentes formes de mets, avec des goûts spécifiques. Pourquoi devrions-nous nous priver sous prétexte que nous ne sommes censés nous nourrir que de nectar et d'ambroisie ?

— Bien sûr. Mais toutes ces quantités ne risquent-elles par de nous, comment dire, « blesser » ? Athéna m'a appris qu'une trop grande dose d'énergie provenant des nourritures divines pouvait nous infliger des maux.

— Il n'y a qu'une faible quantité dans chaque, de façon à ce que l'on puisse faire un vrai repas. C'est un peu comme les mortels. S'ils mangent trop, des nausées et des crampes les prennent à l'estomac. Pour les dieux, la surdose d'énergie aura un effet similaire, mais plus violent et continu. Tu le sentiras lorsqu'il sera temps pour toi de ne plus manger ou boire. Et je suis persuadé que tu meurs de faim et de soif !

— Je dois bien l'avouer, oui, rit Daímôn.

— Levons nos verres à ton retour parmi nous, mon frère ! claironna Éros. Je suis si heureux de te savoir parmi nous.

— Moi de même, Éros.

Les divinités trinquèrent et burent. Le goût du vin était exquis. L'amertume du raisin alcoolisé caressa les papilles gustatives de la langue de Daímôn et coula lentement dans sa gorge. Il comprenait mieux pourquoi Dionysos, le dieu du Vin, en buvait autant ! Puis, il piocha un carré de viande devant lui à l'aide des piques en argent posées sur la table et l'avala tout rond.

— C'est très bon !

Psyché rit, tout comme Cupidon.

— Les dieux sont-ils si proches que cela des mortels ? s'enquit Daímôn.

— Bien plus qu'ils ne veulent se l'avouer, répondit Psyché après une nouvelle rasade de vin. Après tout, ils sont leur création. Ainsi sont-ils à leur image. Comme eux, nous devons dormir, manger, nous laver. Nous éprouvons des sentiments, nous travaillons. Nous vivons, tout simplement.

— Tu te rendras vite compte que les dieux et les mortels ont les mêmes habitudes, intervint Éros en avalant une cuillerée de petit-pois. Ce sont les mêmes routines, bien plus qu'on ne le croit. Prendre un bon bain le soir après une longue journée de dur labeur en fait partie, par exemple.

— Je vous remercie d'ailleurs tous les deux pour le... bain, et votre hospitalité, fit Daímôn.

— C'est tout naturel, dit Psyché. Un frère de mon mari Éros, tant qu'il n'est pas fils d'Aphrodite, sera toujours le bienvenu chez moi.

— Mère et Psyché ne s'apprécient pas beaucoup, commenta Cupidon.

— Pardonne-moi, cher époux, mais après ce qu'elle m'a fait ! Fut un temps où je ne lui en tenais pas rigueur, car je n'étais qu'une jeune mortelle, une vierge princesse, qui respirait la miséricorde et la bonté. Depuis que je suis devenue une déesse – même si c'est grâce à elle – qu'ai-je à craindre ? Elle ne peut me tuer, et tu es bien trop fou de moi pour qu'elle parvienne nous séparer.

— Je t'aimerai éternellement, mon amour.

Psyché en fut satisfaite.

— Daímôn doit être un peu perdu. Peut-être veux-tu connaître notre histoire, fils de Chaos ?

— Volontiers.

Un bon repas et une bonne histoire le comblaient de joie. Quitte à vivre une vie de dieu, aux côtés de son frère, autant en apprendre le plus sur eux tous. Et en commençant par sa... belle-sœur ? Cette idée l'amusa.


(suite du chapitre 4 en suivant...)

Kháos, tome I : Le Parjure de l'Olympe [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant