Aussitôt, le vent glacial se leva dans la salle. Jamais Daímôn n'avait ressenti un froid aussi intense, pas même en plein cœur du désert arctique. Chioné souleva sa main libre et déclencha une tempête de neige. Les fouets d'air cinglèrent le Primordial et l'Olympienne avec force fureur.
— Daímôn ! cria Athéna en se couvrant le visage de ses bras. Les armes sont sur la table de verre où nous étions à notre arrivée, au centre des sofas.
— Je sais ! répondit-il laconiquement, incapable de voir à plus d'un pas face à lui.
— Alors, va les chercher ! Je m'occupe d'eux.
Daímôn suivit la piste calorifique qui émanait de l'Omphalόs. La neige le noyait totalement, mais il n'avait nullement besoin de ses yeux pour se guider. Il avança, lentement, bravant les gifles de vent qui le frigorifiaient – son himation lui manquait tout à coup... Ses genoux butèrent dans la table de verre. Il vit sa lame posée sur le drap blanc que le serviteur avait apporté à Chioné, ainsi que les armes de Cupidon et le xíphos d'Athéna. Il tendit une main et s'apprêta à poser la main sur Díkê... mais une force le tira violemment en arrière.
Le vent le souleva avec brutalité et le ballotta sans merci. Il fut projeté contre le mur opposé à la table et sentit le terrible impact contre son front. Il se releva, plaqua sa main sur le filet de sang qui dégoulinait.
La chaleur dégagée par Díkê diminua, annihilée par la tempête de neige. Celle-ci semblait parfaitement vivante, laissait libre cours à son ire. Dans ce blanc infernal, Daímôn vit deux yeux rouges comme le sang se dessiner, tandis que le blizzard formait des bras aussi gros que des chênes. Les deux membres de neige et de glace le frappèrent brutalement, sans aucune pitié. Les ténèbres commençaient à s'emparer de son esprit...
— Tu vas payer pour la mort de mes frères, Parjure de l'Olympe ! tonna la voix de Chioné, amplifiée par son pouvoir déchaîné.
Elle frappa, encore et encore et encore, son corps, uniquement fait de glace, renforcé par la force de Borée. Puis, les mains se serrèrent autour de sa gorge et l'air vint à manquer. Daímôn sentit ses yeux se révulser.
Et le Dragonique se manifesta.
Tout son corps se couvrit de flammes dorées. Les membres de neige se liquéfiaient et se reformaient inlassablement. Chioné se démenait pour supplanter le pouvoir antonyme... ! Daímôn frappa à son tour !
Les flammes sous ses pieds le soulevèrent et il dauba la forme enneigée de Chioné qui explosa en un nuage de brume.
Au son de la détonation – pareille à la déflagration d'un baril de poudre –, la grêle drue se mit à diminuer graduellement, jusqu'à disparaître totalement. Athéna, enfin ôtée de la cécité due à la tempête de neige, vit son instigatrice inerte sur le sol, à côté d'un Daímôn essoufflé, incapable de bouger.
— Aaahh !
Le cri de Borée la ramena à son combat. Les épées s'embrassèrent et se séparèrent dans une danse folle.
— Tes actes ne resteront pas impunis, Athéna ! rugit Borée. La mort de mes fils, de mes soldats, le chaos que vous avez orchestré en mon royaume ! Les conséquences vous foudroieront bientôt ! Et ton protégé pourrira dans les pires souffrances que les dieux peuvent imaginer. J'y veillerai !
— La colère obscurcit ton jugement, comme toujours, roi de l'Hiver ! Nous ne sommes en rien responsables de tout ceci. C'est toi qui as débuté les hostilités. Nous étions venus en paix, pacifiques et indulgents à ton égard. Nous étions tes invités. Mais tu n'as guère respecté les règles auxquelles tout hôte doit s'assujettir ! Les Destins te punissent de cette faute par la mort de tes enfants !
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Kháos, tome I : Le Parjure de l'Olympe [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]
Fantasía« La vie d'un mortel est difficile ? Celle d'un dieu l'est infiniment plus ! » Lorsque les Bienheureux emportent la jeune sœur de Daímôn, son existence s'en retrouve chamboulée à jamais. Mais telle est la voie que le destin a choisie afin de l...