ΔΓΙ - Ἀπιστία (partie 7)

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Hécate ouvrit faiblement les yeux alors qu'elle entendait les bruits de pas approcher. Combien de temps cela faisait-il qu'elle se trouvait ici ? Elle était si faible, avait mal partout, se sentait tel un mortel qu'un cheval aurait piétiné des jours durant, sans s'arrêter une seconde. Elle regarda autour d'elle : toujours cette même grotte qu'elle observait sans cesse depuis ce qui lui semblait une éternité, ayant perdu toute notion du temps. Ses poignets étaient toujours entravés dans des chaînes en fer, lesquelles lui arrachaient des supplices chaque fois qu'elle tirait dessus. Elle jeta un œil vers la brillance éclatante devant elle : la sortie ! Elle rêvait d'y parvenir. Mais avec ces maudites entraves, elle ne pouvait guère. Elle était comme un Titan maintenu pour l'éternité dans les méandres du Tartare, tel Atlas enchaîné portant le monde sur ses épaules. Elle sentait que ses entraves aspiraient sa force vitale. On ne lui donnait du nectar qu'une fois par jour, ration bien trop insuffisante pour qu'elle pût refaire ses forces et se tirer de cette situation et de cet endroit maudit qu'elle n'arrivait guère à localiser.

Sa tête tomba mollement. Elle n'avait plus la force de continuer ainsi. Comment pouvait-on vivre éternellement dans de pareils tourments ? Elle regretta alors toutes les malédictions qu'elle avait jetées sur les mortels dans ses vieux accès de folie.

Une ombre se dessina à l'entrée de la caverne, empêcha la lumière de la caresser. Elle releva la tête un bref instant et vit un homme de grande stature, entièrement sombre. Elle ne pouvait lui attribuer une identité. Ses yeux lui faisaient mal à mesure qu'elle le regardait.

Sa tête retomba à nouveau.

L'homme s'approcha. Elle sentit l'énergie brute de son sang se répandre dans l'air. Il était si puissant !

Qui est-il ? se demanda-t-elle.

Je ne peux te dévoiler mon identité, fille de Titans, dit l'homme d'une voix tellement intense, qu'elle n'avait jamais entendue de toute sa longue existence.

Sa simple présence, s'il s'était révélé un ennemi, aurait certainement pu la tuer en quelques secondes.

L'inconnu prit un calice dans la poche intérieure de sa tunique noire comme la nuit. Il prononça des paroles qu'Hécate ne comprit pas et aussitôt, un liquide vert brillant se répandit dans la coupe. Sans attendre, l'étranger porta le liquide aux lèvres de la déesse qui but doucement, ignorant ce que c'était. La substance avait un goût si exquis ! Elle avala alors tout goulûment et se lécha les babines de délice. Jamais elle n'avait été aussi heureuse de boire du nectar. Celui-ci lui semblait cependant plus puissant que celui qu'elle buvait généralement sur le mont Olympe.

Tu es très intuitive et perspicace, fille de Titans, dit l'homme. La teneur en énergie de ce nectar est bien plus puissante que votre ridicule boisson miellée, Quatrième Génération. Tes forces vont revenir petit à petit, mais les entraves qui te maintiennent prisonnière les avaleront également doucement.

— Alors, enlevez-les-moi, pria-t-elle. Faites cesser mes souffrances ! Pitié...

Voilà qu'elle se mettait à supplier un inconnu, ce qui ne lui ressemblait absolument pas !

L'homme se mit à rire doucement.

Je ne le puis guère, ma chère déesse de la Magie. Le moment n'est pas encore venu. Mais très bientôt, quelqu'un viendra te sauver, et tu accompliras ton destin.

— Mon destin ?

Oui. La roue ne peut tourner sans toi. Tu es une pièce maîtresse sur l'immense échiquier dont l'ultime partie a débuté. Sans toi, le Roi tombera. Échec et mat.

— Que voulez-vous dire ? De quoi parlez-vous ?

Il porta ses mains à chaque tempe de la déesse. Son esprit se brouilla subitement et des milliers d'images se formèrent dans sa tête. Elle garda la bouche ouverte, les yeux révulsés, incapable de se défaire de l'emprise féroce de l'inconnu qui lui transmettait des images du passé. Il relâcha enfin la pression et la tête d'Hécate tomba mollement de nouveau. Un filet de bave coula de ses lèvres.

Elle ne parvenait à dire un mot, hors d'haleine, bouleversée par tout ce qu'elle venait de voir.

Mes dieux !

Comme je te l'ai dit, l'ultime partie du destin ne peut être remportée sans toi, déesse de la Magie, dit l'homme. Dans très peu de temps, tu devras accomplir un acte que jamais tu ne pensais avoir à faire, et que tu ne voudras pas faire. Mais tu n'auras guère le choix, ou l'avenir de ce monde, des dieux et des mortels, sera réduit en cendres, par la Chute du Roi. Ces images, tu dois les garder pour toi, n'en parler à personne. As-tu compris ?

Hécate ne répondit pas, mais l'inconnu prit cela pour une affirmation. Il fit alors volte-face et se dirigea vers la sortie.

— Attendez ! cria subitement Hécate. Qui êtes-vous ? Dites-le-moi.

Je ne le peux encore, mais dans très peu de temps, tu comprendras qui je suis, et tu suivras ma route. Ce sera difficile, mais tu le feras.

— Emmenez-moi avec vous ! Expliquez-moi !

Ce n'est guère encore l'heure, fille de Titans. Cependant, fort bientôt, le monde changera... encore. Une nouvelle ère... de ténèbres ou de lumière, de fin ou de prospérité... Alors tu mesureras pleinement l'importance de ton rôle dans ce jeu. Ton prochain coup changera l'avenir du monde. Mais l'effectueras-tu ? Je l'ignore. J'espère simplement que tu ne feras guère la même erreur que moi en ces temps troubles. Adieu.

L'homme quitta la grotte et s'évapora comme un mirage, laissant Hécate seule avec ses doutes, ses craintes, sa colère et sa solitude.

Jamais je ne pourrai le faire !


(suite du chapitre 16 en suivant...)

Kháos, tome I : Le Parjure de l'Olympe [SOUS CONTRAT D'ÉDITION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant