Chapitre 14 [Shannon]:

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- D'où te vient ton prénom? Demandé-je.

Jai hausse les épaules, d'humeur maussade, son gobelet de café à la main. Sa journée de travail a été longue, il pleut à torrents, nous sommes trempés et glacés, et deux enfants sont décédés dans l'hôpital où elle travaille en journée.

- J'en sais rien. Tout ce qu'on m'a donné, c'est ce prénom de mec. Comme si celle qui m'a mise au monde l'avait fait exprès...

Une boule de tension fait apparition dans ma gorge. Merde, pourquoi je lance toujours des sujets sans y réfléchir?! Je voulais juste lui remonter le moral, la distraire un peu de son quotidien, pas l'enfoncer encore plus profond dans sa tête.

Je lui demande silencieusement de continuer alors que je tiens le parapluie et mon café tandis que nous prenons la direction de chez elle.

- Je ne sais rien de mes parents. Rien de rien. En France, quand tu fais naitre un enfant sous X, tu peux lui laisser une lettre qu'il aura à ses dix-huit ans... Je n'ai rien eu. Tout ce qu'elle m'a donné, c'est ce prénom! Comme si elle en avait le droit, crache-t-elle.

Elle shoote dans un caillou, je me serre un peu plus contre elle, épaule contre épaule, pour lui signifier que je suis là. Je n'ai aucune idée de comment l'apaiser de ses colères. Le mieux est encore de la laisser vider son sac, puisqu'elle veut bien en parler, et voir les conséquences après.

- Un peu comme si elle se foutait de ma gueule. Du genre "tu ne sais rien de moi, tu ne peux même pas entamer des recherches puisqu'on t'as donné un autre nom de famille que le mien, mais moi je sais qu'il n'y a pas cent mille Jai de sexe féminin dans ce putain de monde."

- Elle n'a jamais essayé de te retrouver?

- Non. C'est pour dire à quel point elle doit être contente du choix qu'elle a fait il y a vingt ans. Je veux bien comprendre que, si ça se trouve, elle n'était pas prête à avoir un enfant ou je ne sais quoi, mais merde! J'existe, et c'est de sa putain de faute!

Je ne sais pas si elle a réalisé qu'elle avait à moitié parlé français, mais comme Jared parlait un peu français, je sais déja que ce sont des insultes. Je ne sais pas parler d'autre langue que l'anglais, même si je connais quelques mots de français et de croate grâce à Jared et Tomo. Je n'ai jamais été intéressé par les études, à vrai dire.

Quand on arrive chez elle, tout est sombre et silencieux. Il est vingt heures. Cyan est sûrement partie promener les chiens ou les a emmené chez Dan, chez qui elle est souvent après le travail.

- Tu as mangé? Demande-t-elle.

- Pas encore.

- Macaronis au fromage?

Elle a l'air si enthousiaste de proposer ça que je hoche la tête, souriant. C'était mon plat favori, quand j'étais gamin... avant que je ne me casse toutes les dents de devant à cause d'un jeu stupide. Je grimace à ce douloureux souvenir. Heureusement que c'étaient mes dents de lait, même si j'ai dût vivre avec cette horreur pas mal de temps.

- Avant, je vais aller prendre une douche, dit-elle en claquant des dents. Putain de froid de merde! Je suis complètement... Ah, mais toi aussi, tes fringues sont trempés! Tu veux aller prendre une douche et les faire sécher?

- Je n'ai rien pour me changer, dis-je en soulevant une évidence.

Elle lève les yeux au ciel, ça me fait marrer quand elle fait ça. Elle remplit d'eau la gamelle des chiens, même si ils ne sont pas là, et va dans sa chambre pour en revenir avec un sweat à manches longues gris et la combinaison Shannosaure. Elle me les tend avec un sourire malsain et cupide avant de m'indiquer la salle de bain tout en retirant son propre pull en pestant quand il s'accroche dans ses nombreuses boucles d'oreille.

A la salle de bain, je me dépêche de me doucher sans prêter attention au chibre dessiné au rouge à lèvres sur le miroir et aux vêtements féminins. Une torture. Cyan et Jai sont vraiment étranges. Et puis, c'est quoi ce carnet posé sur le lavabo, couvert d'insultes et de dessins bizarres? A croire qu'elles y marquent quelque chose pour l'autre à chaque passage ici!

- Mets tes vêtements dans le sèche-linge, dit Jai en sortant à son tour. On va man... Faut-il vraiment que tu sois en caleçon?

Le sweat qu'elle m'a passé est tellement large qu'il m'est trop grand, il tombe donc sur mes cuisses. Comme si elle était gênée de me voir dans cette tenue... ce n'est pas la première fois.

- Je ne remettrais pas ta sale combinaison, dis-je en ricanant. Avoues que je suis sexy...

- Certes... Mais on ne va pas commencer les strip-repas. Ne brûle pas les étapes, ok?

Course Contre La VieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant